Aurais-je décliné que je n'aurais plus honte :
Je sais ce que je vaux hors folie et tumeur,
J'ai assez scapiné pour n'être plus Géronte,
Qu'y ferait un cerveau dégradé si je meurs ?
Il est sans doute un faîte à l'humaine injustice,
C'est de juger un homme après qu'il a œuvré
Non la besogne faite au temps des jours propices,
Mais la petite somme où il aura sombré.
Plus de vingt ans que j'ose indiquer sur des pages
Tant de milliers de mots qu'on n'a lus ni compris,
Il faudrait que je pose en dépit de mon âge
Pour pousser des rameaux qui feront tout mon prix ?
Si ce jour nulle femme avec feu n'est éprise
De celui qui brûla de son art ardemment,
Il est tard pour sa flamme et que ma verve attise
La braise longtemps là pour porter un amant.
Adieu donc, mes espoirs ! Et si je diminue,
J'aurais bien mérité au moins mon propre-amour !
Ce n'est point dans le soir lorsque sombre la nue
Qu'on doit voir si l'été est si beau qu'en plein jour.
Je tâcherai quand même à dessein d'être encore
L'être que je respecte, attentif, valeureux,
De rester qui l'on aime à qui aime l'aurore
Malgré l'âme suspecte et l'esprit moins heureux.
Écrit le 16 juillet 2024. Publié le 18 septembre 2024.