Dans l'Ombre de la Lune

Chapitre III : Informations / Partie 1

Lorou injecta à nouveau le produit dans le corps de leur proie. Il fallait que le « colonel » Davis parle et, pour cela, le jeune scientifique ne connaissait rien de mieux que le sérum de vérité. Cela faisait déjà plusieurs heures que Kéra lui assénait coups sur coups, et cela n'était d'aucune utilité. Avant cela, l'humain avait été enfermé pendant deux jours sans rien à manger et juste un peu d'eau croupie afin de le maintenir éveillé. Mais la torture physique ou psychologique n'avait aucune prise sur lui, et Lorou commençait à redouter que le colonel ne soit entrainé à ce genre de sévices.

Une fois le produit injecté, le loup sortit de la salle où était attaché l'homme et rejoignit Maro, qui discutait avec Kéra.

- Cette solution va fonctionner !

- Rien n'est moins sûr. Si les scientifiques sont entrainés à résister aux coups, pourquoi ne le seraient-ils pas à leurs propres sérums de vérité ?, rétorqua la louve.

- Tu ne passes pas assez de temps au centre, Kéra, et tu ne fais pas attention à ce que je te dis... Nous avons trouvé un moyen de rendre leur produit plus efficace contre eux. Il parlera, expliqua Lorou.

- Si tu le dis... Bon, je vais essayer de trouver quelque chose à faire, cette inaction commence à me peser...

- Non. Tu restes ici, Kéra ! Tu dois être là quand il va parler ! Dois-je te rappeler que ce sera à toi de trouver leur laboratoire ?, imposa Maro.

La louve soupira en obtempérant, s'asseyant dans un coin de la pièce et jouant avec son poignard. Lorou la regarda du coin de l'œil. Il fallait que Kéra calme son tempérament, et vite. Elle lui était promise et, en tant que futur Shéker, il ne pouvait se permettre d'avoir une compagne aussi sanguine. En plus, leur phase de reproduction n'allait pas tarder à arriver, il ne restait plus qu'un peu moins de deux ans à sa promise pour prendre ses responsabilités de future mère et cheffe de meute. Les louveteaux ne pouvaient être créés qu'entre leurs vingt-sept et trente-cinq ans et, pour ceux qui avaient l'autorisation de se reproduire, ils avaient un minimum de quatre progénitures à donner à la meute. En tant que futur Shéker, Lorou se devait d'avoir au moins cinq louveteaux, dont l'un d'entre eux deviendrait Shéker à son tour.

Son regard se posa sur l'humain, que Maro surveillait depuis la fenêtre miroir. Le colonel n'était pas encore prêt à parler, le loup pouvait le voir. Il faudrait encore attendre une vingtaine de minutes avant que le sérum ne fasse totalement effet et décida de profiter de ce temps pour observer sa promise. Assise par terre, sa musculature saillante montrait son travail au sein de la meute : elle était une assassine, et elle devait faire énormément de sport pour entretenir sa vivacité, sa force, sa rapidité et ses facilités au combat. En plus de ses muscles développés, elle avait une poitrine attirante et relativement forte pour une louve, un visage fin sur lequel étaient incrustés un nez droit, des lèvres charnues, des canines longues lorsqu'elle les sortait, ainsi que deux yeux noirs, comme pour tous ceux de leur espèce. Ses cheveux courts, noirs et bruns, permettaient de voir son long port de tête. Mais, comme tous les loups, Lorou préférait la voir en tant que louve, lorsqu'elle se transformait. Ses poils bruns-noirs étaient alors soyeux, ses dents d'une taille parfaite, sa truffe noire humide, sa longue langue était étonnamment noire, comme tous ceux de sa famille, aujourd'hui disparus.

- Pourquoi m'observes-tu, Lorou ?

- Tu m'es promise, il est donc logique que je te regarde.

- Si ça t'amuse... Ne devrais-tu pas plutôt t'occuper de notre proie ? Ou as-tu oublié ton travail ?

Le loup ne répondit pas, vexé. Décidemment, sa dulcinée n'était pas prête à devenir plus malléable et une future bonne compagne et mère de famille. Il décida d'en parler plus tard à son père et Maro. Eux seuls auraient une solution appropriée pour calmer la louve.

- Il est prêt, Lorou, informa Maro. Kéra, tu nous accompagnes !

- Oui, Maro.

- Je ne suis pas « Maro », je suis « Phaïr ».

- Le seul Phaïr pour moi était Faroh. Tu n'en es même pas une pâle copie.

Maro se retint de gifler la jeune indomptable et lança un regard à Lorou. Il était temps que Kéra cesse cette rébellion qu'elle avait en elle depuis près de dix ans.