Chapitre 69

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Je me demandais s'il était possible qu'un être humain ne possède pas de cœur et soit capable de faire du mal aux autres comme je le faisais. J'étais encore dans la ruelle alors que le soleil pointait son nez. Assise le long d'un mur, je ne me préoccupais pas de faire du bruit et ne m'embarrassais pas à me camoufler. J'espérais qu'un zombie passe par ici pour que je puisse passer mes nerfs sur lui mais bien entendu, ils préfèrent la surprise et ne se manifestèrent pas. J'étais d'ailleurs étonnée de n'en avoir croisé aucun dans la ville, mise à part l'ours mutant, comme si quelque chose les retenait à l'écart. Vaincue, je me relevais et me concentrais sur le bruit de mes pas sur le pavé. Je ne m'imaginais même pas la mine que je devais avoir à cet instant. Dépitée, je franchis le seuil du bâtiment et gravis les escaliers jusqu'au premier étage. Les autres étaient assis dans le couloir et se partageaient des boîtes de conserves. Thois me proposa de partager sa portion mais je refusais, trop abattue pour avaler quoi que ce soit. Il me suivit jusque dans ma chambre et me demanda si je voulais prendre une douche dans sa salle de bain pour chasser toutes mes peines de mon esprit. J'acceptais, pensant qu'une bonne douche ne me ferait pas de mal. Je le suivis et lui demandais de rester dans le couloir pendant que je faisais ma toilette. Il fit une grimace, déçu mais rebroussa chemin et reprit sa place sur le sol. Avant de fermer la porte de son appartement, je scrutais les visages et ne trouvais pas Brian. Je remarquais le sourire que Dann m'offrait et le lui rendis avant de me dissimuler à sa vue.

Avec nostalgie, je me débarrassais de ma combinaison et m'introduisis dans la douche. La sensation de l'eau froide sur ma peau nue me procura le plus grand bien cette fois. Ne voulant pas profiter de la générosité de Thois, je coupais l'arrivée d'eau et essorais mes cheveux avant de me glisser en-dehors de la cabine. Une fois essuyée, je revêtis mes vêtements et sortis de la chambre du garçon. Tous les hommes avaient rejoins leur chambre et il ne restait plus que Thois, assit le long du mur, attendant que je daigne lui ouvrir la porte de sa propre chambre.

- J'ai été si longue ? demandais-je surprise.

- Non, pas tant que ça mais ils étaient exténués. Les travaux à l'étage ont avancé en une nuit, c'est incroyable.

Je souris de cette bonne nouvelle avant de m'éclipser et de rejoindre ma chambre. Lorsque je découvris que la porte de cette dernière avait été réparée et que la pièce avait été nettoyée, la surprise fut-elle que je dû passer mes doigts le long des meubles pour me rendre parfaitement compte que tout était décrassé. Après mon entrée, la porte se referma et une paire de bras s'enroula autour de mon ventre avec délicatesse.

- Nous sommes tranquilles maintenant, coupés du monde par cette porte qui, à présent, fonctionne à merveille et possède un verrou ! me chuchota Dann à l'oreille.

Le sentir collé à moi provoqua un frisson imperceptible dans tout mon corps. Dann, voyant que je ne le repoussais pas, me prit dans ses bras et me porta jusqu'au lit qu'il avait bordé de draps. Il me rejoignit sur le matelas aussitôt et colla ses lèvres aux miennes avec passion. Lorsque je sentis ses mains descendre sur mon corps, je tentais de me dégager mais je ne réussis qu'à le faire rire.

- Détends-toi Thelia, je ne vais pas te faire de mal, j'en serais incapable, me dit le garçon en plongeant son regard émeraude dans le mien.

Aussi terrifiée que rassurée, je le laissais continuer sur sa lancée, sans oser bouger ni répondre à ses caresses. Il soupira de contrariété et se décolla de moi pour se recoucher à mes côtés. L'oxygène n'atteignait plus mes poumons et je n'osais pas le regarder. Sa voix me parvint, étouffée.

- Que veux-tu à la fin Thelia ? Que dois-je faire ?

Je ne répondis pas et fixais le plafond. Dann s'assit dans le lit et me força à le regarder. Je ne sais pas exactement ce qu'il vit dans mes yeux mais en tout cas, cela ne lui plût pas et il se détourna en soupirant. J'entendis la porte claquer derrière lui et je ne tentai pas de le retenir. Comment aurais-je pu lui dire que j'avais peur de ses mains sur mon corps ? Comment lui expliquer que je l'aimais tout en me refusant de goûter au plaisir de notre amour en sachant que quelques pièces plus loin, j'avais brisé le cœur d'un autre garçon avec des propos malvenus ?

Incapable de trouver le sommeil, je me levais et soulevais les tentures qui me cachaient l'extérieur. Le soleil brillait de milles feux dehors et je dû plisser les yeux pour distinguer la rue en contrebas. J'aperçus une silhouette au milieu de la chaussée et cette dernière s'arrêta juste à la hauteur de ma fenêtre et leva les yeux vers cette dernière. Sa chevelure flamboyante m'éclaira tout de suite sur son identité et je reculais pour me camoufler parmi les ombres chaleureuses de ma chambre. C'était impossible que Xania ait pu m'apercevoir d'ici. Je me remémorais soudain sa réaction lorsque j'avais tenté d'apercevoir son poignet lors de mon arrivée au village et mon estomac se serra en se souvenant l'éclat carnassier de son regard. Qu'avait-elle de si important à cacher ? La sensation de mal être que j'avais ressentie à ses côtés me revint également en mémoire. Une chose était à présent sûre : c'était elle la créature que je devais anéantir. Prenant mon courage à deux mains, je saisis mon bâton et m'apprêtais à descendre quand je fus stoppée net dans mon élan par une pensée des plus troublantes. Et si c'était un piège ? Je revins sur mes pas et soulevais à nouveau mes rideaux, comme je venais de le faire quelques secondes auparavant. Cependant, la rue était paisible et pas un mouvement ne venait perturber sa quiétude. Résignée, je partis me recoucher, pensant sans doute qu'il s'agissait là d'un mirage dû à ma fatigue, en serrant le bâton contre ma poitrine comme un enfant tiendrait sa peluche. Le sommeil ne vint cependant pas me trouver et je passais la journée à me tourmenter, les nerfs à vif. Je n'avais plus eu aucune nouvelle de cette fille depuis que j'avais été recrutée par l'armée d'Héloïse et sa soudaine apparition me laissait penser que la bataille était proche.


L'armée du zénithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant