Chapitre XIV : Discussions / Partie 2

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Tandis que la lycanthrope dormait sur une oreille, Nathanaël s'était réveillé, inquiet, et observait sa respiration. Il ne comprenait pas pourquoi l'animal n'avait pas profité de sa vue dans le noir et du fait qu'Angeni et lui s'étaient endormis pour les tuer. Certes, elle n'avait plus son poignard, mais ses crocs disproportionnés pouvaient être très dangereux. Quel était donc l'intérêt pour elle de les maintenir en vie, alors qu'elle n'aurait pas eu besoin de se rationner s'ils étaient morts ?

Tandis qu'il se retournait, il entendit la jeune louve se lever et avancer vers lui. Ne voulant pas risquer inutilement sa vie, il continua à respirer normalement, feignant de dormir. Quand elle fut près de lui, et qu'il put sentir son haleine étrangement mentholée, il eut l'impression qu'il allait craquer. Une main l'effleura doucement, et il se retint de sursauter. Pourtant, il fut surpris par la douceur de cette peau qui le touchait, sans violence, sans appréhension. Comme si la lycanthrope souhaitait savoir si les Hommes étaient aussi durs physiquement que psychologiquement. Un instant, le capitaine Svensson oublia que celle qui le touchait n'était pas de son espèce, mais un animal qu'il traquait et détestait en règle générale. Son haleine mentholée, son odeur légèrement boisée, sa peau douce, tout commençait à l'attirer chez celle qu'il prenait temporairement comme une humaine. Il aurait eu envie de la prendre dans ses bras, de l'attirer à lui et de l'embrasser à pleine bouche, tout en caressant ce corps envoutant.

- Pourquoi m'as-tu sauvée, il y a dix ans ?

La question posée par la lycanthrope paralysa l'homme.

- Tu savais que je ne dormais pas ?

- Bien sûr. Quand les humains ou les loups dorment, la respiration est différente, les paupières ne bougent pas de la même façon, leur rythme cardiaque est plus lent.

- Pourquoi ne m'as-tu pas tué ?

- Tu m'as sauvée il y a dix ans. Pour les loups, l'honneur est très important. Tu m'as sauvée, je te sauve, nous sommes quittes. Pourquoi m'as-tu sauvée ?

- Tu m'as rappelé quelqu'un... quelqu'un que j'ai perdu...

Alors que Kéra se relevait, Nathanaël saisit son bras. La louve le détailla de son regard perçant, prête à lui arracher la gorge au moindre mouvement suspect, mais rien ne se passa. La main de l'humain serra beaucoup moins son avant-bras, plus pour la retenir que pour la contraindre à rester avec lui.

- Vu que nous allons devoir rester quelques temps ensemble et nous supporter, quel est ton nom, loup-garou ?

- Kéra. Et je suis une louve.



De l'autre côté de la pièce, les chuchotements avaient réveillé Angeni. Elle s'était redressée silencieusement et tentait d'écouter les bruits qui semblaient parvenir du canapé de Nathanaël. Elle craignait que les deux ennemis ne s'entre-tuent mais fut rassurer d'entendre qu'aucun son de lutte ou de cris ne venait jusqu'à ses oreilles. Intriguée, elle se leva et commença à avancer à tâtons dans la direction de la lampe, à quelques mètres de son canapé, qu'elle alluma. La vue de la lycanthrope au-dessus du capitaine Svensson la figea sur place, craignant qu'elle ne tente de le tuer.

- Qu'est-ce que tu fais ?, cria-t-elle au loup-garou.

- Je voulais voir de plus près celui qui m'avait sauvée, répondit calmement Kéra.

- Tu l'as tué ?, hurla la jeune femme, en se précipitant vers le canapé.

- Je suis vivant, Angeni. Et je vais bien.

La réponse de son supérieur surprit le lieutenant West, qui s'arrêta à quelques mètres du sofa, dévisageant l'homme, qui s'était redressé.

- Comment ça, celui qui t'a sauvée ?

- Je crois qu'il est temps pour moi de t'avouer quelque chose, Angeni. Si les conditions de sécurité du laboratoire sont drastiques, c'est à cause de moi... Tu as entendu le bruit de couloir selon lequel, il y a dix ans, quelqu'un avait sauvé un lycanthrope ? Cette personne, c'était moi, et la lycanthrope, c'était elle.

Angeni s'assit à terre, stupéfaite de cette révélation. Elle avait toujours vu le capitaine Svensson comme une personne détestable et raciste contre les lycanthropes mais, elle s'apercevait qu'il avait eu un passé compliqué avec eux.

- Maintenant, ça suffit, je veux tout savoir, Nathanaël. Et vous avez tous les deux intérêt à tout m'expliquer...

Dans l'Ombre de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant