*Catalina*
Quand je me réveille, Ken s'est déjà levé. Je suis donc sortie de mon lit. Les garçons sont sur la terrasse en train de déjeuner. Sacha fume cigarette sur cigarette, ce qui m'inquiète fortement.-Vous avez bien dormi ? dis-je.
-Un peu mal à la tête, rigola Sneaz.
-C'est dangereux de courir près du piscine, dit Alpha. On te l'a dit frère.
-Tu nous as fait peur sale batard, renchérit Hugo.
Sacha est sur les nerfs. J'arrive à le sentir.
-Tu vas bien Sacha ? demandai-je.
-Ouais, me cracha-t-elle sur un ton remplis de mépris.
Les garçons et moi-même avons été surpris par le ton de Sacha. Je regarde Ken. Il a plissé les yeux.
-T'es sûre ? renchérit Ken.
-J'en ai juste marre que tout tourne autour de Catalina.
Hein ? Pardon ?
-De quoi tu parles ? répondit Doums
-Vous ne voyez pas ? On est allés jusqu'en Espagne pour la retrouver. On parle d'Alexandre, on parle
de ses parents. J'en ai juste plus qu'assez.Ses paroles me broient le cœur. Mais je sais que ce n'est pas elle qui parle. Après l'accident, Sacha a dû identifier les corps de ses parents. Son père avait le crâne éclaté à cause du choc violent contre le pars-brise. Donc, ce n'est pas Sacha qui parle. C'est la colère, la peine avortée et les paroles qui sont restées trop longtemps enfouies.
-Je ne suis pas jalouse, renchérit-t-elle. Je suis juste épuisée de toujours m'occuper d'elle. Ce n'est pas mon rôle.
-T'es dure, dit Ken.
-Tu la défends maintenant ? Tu faisais moins le malin quand tu baisais des meufs pour l'oublier.
-Tu dépasses les limites, cracha-t-il.
-Ken, laisse, ce n'est pas grave.
-Je peux pas laisser passer ça.
-Allez vous faire foutre, répondit Sacha en s'énervant.
Sacha a les larmes aux yeux. Et ça me déchire le cœur. Elle se bat contre le manque qu'elle ressent. Je ne peux pas lui en vouloir pour déchaîner sa colère contre moi.
-Tu devrais partir, dit Mo. Si c'est pour être de mauvaise humeur, casse-toi.
Elle s'est effondrée devant nous mais je suis la seule à l'avoir compris. Elle est prête à partir.
-Sacha, dis-je.
Elle s'est retournée vers moi. Et je l'ai prise tendrement dans mes bras. Au début, elle se montre réticente. Puis, elle m'a serré fort en se brisant dans mes bras frêles. C'est la première fois que je la vois pleurer. Même quand elle m'a racontée le décès de ses parents, elle avait essayé de camoufler sa peine par des blagues, comme à sa fâcheuse habitude.
-Ils me manquent tellement, hurla-t-elle.
-Je sais, ma belle, je sais.
Je lui caresse les cheveux tandis que les garçons ne comprennent pas ce qu'il se passe.
-J'aurais aimé mourir à leur place.
*Ken*
Je ne comprends pas ce qu'il passe. Deux secondes plutôt, Sacha se comporte comme une vraie peste. Maintenant, elle pleure dans les bras de Cata en prononçant des mots délaissés de sens. Les filles se sont séparés. Sacha nous fait face.-Je vous ai toujours dit que mes parents habitaient en Belgique et qu'ils étaient occupés par leur travail. J'ai menti.
J'ai levé le sourcil, signe d'une incompréhension totale. Pourquoi a-t-elle menti ? Où sont ses parents ?
-Quand j'avais 6 ans, on ne se connaissait pas encore. J'habitais encore à Strasbourg à l'époque. Un soir, ils voulaient aller au restaurant. J'ai refusé et j'ai tapé une réelle crise. Ils ont appelé une nounou en urgence.
Elle a marqué une pause pour regarder Cata qui l'encourage du regard. Elle a soupiré.
-Un camion les a percutés. Le conducteur était un ivrogne qui a survécu à l'accident. Ils sont morts sur le coup. Mon père s'est fracassé sur le pars-brise tandis que ma mère est passée à travers ce dernier pour continuer sa chute sur la route.
C'est horrible.
-J'ai dû les identifier à la morgue le lendemain. Mon père avait le crâne écrasé et ma mère était méconnaissable. C'est pour ça que j'ai paniqué quand j'ai vu Mo.
-Je suis désolé mon cœur, dit Sneaz d'une voix grave.
-La vérité c'est que j'ai passé des années à me convaincre qu'ils ne manquaient pas. Pour faire son deuil, il faut déjà affronter la douleur et la peine. Dans mon cas, on ne peut pas guérir quelque chose qui est enfouis.
-Sacha...dit 2zer, bienveillant.
-Parfois, je fais des cauchemars où je les vois. En réalité, j'aurais aimé mourir à leur place ou mourir avec eux.
-C'est une mauvaise idée, dis-je. Tu sais pourquoi ?
Elle m'a fait un signe de la tête pour me dire non.
-Tu nous aurais jamais rencontré.
Elle a souri entre deux sanglots. Sneaz s'est levé pour la prendre dans ses bras. Elle a pleuré des années de deuil intériorisé. Savoir qu'elle a dû traverser cette période seule me dérange. On aurait dû être là pour elle.
-Je suis désolée, dit-elle. J'en deviens invivable.
-T'excuses pas ma belle, dit Cata d'un ton rassurant.
Je connais Sacha depuis le lycée. On a fait les quatre cents coups ensemble. J'ai jamais remarqué que ses parents étaient morts. Je m'en veux.
-Ken ? dit Sacha. Ça ne va pas ? T'es pâle.
J'ai bien compris que le rap, la notoriété et l'argent sont des choses éphémères. J'ai toujours mené une vie à cent à l'heure pour éviter de me retrouver avec moi-même et mes pensées qui peuvent devenir facilement noires. La révélation de Sacha me déstabilise. Quelques années auparavant, je traînais dans les rues de Paris pour ne pas retourner dans mon appartement miteux. Après, j'ai pleuré la mort de mon ami et la finalité de ma relation toxique avec Camille. Maintenant, je suis en Espagne et épris d'une fille aussi brisée que moi. Le temps passe à une vitesse incroyable.
-Népal me manque, dis-je.
Mes reufs me regardent bizarrement. On n'a jamais été doués quand il s'agit de parler. Cata a posé sa main sur mon épaule.
-À moi aussi, fit Deen en tirant sur sa cigarette.
Un lourd silence s'est installé.
-Il faut que j'arrête de me plaindre. Il y a tellement pire dans ce bas-monde. Des malheurs y'en a plein. Des coups, j'en ai pris, mais je ne suis pas mort, chantonnai-je.
-Eh, mon poto parti trop tôt, j'aurais aimé te voir. Partir en tournée avec nous, je t'aurais traîné de force. Mais Dieu en a voulu autrement et fallait que je l'accepte, renchérit Mo.
Nous avons souri et j'ai levé les yeux vers le ciel. J'ai jamais été un grand croyant mais une partie de moi espère qu'il m'observe d'en haut.
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Fin du trente-quatrième chapitre :)
Aujourd'hui, je ne me sens pas hyper bien. Mais j'essaie de rester régulière. J'espère juste que je n'ai pas attrapé le coronavirus sachant que j'habite à Paris et que c'est un peu la merde.
Bref, bisous, à demain pour l'autre chapitre ❤️
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Pas sans toi.
Fanfiction23 ans à peine, Catalina essaie de vivre dans la capitale française. Elle est lassée par sa vie morose, sans goût, dictée par les attentes de ses parents. Elle porte le poids de sa vie et de son passé. Parfois, elle aimerait tout lâcher et se sentir...