Chapitre 27

272 25 1
                                    

🔆

J'aurais aimé pouvoir monter sur le toit, mais en l'état actuel, je n'en avais pas la capacité. Encore sonnée de ma rencontre avec le pied de la table et le poing de Livaï, c'était impossible. Alors je me suis assise sur les marches devant l'entrée. Ma plaie à l'arcade saignait encore au moment où je suis sortie, mais ça m'importait peu. Je me suis laissée aller dans mes pensées, me souvenant de l'année que j'avais vécue avec Pierre et sa famille, et de la façon dont j'avais été confrontée à la dure réalité des choses.

J'en avais tiré une leçon : personne ne respecte jamais ses promesses. C'est bien beau sur le moment de promettre un futur idéal à quelqu'un, mais le réaliser, c'est une autre chose. Je m'étais éloignée de cette conviction. Et Livaï s'est occupé de me le rappeler. Au fond, ce ne doit pas être une si mauvaise chose. La promesse qu'il n'a pas tenue était bien moins importante que celle que m'avait faite Pierre, mais perdre l'espoir qu'il tienne parole reste douloureux.

« Les choses ne changeront jamais Ellie, tu es destinée à vivre la même chose, encore et encore, jusqu'à la fin de ta vie. » C'est ce qu'il m'a indirectement dit en levant la main sur moi, contrairement à ce qu'il m'avait promis il y a quelques semaines.

Je ne demande pas la Lune, jusqu'on me laisse vivre normalement. C'est un bien grand mot, "normalement", quand on vie au bataillon. Mais je pensais au moins pouvoir entrer dans une certaine normalité, une certaine case, simplement le temps des deux mois que je me suis donnée.

Pierre m'a laissée croire pendant longtemps que ma vie pouvait basculer à tout instant, pour ne plus jamais ressembler à celle que je vivais encore à l'époque. Et Livaï lui, m'a fait croire que m'a vie avait basculé, et ne ressemblerait plus jamais à celle que je vivais avant de le rencontrer. Je lui ai dit qu'il était comme eux, mais en réalité, il est comme lui. Ce sont presque les mêmes, à quelques exceptions près. Pierre aussi n'avait jamais cru que j'ai pu tuer ma famille. Je me souviens encore de toutes ces heures qu'il passait avec moi à éplucher toutes les possibilités de ce qu'il aurait vraiment pu se passer. Mais il n'est jamais parvenu à me mettre le doute. Mes souvenirs étaient bien trop imposants pour qu'il parviennent à les démentir sans preuve solide. Rien que sur ça, ils se ressemblent. Livaï essaie régulièrement de remettre en doute ce dont je suis certaine.

Quand je repense à cette année que j'ai vécu aux côtés de la famille Evans, je m'aperçois que j'avais probablement été heureuse ce court laps de temps. Je me souviens d'une Ellie à qui il arrivait de rire. D'une Ellie qui souriait en arrivant chez eux. Je me souviens de toutes ces heures passées à jouer avec Thomas dans le jardin, à le pousser sur la balançoire, à le chercher quand on jouait à cache-cache, ou bien à faire exprès de ne pas courir assez vite pour le rattraper quand on jouait à chat. Il m'avait dit un jour qu'il m'aimait comme sa grande sœur, et aujourd'hui, je regrette de ne pas avoir su quoi lui répondre sur le moment. J'aurais dû lui dire que je l'aimais tout autant. Il était un véritable petit ange. Mais je ne pouvais que le regarder se dégrader avec le temps. Il est parti si brutalement que je pense que sa mort m'a atteinte au moins autant que celle de ma famille.

Je me souviens aussi de la première cuite que je me suis prise avec Pierre. On avait piqué une bouteille d'alcool fort à ses parents. On le diluait dans du jus d'orange. On avait tellement ri ce soir-là. Dans le jardin, à regarder les étoiles qui nous paraissaient bouger sous l'effet de l'alcool. Mais le lendemain, j'avais si mal à la tête que je m'étais demandée si je serais même capable de rentrer au foyer. On a reproduit ces soirées en douce, sans que ses parents ne remarquent jamais les bouteilles d'alcool qui disparaissaient mystérieusement. Je me souviens encore de cet anniversaire que j'avais fêté à leur côté. Par dépit, n'ayant plus aucune idée de la date exacte de ma naissance, on me donnait un an de plus à chaque premier janvier au foyer. Quand Pierre m'avait demandée quand était mon anniversaire, il avait été surpris que je n'en ai aucune idée. Alors il en avait déterminé une date.

27 et une émotions (Livai/Levi x OC)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant