27 et une émotions (Livai/Levi x OC)

Chapitre 77

🌑💜

En dernières vérifications, je jette un coup d'œil à la recharge de mes deux automatiques. Je revérifie aussi l'embranchement de mes bombonnes de gaz, et l'enclenchement de la gâchette. Puis je reste assise, attendant le moment où on me dira qu'il faut y aller. Ça fait une éternité que je n'avais pas enfilé l'équipement tridimensionnel. Je me souviens encore de la première fois, et de l'échec que ça avait été. Ça commence à sacrément remonter. C'est vraiment une époque lointaine tout ça. Des choses, il s'en est passé des tonnes depuis. Je suis loin d'être la même. On peut même dire que je suis loin devant celle que j'étais à l'époque. Ou peut-être pas. Je ne suis plus comme avant, mais les choses n'ont pas vraiment changé depuis ce jour-là. Je suis encore enfermée dans ce cercle vicieux infernal. Tout se répète encore, inlassablement.

L'angoisse s'empare de moi à mesure que j'ignore l'agitation qui règne partout dans le hangar, de ceux ayant un problème avec un équipement, ceux s'encourageant de cris de guerre bestiaux, ceux qui comme moi, se mettent à l'écart pour tenter de revenir au calme sans y parvenir, jusqu'à trembler nerveusement, claquer le talon de leur chaussure sur le sol, frotter leurs mains moites contre leurs vêtements, pour faire parvenir jusqu'à mes oreilles ces horribles bruits répétitifs qui perturbent la sérénité que je recherche.

Dans ma tête, une seule question se répète en boucle : qu'allons-nous faire ce soir ? Hange et Armin sont déjà partis. Il ne reste plus grand monde. Je ne reste même pas avec mon escouade. Je ne sais pas où ils sont. Je les ai vus il y a dix minutes, et depuis, je n'ai pas cherché à les encourager. De toute façon, ils sont jeunes, ils n'ont pas besoin de moi pour s'impatienter du massacre à venir. Je ne comprends pas vraiment comment ils peuvent se réjouir à l'avance de ce qui nous attend. Je me demande même s'ils ont conscience de ce que nous nous apprêtons à faire. Je me demande combien parmi eux idolâtrent la décision d'Eren. Moi, je lui en veux de nous avoir mis au pied du mur comme ça.

Je cherche, encore et encore, une raison pour laquelle nous pourrions partir, et l'abandonner là à son sort. Mais je sais que si nous rentrons, ce sera la fin de Paradis, et de notre existence à tous, alors je comprends qu'il n'y a pas d'autres solutions. J'en épargnerai. Tous ces enfants, toutes ces femmes, et ces hommes qui n'ont jamais rien demandé, je ne pointerai même pas mon arme en leur direction. S'il le faut, je les guiderai jusqu'à qu'ils se trouvent en sécurité. Parce que je suis convaincue au fond que ces gens, malgré toute la haine qu'ils éprouvent à notre égard, ne méritent pas de mourir d'une balle tirée de nos armes.

- On va y aller, où est ton équipe ?

Je me relève, et ne réponds rien à Livaï pour chercher silencieusement les membres de mon escouade parmi tout le monde attroupé dans ce hangar que nous avons élu comme repère pour nous équiper avant de foncer dans le camp de Révélio, et tirer sur tout ce qui bouge.

- Juste ici, où sont les balises ?

- Je crois que Liam s'est occupé de les prendre, me répond-il.

Je hoche la tête, et me mets en marche vers mes soldats qui discutent comme si de rien n'était, comme si nous ne nous apprêtions à ne rien commettre. Ce que nous faisons aujourd'hui, est probablement une grave erreur que nous regretterons tôt ou tard. J'en suis certaine. J'avais plaidé en la faveur d'Eren à la réception des lettres, mais en fin de compte, Jean avait probablement raison. Nous n'aurions pas dû le laisser nous manipuler. Un jour ou l'autre, nous paierons pour ce que nous nous préparons à faire.

- Eline, attend.

Je m'arrête, et me tourne vers Livaï qui m'a interpellée avant que je n'ai fait dix pas pour rejoindre les autres. L'air grave, il m'observe un instant sans rien dire. Puis il s'approche de moi, jusqu'à se trouver juste en face. Je ne dis rien. J'attends qu'il me parle, qu'il me dise pourquoi je dois attendre, et qu'il m'explique pourquoi il me regarde de cette façon, sans lueur dans les yeux, sans expression, avec une once d'angoisse que je discerne dans son regard.