By-Cœurs 4

Chapitre 19

Elise

Je m'écarte et enfile mon pyjama : un tee-shirt à lui.

J'ouvre la porte et mon père entre avec une boîte plus ou moins emballée, ce n'est pas du papier cadeau.

Il s'assoit sur mon fauteuil de bureau pendant que Simon et moi nous installons sur le lit.

— Quand tu es née, commence-t-il hésitant, mon père n'hésite jamais, c'est étrange, avec Mélissa nous avons pensé qu'il était important d'en informer ma mère. Elle ne connaissait pas l'existence de Tom mais j'avais la sensation que c'était vital de lui dire que je venais d'avoir une petite fille. Alors j'ai fait pas mal de recherches, dans le dos de ton grand-père. S'il avait su que je la cherchais douze ans après son départ, je me serais pris une sacrée raclée, sourit-il. Alors après des heures de recherches et l'aide d'un professionnel, j'ai trouvé son adresse. Je lui ai envoyé une photo de toi dans les bras de Tom, tu devais avoir une semaine ou deux pas plus. Puis, restant sans réponse au bout d'un mois, j'ai mis de côté l'idée qu'elle réponde. En septembre, Mélissa est partie, et comme tu le sais, j'ai perdu pied quelques semaines. Mais ta grand-mère a répondu à ce moment-là. Alors pour que ton grand-père ne le sache pas, Sam a caché le colis au fond d'une caisse et je l'ai oublié. L'autre jour, je triais mon armoire pour faire de la place et j'ai retrouvé ce paquet. Je me suis dit que c'était mieux d'attendre Noël. Il vient donc de ta grand-mère, je n'ai aucune de ce qu'il contient. Tu es libre d'en faire ce que tu veux, il est à toi puisque c'est ton nom qui est inscrit dessus.

Il me donne le colis et, curieuse, je n'hésite pas à l'ouvrir. Je ne m'y attendais absolument pas, c'est plutôt une bonne surprise.

Je prends mon temps pour m'assurer de ne rien abîmer. Sous l'emballage basique pour informer le facteur de l'adresse, se trouve un paquet emballé comme un cadeau.

Je défais le nœud en satin et enlève le scotch du papier cadeau.

En dessous, il y a une belle boîte en bois de chêne que j'ouvre avec précaution.

Une première enveloppe avec le prénom de mon père se trouve au-dessus, je la lui tends, il la saisit mais ne l'ouvre pas pour l'instant.

Une deuxième lettre avec le prénom de Tom est placée juste en-dessous et une troisième lettre, qui m'est adressée, cache le secret que renferme cette boîte depuis plus de vingt ans.

Je la retire et découvre trois éléments qui m'intriguent. Un pinceau assez ancien, un carnet et une petite toile en format A5. Je sors avec délicatesse la toile.

Une femme assise à son bureau tient un verre de vin rouge et observe par la fenêtre. Je la montre à mon père et, lorsqu'il découvre le tableau, je peux lire une multitude d'émotions sur son visage, de l'étonnement, de la tristesse, de la joie et encore d'autres que je ne décrypte pas.

— C'est ta grand-mère, m'informe-t-il, ému.

Les yeux brillants, il prend la toile avec délicatesse. Comme si elle allait se volatiliser, son regard est incapable de décrocher. Je sais qu'il était jeune quand sa mère est partie et depuis que je suis née, il n'a jamais montré le moindre signe de mal être qu'il ait été abandonné.

Je prends le carnet et le feuillète avec encore plus de précaution, il y a un risque, vu l'âge du papier, que les pages s'abîment ou se décrochent. C'est un carnet de croquis, je comprends donc que ma grand-mère était la muse d'un peintre.

Cette pensée me fait sourire, c'est peut-être pour ça que j'aime autant la peinture.

Au début ce ne sont que des pages de croquis de proportions et au fur et à mesure des pages les traits s'affinent pour en devenir le portrait sur le tableau. Certaines pages sont consacrées au verre de vin.

Simon pose sa main sur mes reins pour me rappeler qu'il est là si j'ai besoin, il reste silencieux pour ne pas interrompre ce moment émouvant, autant pour mon père que pour moi.

Je repose le carnet et, avec une certaine impatience, décachette la lettre.