La pluie frappait le carreau et éteignait certaines lanternes qui illuminaient encore les rues fantomatiques de Desmarid, empêchant Électra de trouver le repos.Elle ne savait pas quelle heure il était, mais tout semblait calme ; il n'y avait plus un seul bruit provenant du rez-de-chaussée de l'auberge.
Ce n'était pas la première fois qu'elle faisait une insomnie. En réalité, elles s'étaient multipliées depuis son départ de Cyrianie, mais cette nuit était celle de trop. La jeune femme ne demandait qu'une seule chose : dormir. Les événements de la veille l'avaient complètement exténués, aussi physiquement que mentalement. Seulement, dès qu'elle fermait les yeux, une sensation étrange sous ses paumes lui rappelait la peau du cou de la vieille dame, ses cris étouffés qu'elle poussa alors que Électra l'étranglait sans pitié. C'était moi, la folle..., se dit-elle avec horreur. Qu'est-ce qui m'a pris de faire cela ? Elle frissonna, dégoûtée et apeurée.Dehors, la pluie tombait sans arrêt depuis le début de la soirée. Elle s'intensifiait puis diminuait avant de reprendre de plus belle. Ce n'était pas une tempête, néanmoins, mais des averses répétitives qui faisaient déjà s'infiltrer de l'eau par le carreau fissuré. Le vent qui soufflait en même temps produisait une mélodie inquiétante semblable à celle de choeurs solennels et macabres.
De temps à autre, la jeune femme se tournait de son côté gauche pour vérifier si Raphaël dormait. Elle avait du mal à le distinguer dans la pénombre, mais d'après le silence et l'absence de mouvements qu'il présentait, c'était bien le cas. Elle n'avait plus qu'à attendre le lever du soleil, comme à chaque fois...Le lendemain, le duo prit le chemin du district académique pour se rendre à l'hospice du professeur Waltz. Dans les rues, des flaques énormes obligeaient les passants à jouer des jambes pour ne pas se mouiller jusqu'à ce qu'un cheval trop turbulent ne réduise les jupons des dames en réceptacles d'eau boueuse.
Ce district était assez proche de la Tour administrative et était le plus petit de toute la capitale. Il regroupait le siège de l'Académie de sorcellerie, mais aussi d'autres écoles d'enseignement magique moins prestigieuses et plus accessibles, ainsi que la majorité des hospices et autres associations de guérisseurs. Pour l'atteindre, il fallait traverser le fleuve via un pont et emprunter la Place Centrale. Cette dernière faisait au moins dix fois la taille de celle du village mais comportait les mêmes stands et les mêmes produits échangés. Simplement, ici, le nombre de vendeurs de livres de sortilèges ou de talismans magiques était beaucoup plus important qu'en Cyrianie, et ils semblaient encore moins fiables que leurs congénères du Sud -ce qui relevait du miracle.
Soudain, alors qu'ils déambulaient en silence, Raphaël la questionna :
- Je me demandais, Électra : comment étaient vos relations avec votre frère ?
- Que voulez-vous dire par là ?
- Eh bien, pour certaines raisons, je ne me suis jamais bien entendu avec ma soeur Clarys, répondit-il d'un ton neutre. Je voulais juste savoir si il existait encore des relations saines entre frères et soeurs sur ce Continent.
- Ah, je comprends.
Elle ne comprenait pas.
- Mon frère et moi sommes devenus inséparables après la mort de notre père, expliqua t-elle. C'est lui qui m'a élevé, en quelque sorte, appris les rudiments de la vie et toute sorte de choses. Je lui en serai éternellement reconnaissante.
- Et comment était-il ? Vous ressemblait-il du côté du caractère ?
- Pas tellement. Il était attentionné, gentil et réfléchi. Toujours prêt à faire passer les autres avant lui. Je pense sincèrement qu'il n'était pas comme les autres garçons de son âge...
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Le Cygne Noir
Fantasy《 Il existe, sur terre ancienne appelé le Continent, deux royaumes ennemis s'affrontant depuis des millénaires. Électra est une habitante de l'insignifiant royaume de Cyrianie. Rejetée par son village, elle décide de tout quitter lorsqu'elle appren...