Chapitre 6

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— Quelle idée d'avoir accepté, se reprocha Anissa sur le chemin extérieur de l'hôtel.

     Mais, ayant déjà rencontré pas mal d'hommes de ce genre, elle savait comment les rejeter en douceur pour éviter de les avoir sur le dos un moment. C'était même toute une technique qu'elle avait savamment mise en place au fil des expériences, la perfectionnant et la rendant plus efficace qu'à ses débuts.

     En effet, elle commençait en premier lieu par accepter leur proposition, qui était seulement de l'ordre d'aller boire un verre. Une fois au rendez-vous, la jeune femme orientait la conversation sur les envies et les souhaits de chacun. Et là, elle sortait sa botte secrète, son arme infaillible, en racontant alors rechercher un homme pour se marier le plus tôt possible et au passage, avoir cinq ou six enfants. Elle se remémorait également avec passion la fois où elle avait découvert que son ex-fiancé la trompait à droite à gauche « Vous vous rendez compte ? Un homme qui ne cherche qu'à s'amuser ! » Les pauvres misérables se retrouvaient pris au jeu et n'avaient pas d'autres choix que de ne plus donner de nouvelles le rendez-vous passé.

     Anissa avait ainsi choisi de ne pas envoyer balader tous ces hommes d'un geste de la main ou d'un regard de travers car il s'agissait souvent de collègues de travail ou des gens du milieu rencontrés à des défilés et galas. Et même parfois, des hommes bien plus puissants qu'elle.

     Ça, elle le savait malheureusement à ses dépens, que beaucoup usaient de leur place hiérarchique pour arriver à leurs fins, certains allant même jusqu'au chantage sexuel. Elle avait été confrontée à au moins deux ou trois hommes qui avaient profité de sa vulnérabilité, de son manque d'expérience et de son envie de réussir à un moment où elle avait encore tout à prouver. Lui promettre monts et merveilles en échange d'actes sexuels. La jeune femme se remerciait tous les jours de n'y avoir jamais cédé. Rien que d'y repenser, elle en avait des nausées. Cela indignait au plus au point Anissa qui se désolait de devoir inventer des stratagèmes pour esquiver ces hommes sans les froisser.

     Mais avec Romuald, bien qu'il ne fasse pas partie de ses contacts de travail, elle avait vite cerné le personnage et ne souhaitait pas devoir le supporter pendant tout son séjour. Elle lui dirait sûrement rechercher une personne à qui parler le temps d'une soirée et que cela s'arrêtait là. Dans le meilleur des cas, il accepterait. Dans le pire, elle serait obligée de lui faire comprendre qu'on n'impose rien au sexe opposé.

     Pour l'heure, la jeune femme voulait se changer les idées et surtout se rafraîchir. La soif la submergeait encore plus que l'irritation et une bonne baignade ne serait pas de refus, notamment en vue du soleil qui déclinait.

     Empruntant alors les allées du parc exotique fleuri, elle arriva rapidement face à la piscine. Les photos ne mentaient pas, elle est splendide.

     Son regard fut attiré par les grands lits blancs à baldaquin disposés sur une fine couche d'eau le long du côté droit du bassin. Elle s'y installa, ravie de profiter d'une vue sur l'île principale des plus agréables. Un cocktail frais apporté par le serveur et Anissa retrouva le sourire. Le soleil n'était alors plus très haut dans le ciel qui, virant à l'opale, semblait l'accompagner dans son coucher de ses petits nuages pommelés. Un doux vent vint caresser la peau de la jeune femme et jouer avec ses cheveux attachés en queue de cheval. J'ai bien fait de prendre mon vol, je n'aurais manqué ce genre de moment pour rien au monde.

     Reposant sa pina colada, Anissa se leva alors en direction de la piscine, et constata au passage que plusieurs personnes se tournèrent vers elle. Beaucoup étaient des femmes plutôt âgées dont le regard se trouvait partagé entre l'admiration et la jalousie. On aurait même pu penser à de la haine chez certaines et déjà des murmures parvinrent à ses oreilles. Mais ça n'eut pour seule conséquence que d'amuser Anissa. Un sourire traversa fugacement ses lèvres lorsqu'elle constata qu'il s'agissait pour beaucoup, de femmes passées sous le bistouri. À quoi bon se faire refaire le visage si c'est pour encore se sentir mal dans sa peau après ?

En corps de toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant