Chapitre 2

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* 6 jours avant *

— 20h00 ! Merde !

     Elle ajouta en vitesse une dernière paire d'escarpins à sa valise avant de la refermer pour de bon. Un vase décoratif posé à même le sol manqua de se renverser lorsque la jeune femme traina péniblement son bagage jusqu'à l'entrée. Attrapant à la volée son sac à main, elle lança un rapide coup d'oeil à son reflet dans le miroir : cette combi- short rouge qu'elle arborait aujourd'hui mettait en valeur le versant de ses hanches et ses longues jambes bronzées avant même l'été. Ses chaussures à talons compensés accentuaient sa silhouette élancée et sa taille fine. Aussi, sa chevelure blonde délicatement relevée en un chignon décoiffé mettait à nu son cou gracieux. Son délicieux visage ne pouvait être mieux mis en valeur que par ce fard à paupières chaud qui étirait ses yeux verts et ce gloss rosé lui donnant des lèvres pulpeuses. En bref, elle était radieuse.

     Satisfaite de ce rendu, elle prit sa valise et referma la porte d'entrée en chêne. Habitant à Paris, la jeune femme avait emménagé dans le 15eme arrondissement il y avait peu de temps de cela. Mais bien loin d'être une fille à papa, elle avait travaillé sans relâche, enchaîné les écoles prestigieuses de mode et accompagné quelques maisons de Haute Couture avant de devenir styliste indépendante. Depuis cinq ans, elle avait lancé sa propre marque de vêtements à son nom, présentait deux collections par an et possédait déjà quelques boutiques de prêt-à-porter de luxe dans la capitale. Tirer un trait sur sa vie sociale durant une longue partie de sa vie n'avait pas été simple mais grâce à cela, elle réussissait maintenant dans le domaine de son choix malgré la rareté des places et la dureté du milieu.

     Enfin, sur le papier, c'était ce qui apparaissait. Depuis deux ans, la réalité était un peu différente. Un drame familial et une séparation avec son ex-conjoint dans la même période de temps, l'avait entrainée dans une spirale infernale où le travail était devenu sa seule échappatoire ; l'unique solution pour fuir le quotidien devenu trop dur à supporter. Elle survivait. Elle survivait face à un monde impitoyable. Car malgré la passion qui l'animait, l'univers de la mode ne lui laissait pas de répit. Une pression constante de toujours devoir être irréprochable, sur le devant de la scène, sans afficher ses failles et ses faiblesses. La jeune femme s'était doucement effacée, avait refusé les interviews, se contentait de quelques apparitions publiques à des événements pour ne pas se faire oublier. Tenir la cadence de deux collections par an lui était rendu difficile. Ce climat constant d'anxiété et de souvenirs devenait invivable. Il fallait quelle s'évade, elle allait finir par s'éteindre sinon. Ceux qui travaillaient avec elle au quotidien, comme ses collaborateurs où son assistante, l'avaient remarqué. Mais, ils connaissaient son talent et ses capacités. Il y a quelques semaines une solution avait alors été avancée : associer voyage et travail.

     Changer d'air, se dépayser, voir autre chose que la pluie de la capitale. Cette idée que la styliste n'avait jamais vraiment exploitée l'avait conquise. Bien sûr, elle s'était déjà rendue dans d'autres pays pour parler affaires, visiter les salons internationaux et se rendre à des évènements. Mais jamais pour l'essence même de son métier. Elle partait donc en direction de Bora Bora pour s'imprégner de ce bout de paradis perdu et retranscrire cet univers dans sa nouvelle collection attendue pour la rentrée.

     La jeune femme avait cinq mois pour préparer son oeuvre et s'était donnée jusqu'à trois semaines sans sa modéliste. Elle avait également délégué toute communication avec la presse et les acheteurs à son assistante dans le but de mieux s'immerger dans le lieu. Ainsi, à Bora Bora, elle espérait se consacrer entièrement à la création en laissant tout l'espace possible à son imaginaire. La styliste avait fait le pari audacieux d'associer l'île édénique à une collection mettant en valeur la beauté des femmes. En plus de son inclusivité, sa marque était aussi reconnue pour réduire au maximum son empreinte écologique. L'utilisation de tissus français sans polyester permettait de réduire les émissions de gaz à effet de serre de ce secteur. L'enjeu était de taille devant le peu de temps imparti avant le jour J, mais elle savait garder la tête froide. Un esprit sujet au stress et c'est tout son travail qui en serait affecté. Il fallait qu'elle exploite la nécessité de se rattraper des deux dernières années comme une force motrice.

En corps de toiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant