Nᴇᴍᴇsɪs [TERMINÉ]

~Hundred-one

-"Théo tu as l'air épuisé."

Elle posa sa main sur sa joue mais il la repoussa, mauvais.

Il fixait la porte de la salle commune des Serpentard dans laquelle ils les avaient enfermés, comme de peur que quelqu'un ne vienne les trouver.

-"Mattheo ne nous veut pas de mal, Théo." Dit calmement Irène.

-"Mattheo a tué Blaise."

Cela résonna comme un lourd tambour sur du marbre froid.
Sentant sa gorge s'assécher, Irène tenta de déglutir mais n'arrivait qu'à haleter comme si l'air lui manquait.

-"Mattheo n'aurait jamais fais ça." Réfuta-t-elle immédiatement.

-"Mattheo a tué Blaise et va venir nous trouver, il est à la solde de son père qui va tuer tout le monde, toi, moi, Pansy, Draco, nos parents, mes parents."

Il délirait, se parlait seul, la tête entre les mains.

Irène n'arrivait pas à s'approcher, il s'éloignait chaque fois qu'elle s'y tentait.

-"Théo tu devrais te reposer." Conseilla-t-elle tendrement. "Tu es épuisé, allonge-toi sur les canapés."

-"La guerre ne fait que commencer, ils vont revenir nous chercher Irène, à quel point es-tu sotte pour te laisser berner de la sorte ?" Il se tourna vers elle, la fixant d'un regard noir embrumé.

-"Mattheo ne nous veut pas de mal-"

-"MATTHEO EST UN MANGEMORT !"

-"Toi aussi tu en as reçu la marque." Défendit-elle. "Ça ne fait pas de toi l'un des leurs."

-"J'ai reçu la marque, c'est vrai que j'ai la marque." Il fronça les sourcils, cherchant autour de lui un moyen de faire cesser sa folie. "Il faut que je l'enlève, il faut qu'on me l'enlève."

D'un geste il attrapa sa baguette et Irène recula d'un pas jusqu'à toucher le dos des canapés. Il s'avança jusqu'à elle avec de grandes enjambées et lui tendit son bras.

-"Enlève-la moi."

-"Je ne peux pas faire ça, Théo."

-"Alors arrache-moi le bras."

Elle l'observa, longuement, sans comprendre ce qui avait bien pu se passer, ce qui avait bien pu arriver.
Il avait de grandes cernes noirs qui descendaient jusqu'à ses joues creusées, ses lèvres asséchées et ses cheveux mal coiffés rendaient son allure encore plus dépravée.

Qu'avait-elle manqué, quels signes avant coureur avait-elle oublié ?

Elle était compatissante, le regardait avec un amour que le garçon semblait avoir tant manqué.

-"Théo." Elle posa sa main chaude sur son bras glacé pour le calmer. "Tu n'es pas un Mangemort."

-"Je ne suis pas un Mangemort." Souffla-t-il en gobant ses paroles.

Elles les vit, les lueurs dans son regard qui la suppliait de le sauver de cet instant si misérable qu'il vivait.

Ils l'avaient négligé parce que Theodore Nott avait toujours été un pilier ancré et qu'ils l'avaient naïvement pensé assez fort pour tout encaisser.

Mais Théodore Nott n'était somme toute qu'un enfant comme les autres que la guerre avait forcé à grandir trop vite.
Et au moment où il avait eu le plus besoin d'eux, ses amis s'étaient détournés de lui.

Il semblait n'avoir pas réussi à dormir depuis des décennies.

-"Attention !" Il attrapa Irène et la cacha derrière lui, fixant les fenêtres la baguette levée.

Elle l'observa lui, calmement, tendrement, se demandant si elle aurait pu faire quoi que ce soit pour l'aider.

-"Recule, Mattheo !" Hurla le garçon en fixant le vide. "Recule ou je te tue !"

Mattheo était le fils de Voldemort, Theodore était le fils de ses parents.
Eux qui étaient morts injustement, Théodore ne pouvait s'en prendre qu'à l'enfant au père trop puissant.

-"Il n'y a personne." Dit Irène sans aucun jugement. "Abaisse ta baguette, Théo. Il n'y a personne."

Ce fut comme si son délire s'envolait, ses hallucinations partaient. Il abaissa son bras qui retomba lâche, et se mordit la langue, comprenant que ça n'allait pas.

-"Va te reposer." Proposa Irène en désignant le canapé. "Tu manques de sommeil."

-"Je veux ma maman." Murmura le garçon entre deux sanglots, posant sa tête sur l'épaule de la jeune femme. "Je veux mes parents."

Elle posa sa main sur son dos, le tapotant avec peu d'aise, ne sachant pas quoi faire.

-"Il faut que tu me la ramènes, Irène. Si je m'endors, est-ce que tu iras la chercher pour moi ?"

Non, elle ne pouvait pas. Comment lui dire, comment lui montrer à quel point elle l'aimait alors que lui-même se détestait ?

-"Pourquoi est-ce que tu n'étais pas là ?" Gémit le garçon, sa plainte étouffée sur l'épaule de son amie. "Pourquoi est-ce que tu n'étais pas là pour moi ?"

Elle entendit les tintements des ruines de son coeur qui tombaient tous dans le creux de ses remords noirs.

-"Je suis désolée."

Qu'aurait-elle pu dire d'autres ? Elle n'avait pas été là pour le sauver.

-"Pourquoi est-ce que personne ne s'intéressait à moi ?" Elle entendit la fin de sa phrase se mourir dans sa gorge en un sanglot pathétique. "J'avais besoin de quelqu'un mais personne n'était là."

C'était ça, les maux du cœur, les mots de l'âme, d'une âme qui criait à l'aide mais qui ne recevait que l'écho de ses propres peines.

Obsédés par leurs propres problèmes, ils n'avaient même pas pensé à vérifier que les autres s'en sortaient.

-"Quelqu'un arrive." Murmura soudainement Théo en changeant d'attitude.

Il voulut se relever mais elle le força à rester contre elle.

-"Ce n'est qu'un mirage, Théo." Lui souffla-t-elle en tapotant son dos. "Juste un autre mirage."

-"Non, quelqu'un arrive." Il la poussa pour se préparer mais elle le tira de nouveau.

-"Théo tu devrais aller dormir." Proposa-t-elle en le poussant vers le canapé.

La porte de la salle commune s'ouvrit alors, avec fracas.

Théo se tourna, observa la silhouette sans comprendre, laissant sa baguette retomber sur le parquet, lourde de sens.

-"Maman...?" Laissa-t-il échapper, le voile de son regard s'intensifiant.

Irène n'avait pas l'habitude de crier.
Irène préférait se taire et laisser les choses se faire, c'était sans doute pour ça que sa voix avait toujours été de miel et que ses cordes vocales étaient toutes fraîches.

-"THÉO !" Hurla-t-elle en tendant son bras vers le sien.

-"Avada Kedavra !"

-"Stupefix !"

Le mangemort tomba à la renverse, la porte se refermant derrière lui.

Et le corps sans vie de la salle commune bascula en arrière, se retournant sur le dossier du canapé pour finir par s'écraser sur le tapis.