Alerté par son silence, je redresse la tête. Il s'est levé, me dominant de toute sa stature, mais n'a jamais eu l'air aussi vulnérable. Il semble même prêt à pleurer. Aussitôt j'ai le réflexe de poser ma main sur son visage, dans une caresse de réconfort. Ce qui est idiot. Depuis tout à l'heure, je n'aurai qu'à confirmer ses craintes et au moins je serais sûr qu'il me laisserait tranquille. Mais je n'y arrive pas. Mon Gold. Celui que j'ai toujours attendu d'avoir, alors que je ne savais même pas qu'il pouvait exister sur cette planète.
— C'est moi," dit-il d'une voix rauque, "qui ait l'impression d'être un arnaqueur. J'étais tellement heureux de t'avoir toi... A l'académie, j'ai... j'étais en guerre contre plusieurs personnes, et j'étais sûr que l'un d'entre eux serait Silver quand je serais Gold, et ça me mettait en rage, l'idée qu'on allait gâcher tant de temps et d'énergie à se tirer dans les pattes... Alors que toi... Tu étais si classe, si mature, tellement au-dessus de tous les autres... Je ne pouvais pas être ton rival. J'étais seulement ton admirateur... J'étais tellement heureux à chaque fois que tu faisais attention à moi... Que tu m'appelais Gold au lieu de 44 ou le nouveau... J'ai travaillé dur pour que tu reconnaisses ma valeur. Je voulais te faire oublier ce foutu 43, faire comme s'il n'avait jamais existé, comme s'il n'y avait jamais eu que moi...
Et ça me fait sourire. Je suis aussi égoïste et orgueilleux que lui : je n'accepte qu'il soit égoïste et orgueilleux que si c'est à mon propos.
Je le pousse légèrement pour qu'il se rassoit - j'en ai marre de me dévisser le cou pour le regarder - et je commence à lui caresser la tête gentiment, tout en lui expliquant :
— Tu n'es pas en concurrence avec 43, je t'assure. Tu l'as battu depuis une éternité. Au contraire, c'est quand tu te comportes comme lui que tu m'énerves.
— Je t'énerve ? J'ai toujours l'impression que tu n'en as rien à foutre. A part l'autre fois.
Je soupire et m'assois à coté de lui, perché sur l'accoudoir du fauteuil, histoire d'être à peu près à sa hauteur. J'avoue :
— Ça, c'est le résultat de quatre ans de dur travail à tenter d'avoir l'air indifférent, pendant que Gold 43 faisait tout pour me faire sortir de mes gonds. Plus j'arrivais à garder ma poker face, plus ça le rendait dingue. Et j'ai toujours... ma foi, j'imagine que d'avoir dû rester aussi longtemps en symbiose forcée avec ce salopard m'a marqué, parce qu'aujourd'hui encore j'ai des réflexes de protection. J'ai toujours l'impression qu'il me guette pour se moquer de moi à la moindre faiblesse. Alors je tente d'être parfait. Et quand je n'y arrive pas, je me contiens et je rage tout seul dans ma chambre, comme avant. Je suis très, très loin d'être aussi classe et mature que tu as pu le croire. Parce que même si c'est 43 qui m'a traumatisé, je suis fou de rage aussi quand c'est toi qui prend le dessus sur moi. Je ne peux tout simplement pas le supporter. Tu comprends ?
— Mais... Quand est-ce que j'ai pris le dessus sur toi ?
Comme si il ne le savait pas... J'attaque la liste, et la colère remonte au fur et à mesure que j'énumère :
— Tu es passé devant moi sur le dernier kaiju, tu m'as aidé à m'en sortir, et tu as attendu que j'admettes que tu me dépassais pour m'embrasser, alors que...
— Attends, attends, attends. Tu m'en veux pour ça ? Je veux dire, si je te fais une déclaration à un moment où je viens de me ridiculiser, tu accepterais plus facilement ?
— Nettement plus, oui. Bien sûr, si tu me fais une déclaration alors que je viens de réussir un beau coup, c'est encore mieux.
— D'accord, alors, je retente !
VOUS LISEZ
L'éternelle bataille
Science FictionRobots géants contre monstres géants, c'est le combat perpétuel qui mobilise les foules et toutes les ressources de ce monde. L'UFIT (les gentils) se bat contre le Soleil Noir (les méchants), c'est pour ça qu'ils peuvent demander tous les efforts et...