Prologue (Asu)

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Mon sang coulait de ma main en abondance, la douleur était lancinante, insupportable. Pourquoi ce moment précis pour son apparition ? Pourquoi fallait-il que le passé ressurgisse aujourd'hui ? Pourquoi ? Pourquoi le destin semblait-il s'acharner contre Siyah... Je désirais le retrouver, mais le rattraper dans sa course effrénée était impossible. À la place, j'avai choisi d'engager une conversation avec ma vieille amie, Morgane.

— Pourquoi es-tu venu ? Avais-je demandé, souffrant silencieusement.

— Pourquoi m'as-tu arreter ? Tu n'avais pas le droit de faire cela, Asu ! Tu sais aussi bien que moi que c'est lui qui...

La colère obscurcissait non seulement les yeux des autres, mais aussi leurs pensées et leurs actions. Avant même qu'elle n'ait eu l'occasion de répéter de telles absurdités aux oreilles de tout le monde, je lui avais infligé une gifle avec une main étincelante de colère pour la faire taire.

— Tu ne devrais plus agir sous le coup de la colère passé.

— Hmpf... Tu sais, j'ai toujours été jalouse de ta gentillesse quand nous étions inséparables à l'époque. Mais en te voyant protéger Siyah, je me suis rendu compte que je n'avais en fait rien à t'envier.

— Tu le sais, ce n'est pas la faute de Siyah. Je comprends que votre vie n'ait pas été facile à l'époque, mais ne t'en prends plus à Siyah, s'il te plaît.

— Pourquoi le protèges-tu autant ? Zéphyr ne se serait pas suicidé s'il avait trouvé le courage de réaliser leurs rêves ! S'il a franchi le cap, c'est justement À CAUSE DE LUI !

— Tu rejettes la faute sur un pauvre collégien qui subissait les sévices de son père chaque soir dès qu'il le surprenait en train de dessiner !

— Calme-toi ! Tu ne peux pas imaginer combien de kilos j'ai perdus, combien de fois j'ai flirté la mort en me tailladant les veines chaque nuit. Tu ne peux pas comprendre à quel point ma vie est devenue sombre depuis sa mort, mes séjours à l'hôpital se multipliaient. J'en suis arrivée au point où j'ai dû être hospitalisée en psychiatrie PARCE QUE JE NE CESSAIS DE VOIR ZÉPHYR ! Je pensais réellement qu'il était revenu parmi les morts, personne ne voulait me croire, on me prenait pour une folle à lié, mais j'en avais que faire des dires des autres ! SI ZÉPHYR N'EXISTAIT QU'À TRAVERS MES YEUX ET DANS MON ESPRIT, ALORS CE MONDE N'AVAIT QU'À PARTIR EN FUMÉE ! IL DOIT PAYER, ASU ! IL DOIT DISPARAÎTRE !

— Tu blâmes un enfant fragile qui n'osait pas confronter son père. C'était la même chose pour toi et Zéphyr, sauf que contrairement à Zéphyr, Siyah n'avait pas de grande sœur pour le protéger ! Comment peux-tu lui en vouloir, à un enfant qui n'a jamais cessé de se détester, de s'infliger de la souffrance parce qu'il pensait que la mort de la personne qu'il considérait comme son frère était de sa faute ? Crois-tu qu'il ait souhaité tout cela ? Je connais mieux que quiconque la tristesse qu'il a ressentie en voyant Zéphyr se donner la mort devant lui. SOUS SES PROPRES YEUX, IL A MIT FIN À SES JOURS EN SE TIRANT UNE BALLE AVEC L'ARME DE SERVICE DE SON PROPRE PÈRE !! TU IMAGINE L'HORREUR ET LE TRAUMATISME QU'IL A DÛ SUBIRE ??

Je n'y arrivais plus, à mesure que je parlais, les souvenirs les plus sombres affleuraient de plus en plus dans mon esprit. Mes larmes coulaient d'elles-mêmes du coin de mes yeux. Morgane, elle, demeurait silencieuse face à mes paroles et à mes larmes. Je devais persévérer, je devais conclure cette conversation. C'était inévitable !

— Il m'avait tout raconté ce soir-là. Malgré la mare de sang dans laquelle ils flottaient tous les deux, il a tout tenté pour le ramener à la vie : le bouche-à-bouche, le massage cardiaque, les secousses... Mais en vain. J'étais resté une semaine à ses côtés après cette tragédie, car si je le laissais seul, il aurait rejoint Zéphyr en mettant fin à ses jours à son tour. Je l'aimais aussi, peut-être pas autant que toi et Siyah, mais il était mon ami aussi. J'ai pleuré et passé des nuits blanches à ne penser qu'à lui, mais à aucun moment je n'ai blâmé Siyah. Alors, s'il te plaît, comprends notre douleur. Tu n'as pas été la seule à souffrir dans cette histoire, moi aussi j'ai souffert, mais celui qui était submergé par un tsunami de douleur, c'était Siyah.

Enfin, j'ai pu réussir a vider mon sac. Maintenant...

Posant un genou au sol, puis l'autre, je m'étais prosterné devant Morgane pour lui demander une seule et unique chose : son pardon.

— Pardonne Siyah, je t'en supplie, Morgane. Je ne te demande pas de la faire pour toi, mais bien pour Zéphyr.

— Relève toi !

— S'il te plait, ne lui en veut pas.

— Relève idiote ! Larmoya-t-elle.

En relevant mon visage qui était plaqué au sol, la Morgane en proie à la colère avait laissé place à la petite fille fragile que j'avais autrefois connue. Les larmes coulaient abondamment de ses yeux, elle pleurait comme une enfant. Elle avait lâché le couteau de ses mains et s'était agenouillée en se blottissant contre moi.

— Je suis désolé... je suis désolé, Asu...

— C'est moi qui m'excuse, Morgane. J'aurais dû être à tes côtés, et je suis sincèrement désolée que tu aies dû endurer toute cette souffrance également. Je regrette profondément d'avoir été une amie si peu présente... si mauvaise.

— Ce n'est... pas de ta faute, Asu... Tout ce que je voulais, c'était voir Zéphyr heureux, je ne demandais rien de plus et... on me la tout de même retirée... Le voir retrouver... le sourire grâce à Siyah m'avait comblée de joie à l'époque. Mais lorsqu'il avait transformé ce sourire en affliction... je lui en ai tellement voulu, sanglota-t-elle en s'exprimant. Tout ce que je voulais, c'était les voir tous les deux heureux en train de réaliser leurs rêves... Mais je suppose que c'était trop demander...

— Moi aussi je voulais voir ce reve voir le jour, moi aussi...

— Si seulement mes parents n'avaient pas été si odieux envers nous... et le père de Siyah... si seulement les trois pouvaient disparaître et n'avoir jamais existé... Bon sang, cette vie est si triste... si nulle, si détestable...

— Si seulement nous pouvions encore se réunir tous les quatre dans ce parc, comme avant...

Nous avions exhumé toute la douleur enfouie en nous. Comme au bon vieux temps, nous avions conversé comme si c'était la première fois que nous nous étions rencontrées. J'avais perdu contact avec elle depuis si longtemps, elle avait changé, j'aurais tant aimé reprendre de ses nouvelles. Elle était devenue méconnaissable. La petite fille autrefois agressée par les garçons était désormais une femme forte et épanouie. J'étais incroyablement fière d'elle, heureuse de voir qu'elle avait réussi à émerger de l'obscurité.

— Je suis désolé pour ta main... s'affligea Morgane.

— Ne t'en fait pas, ça guérira très vite, haha. En tout cas, je suis contente que nous nous soyons réconcilier.

— Oui, moi aussi. 

— Et du coup, tu as prévu de faire quoi pour Siyah ?

— Après ce que je lui ai dit et tenter de faire... Je ne sais pas, je me sent coupable...

— Je vais essayer de le convaincre de venir te voir, et si je n'y parviens pas, le "hasard" vous réunira, haha.

— C'est malin de ta part, haha... Dis-lui que je ne veux pas d'excuses, je veux seulement qu'il accomplisse cela pour moi...

Elle approcha doucement ses lèvres de mon oreille pour me murmurer son vœu. Après cela, nous nous sommes dit au revoir, et je suis rentrée chez moi, car je sentais que ce n'était pas le bon moment pour déranger Siyah. Le choc était si évident sur son visage à ce moment-là. Je tenais à le laisser seul, pensant sincèrement que c'était la meilleure chose à faire. Cependant, je n'aurais jamais imaginé qu'il se serait enfermé chez lui et qu'il nous aurait ignorés pendant un mois entier.

J'avais commise une erreur irréparable. Siyah était retombé dans l'obscurité et la douleur.

J'ai été si sotte.

Je suis FatiguéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant