Dans l'Ombre de la Lune

Chapitre IX : Piège / Partie 1

Angeni ragea une nouvelle fois en faisant la liste des cobayes loups-garous qui lui avait été transmise. Elle avait bien obtenu du major général qu'il lui cède le jeune lycanthrope, mais il n'avait rien voulu entendre concernant le traitement de ces animaux. Déjà trois jours qu'elle avait eu son rendez-vous avec l'homme, et elle était toujours aussi agacée. Un de ses subalternes vint la voir et la coupa dans son analyse de ses futurs spécimens.

- Lieutenant West, quand voulez-vous installer les cobayes dans le secteur 2 ?

- Dès que possible, caporal. Tout est prêt ?

- Nous pouvons commencer le transfert maintenant, si vous l'ordonnez.

La jeune femme accepta et se dirigea avec le caporal vers le hangar dans lequel tous les lycanthropes étaient regroupés. Dix d'entre-eux allaient être sous son mini-projet, et elle espérait toujours atténuer leurs douleurs et améliorer leurs conditions d'incarcération. Leurs cages avaient été mises à l'écart, et plusieurs militaires commençaient déjà à les faire empiler par des robots sur une plateforme roulante qui les amènerait jusqu'au secteur 2, celui dans lequel Angeni était responsable des expériences et recherches.

Elle chercha des yeux le jeune loup-garou qu'avait corrigé le capitaine Svensson la fois d'avant et le vit, son regard noir planté dans celui d'un autre de son espèce, qui ne lui avait pas été confié. Elle soupira à la vue de cet adieu silencieux, beaucoup plus noble que bien des au-revoir humains qu'elle avait pu voir, notamment dans des aéroports.

- Ne peut-on pas emmener également celui-là ?, demanda-t-elle à Karl, qui supervisait le déplacement.

- N'en demandez pas trop, lieutenant. Vous avez obtenu dix cobayes de la part du major général, dont un que vous aviez explicitement demandé !

- Mais, ils semblent proches l'un de l'autre...

- Ce ne sont que des bêtes, lieutenant ! Il faudra bien vous rentrez ça dans le crâne pour faire vos expériences ! Ce ne sont que des bêtes, qui plus est, agressives !

Elle ouvrit la bouche pour rétorquer, mais le capitaine Smith la coupa :

- Voudriez-vous, lieutenant, que je fasse un rapport contre vous au major général ? Sachez accepter ce que vous obtenez, et ne pas en demander plus !

Angeni regarda une dernière fois le loup-garou dont son protégé semblait proche en soufflant. Si elle faisait une remarque de plus, elle risquait de perdre la totalité des cobayes qu'elle était parvenue à avoir et, avec cela, ce serait dix lycanthropes qui retourneraient aux mauvais traitements des deux capitaines. « Parfois, il faut faire des choix », pensa-t-elle. « Si je peux en aider ne serait-ce que dix, alors ce sera toujours ça de gagné... ».

Nathanaël se reposait dans la salle de détente. Après avoir conduit l'Alpha en Floride, et l'avoir laissé à Ocala, une ville proche de l'Ocala National Forest, il était revenu en Géorgie et avait eu le droit à deux journées de repos bien méritées. Il avait décidé de rester dans le laboratoire et de profiter de la nouvelle salle de repos, bien mieux équipée que la précédente de Caroline du Nord. En maillot de bain, ses pectoraux et abdominaux bien visibles, si une jolie compagnie se présentait, il se prélassait dans le jaccusi. Il avait fait son rapport en rentrant la veille au major général, et tout s'était bien passé durant son excursion. L'Alpha avait bien intégré toutes les informations qu'il lui avait transmises. Mais l'homme était encore tendu. Il redoutait le fait d'avoir ôté au loup-garou sa puce électronique, au cas où ceux de son espèce l'aurait sentie. Cela le gênait et, lorsqu'il en avait parlé à son supérieur, celui-ci l'avait rassuré.

- Ne t'inquiète pas, Nathanaël. Il a été totalement embrigadé depuis qu'il est petit. Ce ne sont pas quelques jours chez d'autres bêtes qui vont lui laver le cerveau, lui avait-il dit.

Le capitaine soupira, profitant de l'effet relaxant des bulles qui caressaient son corps, faisant monter son désir en repensant à la jolie lieutenant West. Quel dommage qu'elle ne soit pas plus attirée par les hommes, car elle avait vraiment toutes les qualités qu'il appréciait chez le sexe opposé : belle, intelligente, insoumise. Tant d'avantages dont peu de femmes de ce laboratoire étaient dotées.