15 - Au Palais royal

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        Une semaine passa sans que Électra ne revint à l'auberge. Attendant patiemment la fin du mois, elle avait réussi à trouver refuge tout près de la Tour administrative, dans une espèce de cabane abandonnée qui donnait suŕ le fleuve. Au début, elle avait craint la présence de gens peu fréquentables qui se seraient établis dans ce taudis fait de bois et de filets pourris, mais l'inactivité qui entourait la cabane réussit à rassurer la jeune femme.
Au moins, elle pouvait dormir sous un toit et se reposer ; pour cause, la fièvre était revenue de plus belle et il devenait difficile pour Électra de tenir debout sans voir le sol tanguer.

       Au bout du huitième jour, le soir tombé, elle se décida à revenir dans le quartier du Mauvais sens et s'étonna elle-même par son sens de l'orientation, même délaissée de ses cartes. Elle fit attention aux clients qui étaient présents au rez-de-chaussée et constata que ce n'étaient que des habitués ; pas de Raphaël d'Asthamos en vue. Furtivement, alors que le gérant avait le dos tourné, elle traversa la salle et se rendit dans la cour intérieure où se trouvaient les écuries. Quel soulagement fut le sien lorsqu'elle vit que Elis était encore là et se portait à merveille ! Bien que son poil avait perdu de sa splendeur, le cheval semblait en bonne santé et il hennit avec plaisir quand il reconnut Électra qui approchait pour le caresser. Elle profita de ce moment pour le détacher et lui remettre sa selle sur le dos.

- Pardonne-moi d'avoir pris tant de temps..., lui murmura t-elle. Tu reviens avec moi, dorénavant.

En plus de ses retrouvailles avec sa brave monture, la jeune femme ne disait pas non pour des retrouvailles avec son argent et le reste de ses effets personnels précisément gardés dans sa sacoche. Pour cela, elle s'arma de volonté et remonta jusqu'à la porte de la chambre. Le problème était Raphaël. Elle n'avait sincèrement aucune envie de le revoir.
Pour s'assurer qu'il n'était pas là, Électra colla doucement son oreille contre la porte de la chambre, et elle n'eut même pas le temps de réaliser la situation qu'elle manqua de trébucher et se rattrapa sur cette même porte qui s'ouvrit sans aucune résistance. Ce qui suivit lui resta gravé dans la mémoire...

       Il faisait extrêmement sombre dans la chambre, et froid aussi. Une brise glaciale tourbillonnait dans la pièce. Quand sa vision commença à s'habituer à cette obscurité, Électra faillit crier. Raphaël était allongé sur le sol, face contre terre et tout ensanglanté.
La jeune femme se précipita vers lui et s'accroupit en le retournant sur le dos sans précaution. Elle le croyait mort. Son visage couvert d'ecchymoses violettes et de coupures était totalement méconnaissable.

- Raphaël ! appela t-elle en le secouant. Raphaël, réveillez-vous ! S'il vous plaît...

Qui a bien pu lui faire une chose pareille ? Elle voulut inspecter le reste de son corps pour voir si il ne présentait pas les marques d'une blessure mortelle, mais à peine détournait-elle le regard que Raphaël remua faiblement. Ses paupières tremblaient légèrement et ses lèvres semblaient vouloir parler sans qu'aucun son n'en sorte.

- Que dites-vous ?...Non, ne parlez pas. Vous êtes blessé. Est-ce que vous êtes en mesure de vous lever ?

Le jeune homme hocha la tête et tenta de s'appuyer sur ses coudes pour se redresser, mais ce geste lui arracha un gémissement de douleur. D'une voix rauque semblable à celle d'un vieil homme, il souffla :

- La fiole...

Encore cette fiole ? Mais Électra n'avait pas envie de le confronter à l'épisode de la fois dernière, du moins pas pour le moment. Elle se leva et vint farfouiller dans la commode mais elle ne trouva rien. Pareil en ce qui concernait sa sacoche, sa bourse d'argent, les cartes d'Hydralia, leurs vêtements, le poignard de Raphaël...Il ne restait rien. Chamboulée, la jeune femme lui lança un regard désespéré, et sans même devoir lui expliquer ce qu'il avait dû se passer, elle affronta ses maux de tête avec courage et aida Raphaël à se remettre debout en dépit de ses blessures. Il était affaibli et son corps semblait peser double, mais Électra prit sur elle-même et se donna la mission de ne pas l'abandonner à son sort, car au fond, elle n'avait pas d'autres solutions.

Le Cygne NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant