Chapitre V : Découverte / Partie 4

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Lorsqu'elle se réveilla, en fin d'après-midi, Kéra était fatiguée de ce sommeil agité qui ne l'avait pas aidé à se reposer. Elle se tourna doucement vers Lorou, qui dormait, et soupira de soulagement. Elle était heureuse de constater qu'il était resté dans les bras de Morphée, et que, si elle avait encore parlé dans son sommeil, il n'avait pas pu l'entendre.

Elle se leva et se dirigea vers la porte grinçante de la chambre, mettant au passage ses lunettes de soleil. Elle avait constaté la présence d'une station de rechargement des véhicules non loin et, donc, de nourriture. Elle sortit et se promena donc dans les rayons, sous le regard lourd du vendeur, à qui ses formes semblaient plaire. Elle attrapa une boite de conserve de bœuf, quelques chips et de la boisson, et paya à la caisse avec l'argent que leur avait donné le Shéker. Maro et lui possédaient un petit empire immobilier, sous des noms de société écran, qui permettaient à la meute de pouvoir payer l'électricité du centre, ainsi que de celle de leurs véhicules et quelques courses lorsque les tueurs étaient de sortie. Cette technique avait été mise au point par le Shéker lui-même et généralisée aux sept meutes du monde entier dans la plus grande discrétion. En plus de l'aspect nourricier, cette tactique était très intéressante pour les chefs. Ainsi, tous les loups étaient redevables aux différents Phaïrs et, donc, au Shéker lui-même, ce qui évitait bien des contestations. Concernant la nourriture des loups, elle était achetée ou cultivée à l'aide des revenus qu'offraient la fabrication et la vente de vêtements de luxe. Une nouvelle fois, la jeune louve soupira en pensant à toutes ces techniques mises en place par le vieux loup pour s'assurer de la fidélité des meutes à sa cause et à sa personne. Force était de constater que, s'il n'avait jamais été le plus puissant, son intelligence et son machiavélisme, eux, étaient presque inégalables.

En rentrant, elle constata que Lorou était déjà douché et, apparemment, de très mauvaise humeur.

- Où étais-tu ?

- Tu n'es pas mon père ! Mais si tu veux tout savoir, j'ai fait quelques courses ! Tu n'as qu'à faire à manger pendant que je me lave, cela t'occupera !

Elle n'attendit pas la réponse du jeune loup, qui la regardait, hébété, et se dirigea vers la salle de bain. Après avoir ôté ses vêtements encore humides de transpiration, elle prit plaisir à faire couler l'eau chaude sur son corps, et à se savonner, se délectant de cette crasse qui s'enlevait tranquillement d'elle. Une fois propre, elle mit une serviette autour d'elle pour entrer à nouveau dans la chambre s'habiller. Elle ne prit pas attention au regard assassin que lui jeta Lorou, toujours agacé de devoir faire à manger, et enfila des vêtements pratiques ; un pantalon sur lequel elle accrocha son poignard, un débardeur noir, et un bandana qui lui maintenait ses courts cheveux en place.

Une fois qu'elle fut assise à table, ils commencèrent à manger silencieusement, chacun réfléchissant à la nuit qu'ils allaient passer. Comme à chaque fois qu'elle exerçait son métier, Kéra n'aimait pas perdre de temps et d'énergie en conversation inutile. Elle n'aimait pas être accompagnée dans ses missions, et cela faisait plusieurs années que ça ne lui était pas arrivé. Elle préférait être seule plutôt que d'avoir une deuxième personne à se soucier. D'expérience, elle savait que le travail des tueurs n'était pas toujours de tout repos et que, si certains humains étaient trop choqués pour se défendre, d'autres, au contraire, bataillaient jusqu'au dernier moment pour leur vie. Et quelque chose lui disait que, même si la majorité des soldats du projet Moly ne serait plus là, il en resterait probablement quelques-uns, dans le but d'empêcher les loups d'entrer. Elle rageait intérieurement contre le Shéker, qui lui avait imposé son fils, un scientifique, et qu'elle aurait dans les pattes sans qu'il ne soit entrainé plus que ça à se défendre.

Le repas fini, Lorou prit les couverts et les lava, avant de les ranger dans son sac. Après une inspection rapide de la chambre, pour s'assurer qu'ils n'avaient rien oublié, il fit un signe de tête à la jeune louve pour lui signifier qu'il était temps de partir et rendit les clefs au concierge du motel. Lorsqu'il pénétra dans la voiture, Kéra avait déjà pris la place du passager et posé ses pieds sur le tableau de bord, au grand dam du jeune loup, qui détestait ce genre de comportement. Et, à voir le sourire ravi de sa promise, il savait qu'elle le faisait exprès. 

Dans l'Ombre de la LuneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant