Nouveau souffle · Nekfeu

Chapitre 40

Alya

Quand j'ouvre les paupières, tout est obscur. Y a pas un bruit. La lumière de la rue au-dehors filtre très légèrement à travers les fentes des volets, puis à travers les rideaux, pour venir s'écraser sur le parquet au pied du lit.

Et ce tout petit écrin de lumière est suffisant pour me permettre de voir ce qui vient de me réveiller en plein milieu de la nuit. Ou plutôt qui.

C'est une nouveauté. Avant, je savais que si je me réveillais en plein milieu de la nuit, c'était soit parce que Thanos avait besoin d'aide, soit parce que j'avais fait un cauchemar. Sinon j'entends jamais rien, je ne sens jamais rien.

Maintenant, et depuis quelques jours, c'est souvent autre chose qui me réveille. Ken n'arrive pas à dormir. Et encore une fois cette nuit, il a la tête posée sur ma poitrine et la main sur mon ventre. Le fait qu'il soit si proche ne me dérange pas, ça ne m'empêche pas de dormir, il le faisait déjà avant. Ce qui me réveille à chaque fois, c'est quand il se met à pleurer. Et rien que de l'évoquer, ça me tord le cœur à chaque fois.

Tous les soirs, il s'évertue à me dire que c'est seulement du stress, que ça va passer. Moi, la seule chose que je vois, c'est que ça ne passe pas. Encore une fois ce soir, je vois et je sens son corps trembler contre le mien, le plus silencieusement qu'il peut.

- Ken, je murmure en glissant ma main dans ses cheveux éparpillés sur ma poitrine, tu vois bien que ça ne passe pas et je suis pas aveugle, y a pas que du stress.

- Putain pardon, sa voix brisée sonne dans la pièce, je t'ai encore réveillée, il se redresse. J'suis désolé,ses lèvres se posent sur ma peau nue avant qu'il s'installe de l'autre côté du lit, dos à moi.

J'étais déjà inquiète. Je le suis de plus en plus maintenant.

- Ken ? Je glisse ma main dans son dos. Tu comptes me demander en mariage ?

Presque instantanément, il se tourne vers moi. Je savais que ma question allait être assez étrange pour qu'il accepte de me laisser voir son visage. Visage qu'il cache tous les soirs pour pas que je ne le vois pleurer. Et ses yeux rouges, ses joues trempées, je les vois très bien maintenant.

- Ouais, il fronce les sourcils, bien sûr que oui Lya.

- Alors qu'est-ce que tu fais ? Je caresse doucement la peau de son torse. Qu'est-ce que tu fais tout seul dans ton coin du lit ? Qu'est-ce que tu fais à pleurer seul sans venir vers moi, sans me dire ce qui ne va pas ? Ken, je suis là pour ça.

Les yeux rivés dans les miens, j'espère que j'arrive à lui montrer que peu importe ce qu'il se passe réellement, il peut m'en parler.

- T'as d'autres trucs à gérer, il finit par baisser les yeux. C'est juste le genre de trucs qui m'arrivent de temps en temps, je te l'ai jamais dit mais..., je l'arrête en glissant ma main dans sa barbe.

- Je sais déjà, je lui souris. Je passe la moitié de mon temps libre avec Lili, tu crois qu'elle, elle n'a pas remarqué ? Tu crois qu'elle ne m'en a pas parlé ?

- Lya, ses joues s'humidifient, je voulais pas te l'imposer, c'est compliqué à gérer quand ça arrive.

- Mais enfin, je fronce les sourcils, Ken je suis là pour toi comme tu l'es pour moi. Tu crois pas que mes crises d'angoisse sont difficiles à gérer ? Mes cauchemars aussi ? Pourtant, tu es toujours là à me parler doucement jusqu'à ce que ça passe, tu m'écoutes te raconter tout ce que j'ai envie de raconter sans jamais me couper la parole, avec un regard toujours bienveillant. J'ai pas le droit de faire la même chose ? Ken, je veux, ça me fait juste mal de te voir comme ça. Et ça fait mal aussi qu'en un an et demi, tu ne m'en aies pas parlé.