~Sixty-seven

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-"Qu'est-ce que tu fais, Irène ?" 

Irène eut un sourire en relevant la tête vers Pansy qui venait s'asseoir près d'elle dans les dortoirs.

-"Je me documente." Répondit la jeune femme. "Sur l'astrologie."

-"Tu connais déjà tout." Rétorqua Pansy mais Irène nia de la tête.

-"Je suis calée sur l'astronomie, pas sur l'astrologie. L'un des deux premières années aime beaucoup l'astrologie, donc je cherche ce que je pourrais lui enseigner."

-"La semaine est finie, non ? Tu n'as plus besoin de leur faire cours."

-"Ce n'est pas par besoin, c'est par envie." Irène élargit son sourire, adossé à son mur de lit. "J'ai l'impression de servir à quelque chose, lorsque je leur apprends la vie. Ça me fait plaisir."

-"C'est à la petite que tu vas enseigner ça ?"

-"Non, au garçon."

Pansy fronça les sourcils.

-"Celui qui est venu à notre table hier ?"

Irène hocha la tête et Pansy se racla la gorge, soudain mal à l'aise.

-"Je pensais que tu le savais, Irène." Dit-elle alors d'une voix incertaine. "Ce garçon, Raphaël Guedin... Mattheo va l'emmener chez le seigneur des ténèbres."

Et le manuscrit d'Irène retomba le long du lit.

                               *****

-"Mattheo !" Hurla-t-elle de toutes ses forces.

Elle tendit sa main et, abaissant son buste dans sa course, elle attrapa le haut de Raphaël avant de l'attirer jusqu'à elle.

Mattheo se figea, dehors près du pont quittant Poudlard.

-"Qu'est-ce que tu fiches ?" Tiqua le garçon. "Rends-le moi."

-"Laisse-le." Supplia Irène en gardant Raphaël derrière.

Mattheo soupira, se pinçant l'arête du nez.

-"Mon père le veut, je dois le ramener. Ce ne sont pas tes affaires, Irène."

Irène resta droite sur ses appuis, le fixant avec ardeur.

-"Vas-y." Chuchota-t-elle sans se retourner et Raphaël partit en sens inverse à toute allure.

-"Ramène-le !" S'écria Mattheo en tentant de courir pour le rattraper mais Irène l'en empêcha en le rattrapant.

-"On sait tous les deux ce que ton père va lui faire, Mattheo." Tenta Irène en lui attrapant le bras. "Laisse-le partir."

-"Mêle-toi de ce qui te regarde, je dois l'emmener." Grinça-t-il en tentant de se dépêtrer de son emprise.

-"Ce n'est qu'un enfant, Mattheo." Supplia Irène en se tenant à son bras comme à sa propre vie.

Il tenta de passer outre et continua son chemin vers Poudlard, mais Irène continuait de s'accrocher à lui comme un poids, ses pieds glissant sur l'herbe tandis qu'il la traînait avec lui.

-"C'est un enfant que j'aime, Mattheo." Continua désespérément Irène. "Ne lui fais pas de mal."

Sur les nerfs, Mattheo s'arrêta d'un coup avant de la pousser violemment par terre.

Il la fixa de haut, les veines de son cou ressortant de sous sa peau.

-"Tu crois que j'ai le choix ?" Demanda-t-il entre ses dents. "Je dois obéir à mon paternel, Irène. Ne me fais pas de leçons de morale alors que tu n'es pas mieux."

-"Alors tout ce beau discours sur le fait que j'étais pathétique à chercher la reconnaissance de ma mère, c'était du vent ?" Argua calmement Irène en restant allongée dans la poussière. "Tu m'insultes mais derrière tu fais exactement la même chose, Mattheo. La différence, c'est que sur mes mains je n'ai jamais versé de sang."

-"C'est dingue ça, pourquoi est-ce que tu es toujours la seule à t'opposer à moi ?" S'énerva le garçon. "Tu ne comprends pas qui je suis, idiote ? Je suis le fils du seigneur des ténèbres !"

-"Je m'oppose à toi parce que je sais que tu n'es pas comme lui !" S'écria-t-elle en retour. "Je m'oppose à toi parce que je sais ce que tu vaux."

-"Tu dis quand ça t'arrange, évidemment." Se moqua Mattheo en la toisant. "Tu ne comprends pas que si je ne le lui ramène pas, je risque gros ?"

-"Qu'est-ce que tu risques ?" Demanda Irène en se relevant lentement, gardant les yeux dans les siens. "Est-ce que ce risque vaut la vie d'un enfant ? Regarde-moi dans les yeux Mattheo, et dis-moi que tu n'aurais aucun remords à le ramener à ton père."

Il déglutit, sans doute parce qu'il savait pertinemment que devant elle il n'arrivait pas à mentir.

Et elle inspira, sans doute parce qu'elle comprenait ces étranges sentiments qui l'habitaient au fur et à mesure qu'elle parlait.

-"C'est drôle." Murmura-t-elle comme pour elle-même. "Je me rends compte que tout ce que j'essaie de te dire, c'est que tu peux t'affranchir. Et pourtant, je n'arrive pas à le faire moi-même."

Il se tut, la regardant fixement.

-"On ne peut pas s'affranchir du mal." Répondit calmement le garçon comme s'il avait déjà, pourtant, accepté la sentence.

Elle s'approcha lentement et il ne recula pas, regarda sa main se lever pour venir toucher sa cicatrice, sentant ses doigts glacer se réchauffer sur son visage brûlant.

-"Tu as vite déguerpi, ce soir-là." Fit-il remarquer sans arrière-pensée.

-"Je suis désolée." Répondit-elle alors. "Je devais organiser mes pensées."

-"Tu les as organisés, tes pensées ?" Demanda-t-il patiemment.

-"Non." Avoua-t-elle. "Mais c'est peut-être mieux ainsi." Elle eut un sourire mélancolique. "Après tout, nos vies sont catastrophiques, alors c'est mieux que nos têtes le soient aussi."

-"Tu parles beaucoup." Argua le garçon.

-"Je suis bien obligée." Répondit-elle. "Tu n'aimes pas le silence."

Elle en laissa pourtant planer un, leurs visages désormais collés.

-"J'ai une autre mission." Avoua le garçon.

Irène ne dit rien, attendant qu'il continue.

-"Celle-là ne vient pas de mon père, elle vient de moi." Continua l'adolescent.

-"Et c'est quoi, ta mission ?" Souffla Irène.

-"T'avoir."

Les yeux rivés sur les lèvres de la jeune femme, il les aperçut s'étirer.

-"N'était-ce pas toi qui me trouvait pathétique ?" Demanda-t-elle soudainement.

-"Il n'y a que les idiots qui ne changent pas d'avis."

Elle leva les yeux vers les siens, leurs cils se frôlant, et il aperçut ses deux pupilles débordant de tendresse.

Alors il leva ses deux mains, attrapant son visage en coupe, et l'avança vers le sien pour lier leurs lèvres humides.

Et cette fois, Irène répondit à son baiser.

Nᴇᴍᴇsɪs [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant