Chapitre 10 (2/4)

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Elle portait un pantalon blanc et moulant qui se fondait dans la neige derrière elle, et une veste à l'aspect duveteux, d'un rouge sang. Un objet rectangulaire déformait l'une de ses poches, et je découvris ce que cela pouvait bien être lorsqu'elle le sortit.

Retirant patiemment un emballage en plastique qu'elle fourra dans la poche arrière de son pantalon, elle s'empara d'une clope qu'elle posa entre ses lèvres. Elle rangea le paquet bordeaux sans l'allumer. Elle s'accroupit un peu plus haut que moi sur le toit, de manière à toujours avoir un visuel des tables en contrebas. Je ne voyais que son profil. Je louchai sur ses bottes à talons d'un œil intrigué.

— J'avais un rendez-vous normalement ce soir, se justifia-t-elle d'une voix rauque de fumeuse.

— Avec qui ? demandai-je sans trop savoir pourquoi.

Elle ne me répondit pas immédiatement, sortant avec calme un briquet argenté de l'intérieur de sa veste. Elle ouvrit le couvercle et une flamme en jaillit, ondulant avec le vent. Plaçant une main autour de la flamme pour embraser le bout de sa cigarette, une lueur orangée égaya son visage et je tiquais devant les fossettes de ses joues. Elles étaient créées par des piercings sombres, qui reflétèrent la lumière avant de brusquement disparaitre quand elle referma le briquet d'un coup de poignet.

— Jarrod.

— L'autre Gamma ?

— Mh, fit-elle en suivant des yeux un groupe de louveteaux turbulents. Il est séduisant.

— Je ne l'ai pas encore rencontré.

Elle tira une taffe avant de dire :

— Il conduit le van qui descend en ville.

L'image du vieillard me donnant mes bagages s'imposa à mon esprit. Il m'avait avertit que je ne trouverai pas Twilight à la bibliothèque. J'avais beaucoup de mal à imaginer cette jeune femme avec un tel énergumène.

— Le vieux ? m'étonnai-je, me rendant compte – trop tard – que je venais d'insulter un membre de sa meute sous son nez.

Je la vis froncer les sourcils et se tourner avec lenteur dans ma direction. Le nuage de fumée qui l'entourait lui donnait un air machiavélique.

— Hein ?

Le silence qui s'ensuivit me fit transpirer. Puis la lumière se fit dans son esprit, et un coin de sa lèvre frémit. Cela pouvait presque passer pour un sourire.

— Mais non, ça c'est Hub. (Elle secoua la tête en retournant à la surveillance des alentours.) T'es con. Jarrod est sexy. Pas décrépi.

Je suivis des yeux un bout de cendre tomber dans la neige.

— Je suis Dalaena, me présentai-je.

— Joyce.

Contrairement à son prénom, l'attitude de Joyce était impénétrable, presque détachée. Je reconnu le sérieux draconien d'une exigence rigoureuse.

— Ta sœur n'est pas là ? m'enquis-je.

Un mouvement de tête sec sur sa droite me répondit. Elle ne quittait pas des yeux sa meute.

— Si. Par là-bas.

Du regard, je l'observai. Enfin, je compris d'où provenait l'odeur chimique qui se dégageait d'elle, dissimulée par celle du tabac mais néanmoins présente, juste sous-jacente.

Ses cheveux étaient recouverts par une coloration brune. Comme sa jumelle, ils devaient probablement être roux juste en dessous. D'ordinaire, les loups ne se risquaient pas à utiliser de tels produits. L'odeur était infecte et collait à la peau, même après une dizaine de lavages. Mon odorat n'avait pas supporté la teinture blonde que Mæve m'avait poussée à réaliser, des années auparavant. Je n'avais jamais retenté l'expérience depuis, et cette odeur infecte me confirma dans mon idée.

Sortir les griffes T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant