Chapitre 8 : Coup Fatal

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*Ken*
Personne n'arrive à mettre leurs patins correctement. Mes amis s'esclaffent en voyant la difficulté ridicule de ces chaussures. Cata est déjà au milieu de la glace. Elle a l'air concentrée. Elle s'élance. Elle patine avec grâce. Elle contrôle chacun de ses mouvements. Elle prend, petit à petit, un peu plus vitesse.

-Elle est incroyable, dit Sacha.

Une pirouette. Deux pirouettes. J'ai l'impression qu'elle s'envole. Mon cœur s'écrase dans la poitrine, rassuré de la voir retomber sur la glace, parfaitement. Sa danse est mélodique. On dirait un ange qui essaye de s'envoler. Tout le monde a arrêté ce qu'il pouvait faire pour admirer Cata exerçant son œuvre. La fille timide rencontrée des semaines auparavant a laissé place à une femme sûre d'elle. La confiance qu'elle aborde en patinant, est magnifique.

-Alors ? se retourna-t-elle. Vous en pensez quoi ?

-Fallait nous prévenir, dit Doums.

-J'avoue, je ne sais même pas tenir sur cette merde, dit 2zer en rigolant.

Nous avons passé la soirée à patiner, du moins à essayer de ne pas s'éclater la gueule sur la glace. Cata rigole à chaque chute. Je ne suis pas à l'aise sur la glace, et je pense que ça se voit. Cata s'est donc approchée de moi.

-Je vais te guider, suis-moi.

Elle a pris mes mains dans les siennes.

-On est un peu trop loin du bord non ? dis-je, absolument pas rassuré.

-Regarde-moi dans les yeux, dit-elle d'une voix féline. Fais comme si on était que tous les deux.

J'arrive enfin à patiner sans que mes jambes partent à gauche et à droite. Cata pose mes mains sur ses hanches. Je suis proche d'elle. Trop proche. Je n'arrive pas à me tenir à distance d'elle, elle est comme un aimant.

-Je vais te lâcher, petit à petit, expliqua-t-elle, mais je ne serai jamais loin.

J'arrive à patiner sans l'aide de Cata, pensai-je.

-Regardez ! hurla Hugo. Le Fennec sait patiner.

-Quel homme, répondit Doums.

*Catalina*
Ken est sorti fumer une cigarette après son exploit. Quelques minutes plus tard, il rentre, de nouveau, le visage lourd. Il chuchote à l'oreille de Mo et s'enfonce dans l'obscurité de la nuit. Il est parti. Je m'approche donc de Sneaz.

-Il est parti où, Ken ?

-Camille l'a appelé, elle a besoin de lui, dit-il.

-C'est son ex ? demandai-je en connaissant déjà la réponse.

-Oui, ma petite espagnole.

Sneaz est en train de sourire. Il ignore les conséquences de sa phrase. Ken est parti voir son ex. Je me sens bête. Bête d'avoir pu penser que notre baiser voulait, peut-être, dire quelque chose. J'ai prétexté un message urgent de mon père pour partir. Je n'ai pas envie de gâcher la gaieté habituelle du groupe avec mes humeurs changeantes. Je suis arrivée rapidement à mon appartement.

-Catalina, te voilà enfin, dit une voix grave.

Mon père est chez moi. Super. Ironie du sort.

-Désolée, je suis restée travailler à la bibliothèque.

Menteuse, pensai-je.

-Nous devons parler. J'ai engagé un détective privé, en vue de ton comportement.

Il a fait quoi ?

-Pardon ? dis-je abasourdie.

-Je ne t'ai pas envoyé à Paris pour que tu te mettes à traîner avec de mauvaises personnes. As-tu quitté Alexandre à cause d'eux ? Une fois de plus, je suis extrêmement déçu de toi.

Mon visage se remplit, automatiquement, de larmes chaudes.

-Ta mère et moi avons toujours tout donné pour que tu sois heureuse. Pourquoi t'obstines-tu à nous décevoir ?

Il vient de broyer mon coeur dans ses mains.

-Vous avez oublié de me donner une chose primordiale, dis-je d'une voix froide.

-Qu'est-ce qu'on ne t'a pas donné ?

-De l'amour.

J'ai levé mon regard. Mon père eut l'air déstabilisé. Mes yeux bleus renferment toute ma peine, tous mes remords. J'ai l'impression d'avoir donné toutes mes années de vie à mes parents. Mes yeux renferment le demi siècle de servitude que je leur ai accordé.

-On grandit mal sans l'amour des parents. Tu n'as pas été là pour essuyer les larmes de mon premier amour. Tu n'as pas été présent quand j'ai obtenu mon diplôme, à la fin du lycée. Je suis venue au monde seule. Il y a un océan entre nous trois. Et vous ne m'avez jamais appris à nager.

Il est parti sans dire un mot. Me voilà seule, avec mes pensées. Mon téléphone a sonné. J'ai allumé l'écran pour voir l'origine du message.

« Ken:Je me suis remis avec Camille. »

Coup fatal, coup final. Ken vient de m'achever. J'ai envie de faire ma valise, m'engouffrer dans le premier avion et partir loin. Dans un élan de panique, j'ai envoyé un message à Sacha, la suppliant de venir chez moi. J'ai attendu quelques minutes avant qu'elle arrive.

-Qu'est ce qu'il se passe ? dit-elle, affolée.

-J'ai embrassé Ken. Je pensais qu'on avait quelque chose de spécial. Il vient de se remettre avec son ex.

Le visage de Sacha s'est décomposé, devant moi.

-Tu aurais dû m'en parler avant, répondit-elle, j'aurais pu te mettre en garde. Ken n'est pas un garçon simple, encore moins prêt à se lancer dans une relation.

Ses paroles ont brisé quelque chose en moi. Elle a confirmé mes doutes. Je me suis attachée à la mauvaise personne.

-J'ai envie de retrouver en Espagne.

-Ce n'est peut-être pas le bon moment pour prendre la fuite.

Elle n'a pas tort.

-Tu ne vas pas apprécier ce que je vais te dire, dit-elle. Tu ferais mieux de rester amis avec Ken.

Elle a raison, ce qui m'énerve.

-Réponds à son message, comme une amie.

J'ai pris mon téléphone, encore tremblante après la dispute avec mon père.

« Moi: Je suis extrêmement heureuse pour toi ! Je suis pressée de la rencontrer. »

Sacha m'a pris dans ses bras. Nous sommes restées comme ça longtemps, dans un silence complet. Il n'est pas gênant, au contraire, il est apaisant. Elle me caresse le dos, comme le faisait ma gouvernante. Sans rien se dire, on s'est comprise. Elle est là pour moi. Je suis là pour elle. L'idée d'affronter Ken est moins dure sachant que j'ai Sacha à mes côtés.

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Fin du huitième chapitre
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Plus que quelques jours avant la fin du confinement, j'espère que vous et vos proches vont bien ❤️

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