~Ninety-four

384 35 11
                                    

-"Ravie de te rencontrer, je m'appelle Luna Lovegood."

Luna tendit sa main, et Irène la fixa un instant sans savoir quoi faire avec.

-"Tu es supposée la serrer." Lui murmura l'adolescente avec un sourire mystérieux.

Irène leva sa main, serra la sienne avec peu d'aise.

-"Et toi, comment est-ce que tu t'appelles ?" Demanda Luna en voyant qu'elle était peu loquace.

-"Irène." Répondit-elle vaguement.

Elle ne savait pas où ce fameux Dobby les avait emmenés, mais elles n'étaient visiblement plus chez les Malfoy.

Elle avait laissé Mattheo, encore. Et cette fois-ci, elle n'avait aucune excuse.
Elle ne comprenait pas ce qu'il lui reprochait, il semblait ne pas avoir entièrement compris Draco lorsque ce dernier lui avait expliqué les motifs de son départ précipité, mais ça ne changeait rien.

Elle avait pu le revoir ne serait-ce qu'un bref instant.
Et ça lui suffisait amplement.

                                *****

-"Mets-la dans les cachots."

Mattheo balaya l'air de sa main, sans daigner regarder Pansy qui était restée seule sur le parquet.

-"Hors de question."

Il s'arrêta, fixa Draco qui se tenait face à lui.

-"Pardon ?" Mattheo contracta la mâchoire. "Mettez-le dedans aussi."

-"Matthe-"

-"Ferme-la." Il claqua le dos de sa main qu'il lui tendait. "Tu étais dans le coup, toi aussi. Estime-toi heureux que je ne parle pas à mon père de ta trahison."

-"On l'a fait pour protéger Irène !" S'écria Pansy, perdue. "Pourquoi est-ce que tu réagis comme ça ?"

-"Protéger Irène ? De qui, de moi ?" Hurla-t-il en retour et elle recula son visage, semblant comprendre que quelque chose n'allait pas.

Elle tourna alors le visage vers Draco, qui détourna le regard.

-"Tu ne lui as pas dis." Souffla-t-elle, les yeux agrandis.

Draco ne répondit pas.

-"Maman, monte dans ta chambre."

Le ton suppliant de son fils laissa Narcissa un instant silencieuse.

Puis lentement, elle remonta les escaliers, saisissant qu'ils avaient besoin d'êtres seuls.

-"Qu'est-ce que tu fiches ?" S'énerva Mattheo en l'attrapant par le col.

-"Pansy !"

La porte d'entrée s'ouvrit à la volée et Blaise et Théo firent leur entrée, étant venus passer du temps avec leurs amis.

Blaise s'accroupit près de la jeune femme et fixa ses mains liées sans comprendre, avant de lentement relever la tête vers Mattheo qui fixait Draco sans cligner des yeux.

-"Qu'est-ce que c'est que ça ?" Demanda-t-il faussement perdu. "Pourquoi est-ce qu'elle a des menottes ?"

Il regarda Pansy, semblant refuser tout ce qu'il avait entendu ses derniers jours sur elle et Irène, et préféra jouer à l'ignorant.

-"Je vais te les enlever." Il s'approcha des mains.

-"Ne la touche pas." Entendit-il et Mattheo n'avait pas détourné le regard mais avait levé sa baguette et l'avait pointée sur le garçon.

-"Qu'est-ce que tu fais ?" Théo voulut s'avancer mais il tituba et tomba piteusement sur le sol.

Blaise s'avança pour l'aider à se relever mais de nouveau Mattheo lui ordonna de ne pas bouger.

-"Tu ne connais pas toute l'histoire, Mattheo." Tenta Pansy, toujours assise.

-"Tu as emmené Irène voir Harry Potter, tu nous as trahis. Voilà l'histoire."

-"Tu n'y es pas, ton p-"

-"FERME-LA OU JE TE BUTE, PARKINSON."

Un silence glacial s'empara du rez-de-chaussée du manoir et elle déglutit, les yeux grands ouverts.

-"Mec, Pansy blaguait sûrement. Pas vrai que tu blaguais ? T'étais pas vraiment chez Potter." Blaise se tourna vers elle, empli d'espoir mais cette dernière détourna la tête, n'osant pas croiser son regard.

-"Ton père voulait tuer Irène."

La voix de Draco s'éleva dans la pièce, calme et imposante.

Sans lâcher les yeux de Mattheo près des siens, il lui fit retirer sa main de son col.

-"Parce qu'il estimait qu'elle te gênait, il a demandé à mon père de la tuer. Si elles sont parties, c'était pour la protéger de lui. La protéger de toi."

C'était dur.
C'était froid, c'était blessant mais pourtant c'était la stricte vérité.
Une vérité que Mattheo avait besoin d'entendre.

La baguette du garçon s'abaissa lentement, comme s'il manquait de force, comme si son monde s'écroulait petit à petit, s'effritait jusqu'à complètement disparaître de sa vue, de sa vie.

La protéger de lui.
Non, non, c'était l'inverse, ça devait être l'inverse car après tout c'était elle qui était partie, qui l'avait trompé, l'avait dupé, c'était à lui d'être protégé, c'était elle qui avait fauté.

Qu'était-ce, dans son torse ? Qu'était-ce, ce bruit, cette lourde cacophonie ?

Était-ce son cœur, qui venait de briser ?
Étaient-ce ses poumons, qui venaient de se déchirer ?

Ou bien était-ce son âme, qui venait de se fracturer à tout jamais ?

Il recula d'un pas, défait, vaincu.

-"Tu comprends ?" Continua Draco, enfonçant encore ses mots dans cette douleur vive. "C'est à cause de ton père qu'elle n'est pas là. C'est parce que tu es trop lâche pour préserver ce que tu aimes que tu perds tout, Mattheo."

Il se défoulait, sans doute parce qu'il aurait très bien pu se dire la même chose. Après tout, lui aussi était trop lâche pour avouer qu'il était terrorisé de se savoir dans la même demeure que le sorcier qu'il détestait le plus et qu'il pourtant devait vénérer.

-"Bats-toi, au lieu de battre tout ceux autour de toi." Grinça Draco, les yeux s'humidifiant. "Assume que tu l'aimes et va la protéger toi-même au lieu de détester les autres parce qu'ils le font à ta place ! ARRÊTE D'ÊTRE FAIBLE ET FAIS TES PROPRES CHOIX DRA-"

Il se tut, semblant se rendre compte que son prénom avait faillit sortir seul, et le cœur battant à tout rompre, il abaissa la tête, cherchant de l'air, cherchant un peu de repos pour calmer ses pensées bien trop dangereuses.

Mattheo n'avait même pas remarqué, avait avalé ses paroles comme si elles étaient benites, comme si c'était la vérité pure parce qu'après tout ça l'était.

Il avait tout compris de travers.
Il n'avait rien compris, en fait.

Il se tourna légèrement vers Pansy, dans les bras de Blaise, et Théo, qui sur le parquet se tenait la tête pour tenter de retrouver la raison qu'il semblait avoir perdu.

Mattheo lâcha enfin sa baguette, qui roula sur le sol, seul bruit venant rompre le silence éphémère.

Il avait tout perdu.

Nᴇᴍᴇsɪs [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant