Chapitre VIII : Discordes / Partie 3

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- J'ai l'impression que Kéra est beaucoup plus calme.

- Oui, mon fils, et heureusement... Je n'aurais pas eu envie de l'envoyer chez Eux pour m'en débarrasser... Elle nous est trop utile.

- Dans quinze jours, nous aurons tous nos cobayes. Si les tests de Lorou fonctionnent, et avec quelques modifications, nous pourrons espérer avoir synthétisé le virus d'ici deux mois, tout au plus, ajouta Maro.

- Parfait ! Maintenant, Maro, laisse-nous !

Le loup obtempéra et quitta les appartements privés du Shéker pour se rendre dans le centre de recherches. Il voulait voir ce que donnaient les précédents tests qu'il avait faits effectuer à ses scientifiques. Il était vexé de ne pas avoir eu l'idée de Lorou avant lui. Si tel avait été le cas, il aurait été prouvé qu'il était le meilleur chercheur mais, il n'en était rien. Le fils du Shéker était très malin et savait parfaitement ce qu'il faisait en l'empêchant de devenir aussi puissant. Il s'assurait son assise future et le devançait.

Après être remonté à la surface, Maro laissa les rayons du soleil qui parvenaient à filtrer malgré la forêt lui caresser le visage tout en se dirigeant vers le centre. A cette heure-ci, les techniciens et scientifiques étaient déjà tous arrivés et travaillaient sans relâche, de même que les loups qui leur servaient de couverture en fabriquant les vêtements. Les chemins pour mener au centre étaient donc calmes et il profita de ce moment de répit pour réfléchir à une nouvelle stratégie. Il ne savait pas ce que ferait le Shéker, si le plan de son fils fonctionnait. Il était fort probable qu'il aurait toujours besoin des Phaïrs pour diriger la meute du monde entier mais, quels seraient-ils ? Lorou avait prévu d'avoir au moins cinq louveteaux avec Kéra, cela signifiait un futur Shéker mais, les quatre autres, que seraient-ils ? Son plus grand espoir résidait en le fait que la plupart de ses louveteaux soient des femelles et qu'il ne soit obligé de les promettre à des alliés, dont son propre petit-fils faisait partie. En tout, Maro avait eu six louveteaux, dont cinq femelles et un mâle, sa plus grande fierté, qui avait lui-même eu, pour le moment, un fils, qu'il n'avait promis à personne, attendant le meilleur parti. Mais, aujourd'hui, il devait se rendre à l'évidence, son petit-fils serait trop vieux pour être promis à un enfant de Lorou. Il devait donc espérer un mâle dans la génération suivante, et de nombreuses femelles dans l'utérus de Kéra. Ainsi, son arrière-petit-fils pourrait garder sans crainte le statut de Phaïr, en tant que futur père des petits-enfants du prochain Shéker. Maro ne pouvait espérer mieux. Toute révolte était impossible et, s'il tentait quoi que ce soit contre le chef, il savait qu'il serait tué sur le champ. Son seul espoir résidait en ses descendants et en ceux de Lorou.

Après une heure de marche, tandis qu'il entrait dans le centre de recherches, il se dirigea directement vers son équipe de chercheurs.

- Quelles sont les nouvelles des cobayes 1 ?

- Tous ne sont pas infectés par la maladie. A croire que certains ont déjà fabriqué des anticorps forts efficaces, Phaïr.

- Et les 2 ?

- La maladie se développe très lentement. A ce rythme-là, si nous lancions cette épidémie, les humains auraient tôt fait de trouver un vaccin ou des médicaments pour soigner une bonne partie de leur population.

- Des nouvelles des nouveaux tests de Lorou ?

- Ces informations sont classées « Shéker ». Nous ne pouvons pas vous les donner, Phaïr.

Maro manqua de s'étouffer et réagir violemment mais se retint de faire une scène puérile en public, en particulier devant ses subordonnés. Il aurait quelques mots à échanger avec Lorou. Ils travaillaient en binôme depuis de nombreuses années et Maro lui avait tout appris, faisant de lui le scientifique qu'il était actuellement. Et là, alors que l'élève allait dépasser le maître, non content de le ridiculiser, il lui interdisait l'accès à ses recherches. C'était tout bonnement inconcevable pour lui. Certes, en tant que Phaïr d'Amérique du Nord, il avait de lourdes responsabilités et un poids certain, en particulier grâce à sa proximité avec le Shéker, et aux secrets qu'ils devaient tous les deux cacher. Pour ces raisons, il savait que le chef de la meute ne se risquerait pas à l'évincer de son statut de numéro deux. Mais, apparemment, son fils, lui, ne voyait pas les choses de la même manière, concernant la science.

Le loup regarda le planning que projetait un robot. Lorou devait arriver d'ici deux heures dans le centre. Agacé, énervé et déstabilisé, Maro décida de l'attendre à l'étage supérieur, où il pourrait au moins profiter du soleil de Floride, qui traversait les immenses fenêtres de la réception.

Dans l'Ombre de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant