chapitre 87 : good boy...

690 32 42
                                    


Recroquevillée au milieu de son lit, Giana peinait à retrouver le sommeil après avoir été la proie d'un énième cauchemar sanglant. Trois jours s'était écoulé depuis qu'elle avait parlé à Lissandro, trois jours et trois nuits pendant lesquelles elle n'avait pu dormir convenablement et pour cause, ses cauchemars récurrents qui n'avait de cesse de la torturer. Santiago continuait de s'accaparer ses nuits et ses rêves. Comment parvenir à se l'ôter de l'esprit quand il persistait à vouloir rester dans sa tête ? Il y demeurait, en maître ultime.

L'arrivée soudaine de Fédérica lui arracha un sursaut. Cette dernière se glissa dans sa chambre, une infusion brûlante entre les mains. Une coïncidence beaucoup trop propice pour n'en être qu'une. Les visites nocturnes de cette dernière coïncidaient parfaitement avec ses réveils, à dix minutes d'intervalle plus précisément. Giana savait à qui elle devait toutes ces petites attentions qui lui apportait une certaine consolation.

Comme par hasard, depuis trois jours maintenant, Fédérica, avait pris l'habitude de lui apporter une infusion à base de plante qui calmerait ses nerfs et l'aiderait à dormir un tant soit peu paisiblement.

Contre toute attente, ça avait le mérite de fonctionner. Elle refermait ses paupières, apaisée, pas moins apeurée pour autant, mais tout de même sereine. Excepté cette nuit fatidique. Ce soir là, elle avait eu beau vider sa tasse jusqu'à la dernière goutte, son angoisse ne la quittait pas.

Sans doute était-ce la faute de l'orage qui grondait là dehors, de toutes ses puissantes forces.

Une pluie battante, un tonnerre affreusement bruyant à l'en faire tressaillir, des éclairs éclairant partiellement la nuit noire de leur brève lumière aveuglante, venaient s'ajouter à ses peurs. La mer qu'elle entendait se déchaîner au loin n'arrangeait en rien la situation. Un orage puissant, menaçant qui ressuscitait ses souvenirs rudes auprès d'Isadora. Giana se rappela les décentes à la cave, séparée de son fils qui venait de naître. Pendant l'orage c'était ce qu'il y avait de pire pour elle. Il y régnait un froid mordant, le sol en béton était aussi gelée qu'un morceau de glace. À moitié nue, dans sa petite nuisette, elle n'avait rien pour se maintenir au chaud. Rien à part le doux visage de son bébé qu'elle se remémorait sans cesse.

Giana eut un frisson d'horreur, qu'elle sentit remonter le long de son échine.

Elle détesta se sentir aussi pitoyable au milieu de la nuit à cause d'un simple orage.

— C'est que de la pluie ! se murmura-t-elle à elle-même pour tenter de chasser ses vilaines craintes, juste de la pluie.

Une idée saugrenue lui traversa l'esprit. Avec détermination, elle dirigea son regard vers la baie vitrée contre laquelle s'écrasaient les grosses gouttes de pluie.

Giana prit conscience de ce qu'elle était en train de faire lorsque celles-ci lui mordirent la peau du visage , des bras alors qu'elle venait juste de mettre le nez dehors. Son négligé ne tarda pas à se retrouver trempé. Frissonnante des pieds à la tête, elle quitta la pergola, descendit les quelques marches qui la séparait du sable et accueillit la pluie qui s'abattait sur sa tête, avec une forme de satisfaction. Elle coulait le long de son dos, de son ventre douloureux, de ses bras, ses jambes et emportait avec elle ses noires pensées. Elle voulut bien donner à la pluie, ce dont elle ne parvenait à se débarrasser. Ses craintes s'envolèrent avec les bourrasques glacées. Les souvenirs affreux des heures sombres qu'elle avait endurer des années plus tôt, laissèrent place à une euphorie sans pareil. Pour la toute première fois depuis qu'elle s'était réveillé de son coma, elle se sentit comme une petite fille et l'orage ne sembla plus l'effrayer.

Conquise, elle se débarrassa de sa robe pour profiter pleinement de la pluie qui s'écrasait avec force sur sa peau. Le froid, le vent impétueux, l'avaient comme délivré des douleurs qui lui tenaillaient encore les entrailles. Giana n'avait pu l'impression de subir sa chair meurtrie. Elle aurait pû se mettre à danser à l'instant si quelque chose ou plutôt quelqu'un de terriblement costaud ne venait pas de toutes ses forces, de la plaquer dans le sable mouillé.

Gia et Le SoldatOù les histoires vivent. Découvrez maintenant