chapitre 72 : souvenir d'outre-tombe

610 59 57
                                    


Le bruit de l'alarme incendie qui se déclencha subitement fit sursauter Giana. Elle sauta de son lit, tous les sens en alerte en se demandant si Lissandro n'était pas à l'origine de tout ce vacarme. Son instinct lui souffla que si. Il venait pour la chercher. Alors sans perdre plus de temps, elle marcha vers la porte et dirigea le canon du Desert Eagle habilement volé à Santiago, sur la serrure. Un bras en travers de son visage pour se protéger des éclats, Giana fit pression sur la gâchette sans ciller. La serrure vola en éclat.

Son arme à la main, elle s'élança à travers le couloir à toute vitesse, mais avant qu'elle n'eut pu atteindre les escaliers, elle se sentit partir en arrière. Tirée par les épaules, elle tomba lourdement sur les fesses et si violemment qu'elle laissa un gémissement de douleur lui échapper.

À l'origine de sa chute, Santiago se dressa devant elle, un sourire en tout point cruel suspendu au coin des lèvres. Sourire qui partit en s'étendant jusqu'à ses oreilles quand elle leva les yeux sur lui et réalisa avec frayeur ce en quoi cet amalgame de haine et de colère l'avait changé. Il n'avait plus rien de l'homme qu'elle avait provoqué plus tôt. Il s'agissait d'un démon qui se dressait devant elle, toute griffe dehors. Le fait qu'elle lui ait volé son arme après l'avoir magnifiquement caressé devait y être pour beaucoup. Il la fixait comme un loup en train de se lécher les babines et prêt à bondir sur sa proie pour lui déchiqueter la chair et broyer ses os. Qu'elle ait son arme à feu en sa possession ne lui faisait ni chaud ni froid. Santiago était sûr de la battre. C'est ce qui lui fit le plus peur à Giana. Non pas la haine viscérale qu'elle déchiffrait avec aisance au fond de ses billes noires, mais bien l'envie réelle de la trucider par n'importe quel moyen.

Une chance pour elle que son arme ne lui avait pas échappé pendant sa chute. Giana s'en félicita intérieurement.

Elle ne se lamenta pas plus longtemps sur son sort et brandit droit devant elle son pistolet non sans ressentir une peur effroyable lui retourner salement l'estomac. Santiago perdit son sourire à la minute, mais la vicieuse malice présente dans son regard elle, demeura intacte.

— Je dois admettre qu'il est quand même sacrément fort ton psychopathe de mec. Il est là et il vient pour toi Bertolini. J'aurais dû me douter que tu jouais les salopes pour me la mettre à l'envers.

— Je vais tirer !

— Je n'en doute pas une seule seconde. Mais laisse moi te prévenir que si tu le fais, je ne t'épargnerai pas. Ose tirer Bertolini et je te plante avec mon couteau.

Pour illustrer ses paroles, il sortit un long poignard militaire d'au moins vingt centimètres -du manche à la pointe de la lame- de derrière son dos. Giana ne cacha pas la peur qui la saisit. Avec précaution, elle se releva sans lâcher des yeux son regard cruel de bête enragé.

— Rends toi, ça vaudrait mieux.

— J'ai l'impression que t'as pas vraiment envie que je me rende, je me trompe ?

Il agita négligemment la tête après avoir haussé les épaules d'un air décontracté.

— Ça faciliterait les choses !

— Si tu crois que je vais te laisser me...

Santiago ne la laissa pas finir sa phrase et fonça droit sur elle. Il la plaqua violemment contre le mur à la façon d'un rugbyman tout en rugissant presque sa colère. Giana se cogna la tête, mais ne se laissa pas déconcentré par le choc pour autant. Bien que sonnée par le coup et la douleur qu'elle sentait se répandre à l'arrière de son crâne, elle trouva la force d'ôter le cran de sureté de son arme. Le clic mécanique qu'émit le pistolet fit réagir Santiago. Vif comme l'éclair, il plaça son bras en travers de sa gorge puis attrapa son poignet au vol qu'il enserra avec force. Il alla jusqu'à le lui tordre pour lui faire lâcher le pistolet, mais Giana était plus forte qu'elle n'en avait l'air. Elle n'avait pas envie de perdre face à cet homme qui n'en était plus vraiment un. Alors avant de céder à la douleur qu'il faisait subir à son corps, elle pressa la détente. Son pistolet libéra la balle qui fusa à quelque centimètres seulement de sa tête. Un coup bon à lui exploser le tympan droit, sans plus. Giana s'en voulut à l'instant de l'avoir manqué de si peu. Ce geste malhabile lui coûterait cher, excessivement cher.

Gia et Le SoldatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant