L'éternelle bataille

Gold 8 : cris

Je suis de retour dans ma chambre, il est cinq heures du matin, le réveil va sonner dans une demi-heure et il faut que je me calme avant de revenir à ma vie normale.

Je sais que je n'y arriverai pas quand j'entends dans mon dos la voix que je redoutais le plus d'entendre :

« Alors, Gold, tu peux t'expliquer ?

Je me retourne. Évidemment, Silver est là. Oui, il a le code d'entrée de mes quartiers, mais est-ce une raison pour ne jamais frapper ?

Je marmonne :

— Qu'est-ce que tu veux que j'explique ? On n'en a pas fini avec ça ?

Il s'avance en me menaçant du regard. Ce que je devrais être capable d'ignorer. Je suis plus grand que lui, plus fort, et surtout je sais que j'ai raison. Je ne vais pas céder pour un regard noir.

Le savoir ne m'empêche pas d'être rapidement très nerveux. Silver est quand même assez flippant quand il s'y met, et j'ai déjà fait les frais de sa colère - la vraie, pas les petites disputes qu'on relance sans y penser quand on s'ennuie ou qu'on essaye tous les deux d'avoir le dernier mot.

Je suis littéralement dos au mur tandis que Silver plaque avec autorité ses bras de part et d'autre de mon torse, comme s'il voulait m'empêcher de fuir. Ce qui serait assez intéressant dans d'autres circonstances. Là, je me demande surtout pourquoi il se donne autant de mal pour asseoir son autorité. Quand est-ce que je l'ai remis en question ?

Il me demande :

— Pourquoi est-ce que tu m'as menti, Gold ?

— Je t'ai menti ?

— Tu nous as tous menti ! Mais eux, je m'en fous. Pourquoi est-ce que tu m'as menti à moi, Gold ? Depuis quand tu me caches des choses ?

— Je ne t'ai pas...

— Foutaises ! Tu as dis que tu étais d'accord avec nous ! Que tu allais nous aider ! Et là d'un coup, tu n'en a plus rien à foutre, Brass est un traitre qu'il ne faut surtout pas écouter, et on va les laisser faire du mal à Chrome ? Regarde-moi dans les yeux et dis-moi la vérité, Gold !

Il essaye d'avoir l'air sûr de lui et de son droit à m'interroger, mais je vois qu'il est surtout inquiet, et ça me touche. Évidemment qu'il s'inquiète. Et je ne sais pas comment lui répondre, comment lui dire que je ne lui fais pas confiance. Que je ne me fais pas confiance. Silver est très difficile à apprivoiser, et je sais que si je lui montre un seul instant que je ne suis pas à la hauteur, il me rejettera. Il ne doit surtout pas savoir que je doute de ses sentiments.

Alors je me drape dans ma dignité et je lance la dispute dans une direction plus sûre :

— Et toi, depuis quand tu te permet de me gifler et de me dire ce que je dois faire ? Je peux savoir ce qui t'a pris ?

— Ne détourne pas la conversation, on sait très bien tous les deux que tu étais en train de perdre le leadership, et que je t'ai rattrapé le coup, comme toujours. Si on veut savoir ce que Copper et Chrome mijotent ensuite, il faut qu'ils nous fassent confiance, et toi et Platty vous étiez en train de flipper comme des écolières. Alors que Chrome nous a sorti de sa manche une putain d'IA pirate !

— Tu es sûr que c'est une IA pirate ? Est-ce qu'au moins tu as pu voir ce que c'était ?

— C'est la seule explication possible, et Chrome sait très bien que ça ferait criser Platinum. Quel merdier...

Il m'a laissé et se met à faire les cents pas, comme toujours quand il est très nerveux. J'aimerai le prendre dans mes bras, l'envie de le toucher me brûle la peau, l'envie de le serrer si fort qu'on ferait parti l'un de l'autre pour toujours. Mais j'ai appris à garder mes distances quand il est dans cet état-là - j'ai vite fait de me prendre un truc sur à la gueule.