Chapitre 70 : La dette

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*Catalina, au même moment*
Je cours à en perdre haleine. Depuis le début de cette course infernale, j'ai trébuché trois fois. Je sens la personne derrière moi s'énerver et essayer de me rattraper. Dans les rues, les gens ne sont pas alertés et certains même trouvent ça amusant. Pourtant, la terreur se lit sur mon visage. Je suis en train d'accourir sur le pont de la Concorde. D'un seul coup, je glisse sur une plaque d'égout à moitié gelée à cause du froid automnale.

-T'as terminé de courir comme ça ? dit Thomas en essayant de reprendre son souffle. Regarde ! Paris est presque désert. Tu as bien choisi ton endroit.

Je le regarde. Il a l'air d'un fou. Son visage dégouline de sueur et ses cheveux, normalement bien coiffés, sont ébouriffés. Il tremble de colère.

-Tu as reçu mes lettres ? demanda-t-il.

-C'était toi ? Mais t'es complètement malade.

Il a levé la main et elle s'est écrasée sur ma joue.

-Tu as tué mon frère, Catalina. Tu as pris la seule personne qui comptait pour moi dans ce monde.

Est-ce que c'est possible d'être autant aveuglé par les liens familiaux ? Il a pris sa main dans sa tête et il s'est tapé la tempe droite.

-Tu me rends fou, cracha-t-il. Tout ce que tu touches finit par être détruit. Et toi ? Tu continues à vivre ta meilleure vie accompagnée de ton copain, de ton foutu livre et de ta famille parfaite.

-Thomas, calme-toi, s'il-te-plaît, tentai-je. On peut essayer de parler calmement.

-Je n'ai rien à te dire, hurla-t-il en me donnant un énorme coup de pied dans l'estomac.

Je vois des passants qui changent de trottoir. Ils ne viennent pas m'aider. Pourtant, je le savais très bien. Faut jamais faire confiance à l'humain, il finit toujours par te décevoir.

-T'as gâché ma vie, Catalina Lañez. Maintenant, je vais gâcher la tienne. Tu as une dette envers moi, envers la mort.

Il s'est approché de moi dangereusement. Il m'a tiré le bras et a commencé à me porter. Il s'est rapproché du bord du pont.

-Tu verras si l'eau de la Seine est bonne.

Soudain, des lumières bleues et rouges ont illuminé le lieu. Apeuré, il m'a lâché. J'ai couru alors que ma cheville et mon ventre tout entier me font mal. J'ai continué à courir pendant des kilomètres. À bout de souffle, je me suis arrêtée. Je ne sais pas pourquoi j'ai fui comme ça, c'est incontrôlable. Vous connaissez ce sentiment de volonté de partir coûte que coûte ? Mon corps me demandait de partir, loin de Thomas et le plus vite possible.

Ma tête tourne et j'ai envie de vomir. Puis, d'un seul coup, je me suis écroulée par terre.

*Ken*
J'ai envie de retourner la terre entière. Lina est plongé dans un lit d'hôpital et se repose. Les médecins sont en train de parler à ses parents. Ils refusent de me dire quoique ce soit parce que je ne suis pas de la famille. J'ai envie de brûler cet hôpital sans déconner. Mon cœur bat trop vite, je tremble de colère et j'ai fumé mon paquet entier. Soudain, Elisabeth est sortie et s'est approchée de moi.

-Je dois te parler de quelque chose, dit-elle sur un air grave.

-Elle ne va pas bien, c'est ça ? demanda Mo en me coupant la réponse.

-Elle va bien. Mais j'ai besoin de parler à Ken, seul.

Je me suis levé et j'ai suivi sa mère. Elle a pris mes mains dans les siennes comme si la situation était grave.

-Catalina va bien, commença-t-elle. Elle va s'en sortir avec quelques bleus et un gros traumatisme.

-Mais ? dis-je agacé et inquiet.

-Catalina était enceinte.

Plus personne ne parle. Elisabeth a fortement serré mes mains pour me réconforter. À vrai dire, je ne sais pas comment réagir. J'ignorais qu'elle était enceinte. Qu'est-ce que je vais lui dire au juste ? Que cette fois-ci ce n'est pas Alexandre qui lui a enlevé son bébé mais Thomas ? Comment on est censé dire ce genre de nouvelles ? Et puis, merde, j'ai perdu un enfant. C'est bizarre de dire ça. Je ne veux pas être père tout de suite. Mais je n'aurais jamais demandé à Catalina d'avorter. Je dois digérer trop d'informations en même temps.

-Je vais aller voir Catalina, dit sa mère. Si tu as besoin de moi, n'hésite pas.

Elle m'a pris dans ses bras et j'ai rejoint mes reufs. Personne ne remarque que je suis revenu, à part Sacha.

-Qu'est-ce qu'elle t'a dit ? demanda-t-elle tendrement.

-On a perdu notre enfant.

Les gars se regardent et doivent chercher les mots. Sacha s'est rapprochée de moi et m'a forcé à la regarder.

-Écoute-moi bien, commença-t-elle, je sais que c'est dur. Vous allez surmonter tout ça. Ken, ça va aller.

Et j'ai fondu en larmes. Je crois que ça fait longtemps que je n'avais pas pleuré comme ça. Ce n'est pas mon genre de craquer comme ça devant mes potes. Mais je crois que c'était la goutte d'eau qui faisait tout déborder. Il faut bien que ces émotions sortent de mon corps. C'est mauvais d'accumuler. Mo s'est avancé et m'a pris dans ses bras.

-On est là pour toi.

-On s'est fait une promesse au lycée hein, rajouta Mekra.

François a débarqué.

-Catalina vient de se réveiller, dit-il. Elle veut te voir.

Accompagné de son père, je me suis avancé jusqu'à l'entrée de la chambre de Lina. Je n'ai pas le droit à l'erreur cette fois-ci. J'ai ouvert la porte. J'ai marché jusqu'au lit. J'ai pris sa main.

-Comment tu te sens ?

-Je vais bien, souffla-t-elle. Apparement, les médecins doivent me dire quelque chose d'important.

Je ne peux pas lui dire.

-Qu'est-ce qui va arriver à Thomas ?

-Il a été arrêté, expliquai-je, ça dépend si tu veux porter plainte ou pas.

-Bonjour Mademoiselle Lañez, dit un médecin en prenant une feuille. Heureusement, vous n'avez rien de sérieux. En revanche, est-ce que vous étiez au courant que vous étiez enceinte ?

-Hein ? bégaya-t-elle.

-Le fœtus n'a pas survécu à votre agression, je suis désolé.

Lina m'a fixé. L'air qu'elle a sur le visage, je ne pourrais jamais l'oublier.

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Fin du 70ème chapitre !
J'espère que vous allez bien. Bisous ❤️

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