Chapitre 51

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- Bon sang ! Mais quand cette forêt va-t-elle se terminer ? s'énerva Dann en décrochant encore une fois les ronces qui s'accrochaient à ses vêtements sans plus vouloir le relâcher.

Je levais les yeux au ciel sans prendre la peine de lui répondre. Nous étions tous excédés et moi c'était cette faim dévorante qui me rendait folle et pas des végétaux à l'air rebelle. Derrière moi, j'entendis Madeline demander à Brian de la lâcher et la fillette se mit soudainement à courir. Interloquée, je la suivis quand nous émergeâmes au sommet d'une colline dénudée de tout arbre et surplombant un village. Il faisait jour et il était impossible, de là où je me trouvais, de voir si ces habitations abritaient des gens. Les garçons arrivèrent sur nos talons et j'entendis Dann s'exclamer de joie dans mon dos.

- Nous longions ce pré depuis un bon moment déjà mais je n'en étais pas sûre, avança la fillette en sautillant de joie à pieds joints.

Je la pris dans mes bras et déposai un baiser sur sa joue rosie par le froid mordant de cette après-midi. Lorsque je relevais les yeux, je vis que Brian fixait l'étendue herbeuse à l'affut d'un danger, ne pouvant se soumettre à croire que nous avions réussi.

- On y va ? demanda Madeline.

Sans attendre notre réponse, elle fit quelques pas en avant et s'écroula soudain face contre terre, de tout son long, sous le coup d'une balle tirée de nulle part. Je vis du sang fleurir sur son pull. J'hurlais son prénom et me jetais en avant mais une paire de bras puissants me retins et me tira en arrière. Je me débattis mais en vain. Brian me colla une gifle sur la joue et je cessais de crier, haletante pour planter mes yeux fous dans les siens.

- Tais-toi et par pitié reste-là !

Le grand ténébreux s'avança méfiant dans la pelouse et une pluie de balles vint marteler son corps. Il s'écroula à terre à côté de la fillette et le bruit meurtrier cessa. Je voulus hurler, désespérée quand mon ami se redressa en grimaçant. Il retourna le corps de Madeline sur le dos de sorte à voir son visage. Il posa son oreille sur la poitrine de ma petite protégée. Je voulus le rejoindre mais d'un regard il m'en empêcha et me fit comprendre qu'elle était toujours vivante. Dann posa une main sur mon épaule et me tendit son pistolet. Je le pris en tremblant et voulut lui échanger contre mon poignard mais il en sortit un de la poche de son pantalon. D'un accord tacite, nous nous avançâmes côte à côte et nous agenouillâmes à côté de nos compagnons de route blessés. La balle que Madeline avait reçue s'était logée dans son épaule et avait heurté son os, minimisant les dégâts, superflus, malgré tout le sang qui s'en échappait. Cependant, cette perte de sang, à laquelle on rajoutait la famine et la fatigue, risquaient d'avoir raison d'elle. Mes pensées étaient toutes embrouillées, j'étais incapable de réfléchir et mes mains tremblaient alors que je déchirais le bas de ma chemise pour faire un garrot à ma protégée. Je serais le nœud le plus fort que je le pus et le flot de sang se régula, plus faiblement. Je soupirais, soulagée, quand une voix froide et éraillée se fit soudain entendre dans mon dos.

- Qui êtes-vous et que voulez-vous ?

Aussitôt, les garçons se retournèrent d'un même mouvement et leurs mâchoires manquèrent de se déboiter tellement la surprise fut grande. A mon tour, je me retournais et pointais le canon de mon arme sur le front de notre assaillante mais mes mains se mirent à trembler et je fus incapable de tirer tellement l'adolescente était sublime.

- Je peux vous retourner la question ? demandais-je suspicieuse.

Qu'est-ce qu'une fille de son gabarit faisait dehors, seule, dans ces bois où se cachait des zombies ? Elle ne me jeta qu'un regard dédaigneux et ne me répondis pas pour reposer ses yeux sur les deux garçons qui m'accompagnaient.

- Je... Nous sommes des rescapés et nous recherchons un endroit où nous pourrions être en sécurité, bégaya Dann.

Je le regardais furieuse de le voir en admiration devant cette étrangère alors qu'il prétendait m'aimer. Brian me lança un regard à la fois perdu et en même temps sûr de lui que je lui rendis.

L'apparition éclata de rire et se rapprocha dangereusement de Dann avec une étincelle dans le regard qu'il ne sembla pas détecter. Je m'apprêtais à me jeter en avant mais la fille s'arrêta à un mètre de lui pour étendre les bras en lui désignant le village en contrebas.

- Alors bienvenue à Stolink, c'est de là que je viens et vous y serez à l'abri !

C'était tout ? Elle ne posait aucune question sur le fait que Brian était toujours en vie malgré la pluie de balles qui s'était abattue sur lui ? Madeline gémit soudain et le grand brun s'empressa de la reprendre délicatement dans ses bras.

- Possédez-vous une infirmerie dans votre village ? demanda-t-il à brûle-point.

La jolie fille aux cheveux couleur de feu lui répondit par l'affirmative et tous se mirent à la suivre. Tous sauf moi.

Brian s'arrêta et attendit que je le rejoigne pour me dire d'une voix sourde :

- Je sais que cette fille ne t'inspire pas confiance, à moi non plus mais pour l'instant, c'est notre seule chance de sauver Madeline.

Je jetais un regard à la fillette que les couleurs désertaient à vue d'œil et courrais pour rattraper le groupe qui nous précédait. Parfois, il s'avère que l'on n'a pas le choix...


L'armée du zénithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant