L'éternelle bataille

Copper 11 : retourner la situation

Me revoilà dans l'appartement de Chrome et Landon. Je réalise que je ne suis jamais allé chez eux normalement, pour une visite amicale. Ça fait des mois que rien de ce que je vis n'est normal, tout est chargé d'arrière-pensées et de secrets, de mensonges et de trahisons. Je n'en peux plus.

Landon me sert gentiment un thé sans doute hors de prix. Je ne peux pas le regarder dans les yeux.

Il m'a admit dans le saint des saints, le bureau-laboratoire-bazar informatique où il travaille avec Lilith. Il a fallut qu'il enlève son fauteuil habituel pour que nous puissions tenir à trois à l'aise. À quatre, en réalité, puisque Lilith est physiquement là. Si on considère la taille des ordinateurs qui lui permettent d'exister, elle tient même plus de place que les trois humains que nous sommes.

J'ai toujours dans la poche le logiciel espion qui devrait permettre à l'UFIT de contrecarrer Lilith. Il suffit d'attendre qu'elle ait fini de lire les informations du Platinum, ensuite j'accomplis cette mission, et Chayan sera à l'abri. Pour un temps. J'espère.

Mon autre option est de demander de l'aide à Kuro. C'est assez horrible de réaliser que ce criminel qui tente de refonder le Soleil Noir semble plus fiable que ma propre organisation. Au final, la seule chose qui m'empêche de le faire, c'est que Chayan serait bien capable de revenir de lui-même à l'UFIT, cet imbécile chevaleresque.

Timidement, je demande à mes hôtes :

« Alors... où vous en êtes ? Heu, je veux dire... globalement ?

Chrome n'est pas gêné par mon manque de précision, il sait où je veux en venir :

— Ça avance. Landon est en train de manœuvrer pour prendre à revers les Godwin. Kuro a prit énormément de risques, il est bien plus vulnérable qu'il le croit... De mon coté, je l'aide à mettre en place son réseau parallèle.

— Mais ce n'est pas... ce ne sont pas des gens qui vont attaquer des civils, n'est-ce pas ?

— Non. Je sais très bien qu'il compte avoir ça aussi sous la main, mais pour l'instant c'est le Soleil Noir traditionnel qui s'occupe des attaques déjà arrangées avec l'UFIT. De notre coté on reste centrés sur la recherche d'informations et les canaux de communication. L'UFIT verrouille tous les médias, si on veut les renverser, il faudra que le message passe vite et bien. C'est plus compliqué que je l'aurais cru, en réalité.

— Oui... avoir un réseau unique semblait logique quand on a étudié le système de la paix mondiale à l'Académie, mais dès qu'on se retrouve de l'autre coté de la barrière, on voit le problème...

Landon intervient gentiment :

— Contrôler les médias est la base pour une dictature solide. On ne vous l'a jamais appris en science politique ?

— On n'a jamais eu de cours de sciences politiques !

— Normal, j'imagine. Si je confiais des armes capables de mettre un pays à genoux à des pilotes, je m'arrangerais aussi pour qu'ils ne connaissent pas grand chose à la politique ou à l'histoire. Ah, et qu'ils soient le plus jeune possible aussi, évidemment.

Je regarde discrètement Chrome, me demandant s'il se sent aussi piteux que moi. Nous avons été sélectionnés par un système drastique et avons suivi des cours dans la meilleure école du monde, une formation d'élite... pour au final n'être que des marionnettes. Des jouets tués lorsqu'ils sont hors d'usage, ou même légèrement déréglés.

Le visage de Chrome est impénétrable. Comme toujours lorsqu'il considère que partager ses émotions n'apporterait rien à personne. Et c'est vrai, j'imagine. J'ai seulement très, très envie de partager les miennes.