Chapitre 86 : Atlas.

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LÉANDRE.

          Ça fait plusieurs minutes que je suis face à lui, sans voix. Je ne sais pas vraiment quoi lui répondre, ni même quoi faire. La vérité ? Mais quelle vérité ? Celle que je sais être vraie, ou celle que mon cerveau et mon coeur ont pu penser à l'époque lorsque je voyais Alexis ? J'en sais trop rien. Des milliers d'énigmes émergent dans mon cerveau, venant me rendre la tâche bien plus compliquée qu'elle ne l'était d'ors et déjà.

          Cependant, Antoine ne semble pas prêt à démordre, il reste là, sans bouger. Ses yeux sont toujours encrés en moi, et je peux le voir m'implorer de lui répondre — comme si ses émotions allaient imploser en lui si je ne lui répondais pas. Mes mains deviennent moites, je peux le sentir contre la peau des mes cuisses sur lesquelles elles sont posées.

— Tu comptes me répondre ou bien tu es en train de fabriquer une réponse bidon dans ta tête ? Me demande-t-il, lassé de ma passivité.

          Son ton se veut neutre, mais je peux sentir le pic d'impatience et de colère dedans. Je déglutis, n'arrangeant pas le noeud qui s'était formé dans le fond de ma gorge. Je détourne enfin mes yeux, ne pouvant plus soutenir son regard pesant sur moi. C'est une telle charge à porter, d'avoir tous ces secrets en moi que je n'avais révélé à personne jusqu'aujourd'hui. Pendant toutes ces années, j'étais tel Atlas portant la voûte céleste sur ses épaules pendant toute l'éternité.

Il soupire et se lève du lit, marmonnant des choses incompréhensibles, mais je ne peux que de me douter ce que ces paroles peuvent être : le fruit de son agacement.

— Anto... finis-je par dire, me tournant vers lui.

          Il fait de même, se stoppant dans sa démarche. Son visage est dur, sa mâchoire est contractée comme pas possible, j'ai même l'impression qu'elle est sur le point de se briser. Sa respiration a l'air assez irrégulière, son torse se gonflant plus rapidement que la normale. Il est énervé, et c'est totalement légitime.

— Parle.

          Sec. Dur. Froid. Une intonation de voix que j'ai rarement entendu de lui. Rien que de l'entendre parler ainsi me lance un frisson le long de l'échine.

— Je ne sais pas quoi dire, je-

— Commence peut-être par me dire la vérité, non ? Ah oui, j'avais oublié, t'as énormément de mal avec l'honnêteté depuis que je suis revenu. Ou bien j'avais juste oublié à quel point tu n'étais qu'un putain de mythomane, j'en sais trop rien.

          Aïe. Ses paroles viennent me gifler de plein fouet. Je ne les avais clairement pas vu venir, je ne m'attendais réellement pas à autant de dureté de sa part — bien que je sais qu'il a toutes les raisons de l'être.

— Alexis...

— T'as perdu l'usage de ta langue ou quoi ? Peste-t-il. 

          Je me lève et je me dirige vers lui. Je veux pour prendre sa main dans la mienne mais il ne me laisse pas faire, reculant d'un pas ou deux, lâchant un soupir d'énervement. Il se tourne de nouveau et se dirige vers la porte de la chambre. Au fur et à mesure qu'il s'y approche, je peux sentir mon coeur battre de plus en plus fort, comme si chaque pas qu'il prenait intensifiait mon rythme cardiaque.

— Alexis est le premier mec que j'ai fréquenté ! M'exclamé-je subitement.

          Les paroles sont sorties de moi comme un TGV à toute allure. Je ne les ai pas contrôlées, mais je savais qu'elles devaient sortir de ma bouche si je ne voulais pas tout gâcher en le laissant partir. Il se stoppe une nouvelle fois, mais cette fois, il reste bloqué, ne se tournant pas vers moi. Et, bizarrement, je peux sentir que ma fréquence cardiaque reste tout autant élevée, voire même plus au fil qu'il ne daigne pas faire volteface.

Amour Refoulé - Antoine Griezmann (bxb)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant