Chapitre XV : Rapprochements / Partie 2

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- Je ne comprends pas, Kéra. Tu me repousses et tu veux que je reste...

- Qu'est-ce que tu voulais faire ? Je veux savoir !

- Mais enfin... Je ne vais pas te faire un dessin...

La jeune louve planta ses grands yeux noirs dans le regard azur de l'homme, tentant de comprendre ce qu'il désirait. La seule chose qu'elle sentait en lui était un taux de phéromones qui avait augmenté de façon considérable depuis quelques minutes. Elle connaissait bien cette odeur, car c'était la même qu'avait Lorou tous les soirs où il était un loup. Mais jamais elle ne l'avait senti chez un humain ou même un de son espèce alors qu'il avait cette apparence bipède. Elle ne comprenait pas pourquoi et comment le capitaine Svensson pouvait avoir cette hormone, alors qu'ils n'étaient pas en période de reproduction.

- Je veux savoir !

Mal à l'aise devant l'exigence de la jeune louve, Nathanaël en vint presque à espérer qu'Angeni allait prendre un bain moins long qu'elle ne l'avait dit avant de partir. Il ne parvenait pas à savoir ce que demandait exactement celle qu'il avait simplement voulu embrasser. Avait-elle eu l'impression qu'il allait trop vite pour elle, ou était-elle, comme le lieutenant West, attirée par les femmes ?

- Ecoute, Kéra, je suis désolé si je t'ai brusquée...

- Qu'est-ce que tu voulais faire ?, s'impatienta la jeune louve.

- Je voulais t'embrasser, ça te va ?

Kéra fit une mine dégoûtée qui ne passa pas inaperçue pour l'homme. Vexé, il se leva et se dirigea vers la porte. Plus d'une femme avait repoussé ses avances, mais jamais avec ce genre de regard. Alors qu'il posait sa main droite sur la poignée, il sentit celle de la jeune louve se poser sur son bras. Il eut envie de dégager son emprise, mais sa curiosité se fit la plus forte quand il vit le regard intrigué de celle qui avait refusé son baiser.

- Embrasser ? Sur la bouche ? C'est dégoûtant ! Tu es un scientifique, tu devrais savoir le nombre de bactéries qui se situent dans les muqueuses... C'est juste... impossible... Que voulais-tu alors ?

- Vous ne vous embrassez pas chez vous ?, demanda l'homme, étonné.

- Bien sûr que non ! Pourquoi ferions-nous ça ?

- Mais lorsque... lorsque vous faîtes l'amour, vous ne vous embrassez pas ?

- Comment le pourrions-nous ? Nous sommes des loups !

- Oui enfin...

Nathanaël ne finit pas sa phrase, venant de comprendre ce que lui disait la jeune louve. Ils ne faisaient l'amour que lorsqu'ils étaient des loups, et non sous leur enveloppe humaine.

- Mais vous n'avez jamais envie... entre deux pleines lunes ?

- Nous ne nous transformons pas qu'à la pleine lune, tu sais...

- Oui mais, quand même !

L'homme était étonné, car même si les loups se transformaient quatre fois par mois, cela voulait dire que cet acte était machinal, presque obligatoire et pour lui, qui aimait les femmes, c'était tout simplement impossible.

- Tu veux dire que tu n'as jamais eu envie entre deux... phases de la lune ?

- Je n'ai jamais eu envie, tout court ! Ce n'est pas une partie de plaisir de se reproduire ! En tous cas pour les femelles ! Toi, tu es un mâle, c'est pour cela que tu aimes ça !

- Mais les femmes aussi aiment faire l'amour ! Certaines font même l'amour entre-elles ! Tu pourras demander à Angeni, elle fait partie de ces femmes !

- Je ne comprends pas... Deux femelles ne peuvent pas se reproduire... Avant la période de reproduction, le seul intérêt du coït est de s'entraîner !

Nathanaël lâcha la poignée de la porte et se retourna vers la jeune louve, sidéré. Ainsi, pour cette espèce, l'accouplement n'était qu'un moyen de reproduction et, en particulier pour les femelles, aucunement un plaisir. Il ne pouvait croire que les louves n'avaient pas de point G ou de zones érogènes, ce n'était pas possible. Il passa sa main gauche sur la joue de Kéra, l'attirant de son bras droit vers lui, avant de lui murmurer :

- Laisse-toi faire, laisse-moi te montrer...

La jeune louve eut un léger mouvement de recul, hésitant sur ce qu'elle devait, ou non, faire, et laisser faire à l'homme. D'expérience, elle savait que les coïts n'étaient pas un moment de plaisir, et elle craignait de mêler ses bactéries buccales à celles de l'humain. Mais, paradoxalement, la situation l'intriguait et elle ressentait en elle un sentiment curieux, une sorte d'excitation proche de celle qu'elle ressentait quand elle partait en chasse. Elle laissa donc Nathanaël prendre son menton en coupe dans les paumes de ses mains et les lèvres de l'homme se rapprocher des siennes, pour finalement les rencontrer, s'apposant sur elles, tel un sceau.

Excité par la situation, le capitaine Svensson caressa la joue de la jeune louve de sa paume et se fraya un chemin entre ses lèvres pour y glisser sa langue. Devant la fougue soudaine de Kéra, il poussa un léger grognement, et passa ses bras dans ce petit dos, l'enlaçant fortement contre lui, lorsque la porte s'ouvrit à côté d'eux.

Dans l'Ombre de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant