Chapitre 29 : Solitude

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*Catalina, le matin suivant*
Je suis arrivée en Espagne depuis plus d'une semaine maintenant. Je n'ai pas eu le courage de retourner dans la grande maison de mon enfance. Dans cette dernière, sont enfermés mes pleurs d'enfants. Elle n'est pas remplie de bons souvenirs. Ce matin, je me suis levée tôt pour aller à la patinoire du village où habite ma gouvernante, Alma. La revoir m'a fait un bien fou. Peu à peu, je guéris de ma blessure amicale et celle amoureuse que m'a laissée Ken.

La maison où je dors est celle d'Alma. Elle est pareille que dans mes souvenirs. Petite, accueillante et chaleureuse. Étant encore une enfant, je préférais déjà la demeure d'Alma à celle de mes parents. Le sol en marbre de mes parents me rappelait juste la froideur de nos relations. Je dors dans mon ancienne chambre. À l'époque, Alma avait insisté pour que j'ai ma propre chambre. « La fille que je n'ai jamais eu, doit savoir qu'il y aura toujours de la place pour elle» ; je réalise l'ampleur de ces propos que maintenant.

Il n'y a personne à la patinoire. En même temps, il est très tôt. J'ai toujours aimé patiner loin des regards, loin du monde extérieur. J'avais besoin de me retrouver dans un coin familier où tout le monde se souvient uniquement de la petite Lañez. Ils ignorent ce que je suis devenue, ce qui me convient parfaitement. Pas de Ken. Pas de screw. Pas de France. Se retrouver seule m'a toujours permis de faire le point et de respirer un peu plus fort.

Néanmoins, ça serait mentir de dire qu'ils ne me manquent pas. À vrai dire, ils me manquent terriblement.

*Ken*
Après avoir dormis à l'hôtel, du moins essayé, nous sommes partis vers l'adresse donnée par François. Il est tôt. Catalina doit encore dormir. Mais personne pouvait réellement attendre. Une fois arrivés, nous sommes descendus.

-Ça va bien se passer, dit Mo en essayant de nous rassurer.

-Vous êtes sûrs que c'est là ? demanda Mekra. Parce que ça me parait petit.

-On verra bien, dis-je en toquant à la porte.

Une dame âgée nous a ouvert. Elle est petite et me
rappelle Yiayiá. Elle nous sourit.

-¿Quien estéis ? dit-elle.

-Nous sommes des amis de Catalina, dit Sacha.

-Lina n'est pas là, répondit-elle. Elle est partie patiner ce matin. Venez avec moi. Je suis en train de préparer le petit déjeuner.

La vieille dame nous a fait entrer. Sa maison est assez petite et Doums doit se baisser pour passer dans les portes, ce qui nous fait assez rire.

-Avez-vous besoin d'aide ? demanda Sacha.

-Avec plaisir, Cariña. Installez-vous et je vous apporte les ingrédients pour faire les pancakes préférés de Lina.

Elle nous a apporté des ingrédients. Je n'ai aucune putain d'idée de comment on fait des pancakes.

-Je vais m'en charger, Madame, dit Sacha en se retournant vers la gouvernante. Ils ne sont pas très doués en cuisine.

-Appelez-moi Alma, dit-elle en riant et en s'asseyant à côté de Framal.

Nous avons regardé attentivement les gestes de Sacha. Puis, Alma a rigolé.

-Donc, vous êtes la raison du retour de Lina ?

Nous avons baissé les yeux, signe de nos regrets à propos de l'histoire.

-En quelque sorte, répondit Mo. Elle vous a dit quoi sur nous ?

-Par pitié, dit Alma, tutoyez-moi. Au début, elle a préféré de rien me dire. Vous savez comment Lina fonctionne.

Comme moi, par l'intériorisation.

-Puis, elle m'a racontée que vous vous étiez disputés pour un message et que vous lui aviez demandé de
partir.

Alma n'est pas énervée. Au contraire, elle nous sourit tendrement.

-C'est toi Ken ? demanda-t-elle en plongeant ses yeux dans les miens.

-Oui. Comment tu le sais ? dis-je, gêné par le tutoiement.

-Elle m'a parlée d'un jeune homme avec une casquette qui lui fait tourner la tête. Enfin, pas exactement. Mais ses yeux brillaient quand elle parlait de toi.

-Comment elle va ? demanda Deen.

-Lina a beaucoup pleuré quand elle est arrivée. Maintenant, elle a l'air d'aller mieux. Elle avait besoin de retourner ici.

Je m'en veux. Et je sais que mes reufs s'en veuillent aussi, voire même plus. Après tout, ils se sont disputés avec elle pour me défendre. Alma a remarqué que nous sommes attristés par la situation.

-Ne vous inquiétez pas, nous rassura-t-elle.

-Est-ce que tu sais à quelle heure rentre-elle ? questionna Sacha.

-Chaque matin, Lina va à la patinoire. Mais ça dépend de son état. Le patinage a toujours été une sorte de thérapie pour elle.

Ma bande a continué de parler avec Alma tandis que j'ai dérivé vers les photos de famille. J'ai vu une photo avec un bébé aux magnifiques yeux bleus. Par conséquent, j'en ai déduis qu'il s'agissait de Catalina. Les autres photos deviennent de plus en plus triste à regarder. J'ai remarqué que Catalina souriait de moins en moins, signe de sa descente progressive dans les abysses de l'enfer. Je m'en veux encore plus d'avoir réagi excessivement à Marseille. Elle mérite tout sauf ça. Puis, la porte s'est ouverte. Après deux semaines, je revois enfin Catalina.

Elle a perdu quelques kilos, ce qui m'inquiète réellement. Elle est surprise et n'ose pas parler en vue de l'expression sur son visage. Après avoir fixé chacun de mes reufs, elle s'est arrêtée sur moi. Je n'arrive pas réellement à déchiffrer ce que ses yeux veulent me dire. Je vois tout, de l'amertume, de la joie, de la peine et de l'amour. Elle a tiré sur sa cigarette, comme à son habitude. Pendant un moment, j'ai bien cru qu'elle allait juste claquer la porte de sa chambre pour ne plus jamais ressortir. Au contraire, elle s'est adossée contre les murs de la cuisine.

-Regarde qui vient te rendre visite, Lina.

-J'ai des yeux, Abuelita. En revanche, je ne comprends pas ce que vous faites là, rajouta-elle froidement.

Elle essaie, tant bien que mal, d'enfouir sa joie pour nous faire comprendre qu'elle nous en veut. Son regard froid me glace le sang.

-Vous m'avez demandée de partir et c'est ce que j'ai fait. Donc, oui, votre présence est incompréhensible.

Son ton est flegmatique et distant. Sans un mot, Deen s'est levé et s'est rapproché d'elle. Ils se sont regardés sans oser briser le silence. Puis, il l'a pris dans les bras. Elle s'est mise à pleurer. Pour la première fois depuis la mort de Népal, Deen a fondu en larmes. Et mon cœur s'est serré encore plus fort dans ma poitrine.

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Fin du vingt-neuvième chapitre !
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