By-Cœurs 4

Chapitre 21

Samuel

  Nous venons de rentrer de l'orphelinat, je sors discrètement mon téléphone pour faire une photo. Trois de mes fils et mon neveu se chamaillent en jouant sur leurs nouvelles consoles dans le salon.

Puis je file dans le bureau de mon frère. Zach nous a envoyé ses dernières recherches sur les Satanists qui sont à la recherche d'Alice, Pauline et Pablo. Nous devons avancer, nous sommes censés lancer une guerre dans peu de temps contre le nouveau cartel.

En ouvrant la porte, je découvre Will à ma place, vautré dans le canapé. Il éclate de rire mais ne bouge pas d'un poil. Je m'installe dans le second fauteuil, à côté d'Alex, face à Neymar.

Ce dernier m'explique que les Satanists cherchent activement les enfants. Leur problème ? Ce sont des petits cons qui ne valent rien physiquement. Il suffit que nous trouvions leur cachette et nous leur exploseront la gueule.

Nous avons chacun un ordi sur les genoux pour étudier les premiers profils que Zach a trouvés. Gringalets, des lunettes rondes, tous des têtes de geeks...

— Papa, la voix d'Alice nous fait relever la tête vers la porte.

Elle ne s'attendait pas à nous trouver tous les quatre dans le bureau et se paralyse sur place.

— Ma Chipie, viens.

Il lui faut un instant pour se mettre en marche. Le psy a suggéré de ne pas toujours aller vers elle lorsqu'elle est surprise mais de l'encourager à nous rejoindre.

Elle s'assoit sur les genoux de son père et se blottit contre lui. On dirait une petite fille, elle paraît si minuscule par rapport à mon frère. De par sa taille et son caractère, elle ressemble à une enfant. Je me demande si cette impression disparaîtra un jour.

Neymar prend la peluche que la Petite tenait dans sa main, celle qu'Antho a trouvé dans la cave.

— Elle vient d'où ? demande-t-il.

— C'est Anthony qu'il me l'a rapportée, répond-elle.

Alors je lui explique qu'elle était dans le sous-sol et Alice en explique l'origine.

— Quand Mike m'a amenée dans la cave, il me la donnait juste après que les clients soient partis. Plus tard, Stan me l'enlevait et la cachait. Comme j'étais sage, un jour il a décidé que je pouvais la garder.

Son menton tremblote et les larmes coulent... c'est toujours difficile d'en parler, ce qui est tout à fait normal et me brise un peu plus le cœur à chaque fois. Mon frère la console en l'embrassant sur la tempe.

Les gamins de l'orphelinat ne parlent qu'avec les psys que nous avons embauchés, jamais avec nous. J'ai des rapports généraux sans trop de détails mais de manière générale, tous les enfants craignent qu'un ami de Stan revienne un jour... ils ont tous, sans exception, été abusé...

— Très longtemps après, un client m'avait fait très mal alors j'ai pleuré et Mike s'est fâché très fort. Il a repris la peluche et m'a interdit de l'avoir à nouveau puis il est sorti de la pièce. Quand il est revenu, il avait un marteau dans la main et il a frappé mes chevilles avec... termine-t-elle dans un sanglot.

Neymar la câline et serre les dents pour contrôler sa colère. La tension dans la pièce est palpable. Le jour où nous retrouverons les clients, ils vont prendre chers. Aucun de nous ne contrôlera la rage qui nous consume petit à petit depuis que Simon a exposé à Delphine l'enfance monstrueuse qu'il a subi. Alex et Will n'étaient pas présents ce jour-là, nous leur avons raconté lors du week-end feu de camp.

La Petite s'endort, sa tête tombe sur l'épaule de son père. Il ne la fera pas sortir, il en est incapable quand elle raconte par quoi Mike et Stan l'ont faite passer.

En remarquant ses lèvres bleues, comme à chaque fois qu'elle parle de la cave ou des clients, j'attrape la couverture dans la niche du meuble et viens la déposer sur elle.

Nous reprenons nos recherches en chuchotant pour la laisser dormir.

Les mecs habiteraient au sud du Mexique. Si nous devons nous rendre là-bas, ça nous fera une bonne distance à parcourir. Ils seraient douze. Je reste sur une hypothèse car on a déjà eu plusieurs fois des mauvaises surprises...

Zach nous envoie des informations sur le cartel. Les mecs commencent par notre transport maritime et prévoient de s'acharner sur la disparition de nos cargaisons qui passent régulièrement la frontière terrestre du Mexique avec les camions. Ils semblent qu'ils n'ont pas attaqué un autre gang que le nôtre pour l'instant. Nous allons surveiller les actualités avec attention ces prochaines semaines.

Les infos arrivent au compte-gouttes et de tous les côtés, ça m'embrouille beaucoup trop.

— Faut changer de méthode les gars, ça va jamais fonctionner. On se concentre à peine sur les Satanists qu'on reparle du cartel. On reprend donc sur le cartel pour relire les anciennes notes que Zach nous envoie du nouveau sur les Satanists. Soit on fait l'un le matin et l'autre l'aprèm soit un jour sur deux mais la méthode actuelle est à chier.

Mes frères haussent un sourcil et des sourires moqueurs apparaissent.

— Le ? Matin ? Je crois avoir mal compris ! se marre Will suivit par les deux autres.

— Vous avez très bien compris ce que je voulais dire !

Ils se marrent et réveillent la Petite par la même occasion.

— Papa ?

— Oui ?

— Je veux pas la garder mais je veux pas la jeter...

Alice parle de sa peluche, personne ne voudrait garder une récompense parce qu'on se faisait violer... néanmoins, je comprends qu'elle veuille la garder. C'est la seule chose qui lui ait appartenu dans son enfance, ça doit être une sorte de repère pour elle.

— Veux-tu que je la garde ? Je la range dans un tiroir de mon bureau et si un jour tu veux la récupérer, tu viens la chercher ?

Elle acquiesce et se renferme d'un coup, son regard s'attriste et mon frère le remarque également.

— Pourquoi es-tu chagrinée ? lui demande-t-il.

Toutes les émotions sont inscrites sur son visage, elle est un livre ouvert. Ça ne fait pas longtemps qu'elle laisse apparaître tous ce qu'elle ressent. La frustration et la peur étaient les seuls lisibles depuis le début.

— Avant que j'aille à l'orphelinat, Mike m'avait laissée ailleurs. Il y avait une autre fille et quand elle dormait il m'a faite sortir par la fenêtre. Elle est restée toute seule là-bas...

Nous échangeons des regards étonnés. Elle n'avait pas encore parlé d'où elle vivait avant d'arriver, à cinq ans, à l'orphelinat. Son psy disait qu'elle se protégeait probablement en enfouissant son passé.

Alice reste silencieuse dans les bras de son père à la recherche de réconfort.

Après quelques minutes écoulées, je me lève et propose à la Petite, les lèvres encore bleues, de venir avec moi pour lui faire un thé bien chaud.

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Ça ne peut qu'être difficile pour Alice 🥺

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Bon mardi à vous ☀️

À jeudi pour le prochain chapitre 😁

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