Ken
J'ai dû m'arrêter à une station essence. Encore. Pas pour faire le plein nan, juste pour respirer deux secondes. Parce que ça fait deux mois que je respire plus aussi bien qu'avant. Deux mois. Deux mois que je me bats avec moi-même pour ne pas désespérer, pour ne pas abandonner.
J'ai besoin de faire des pauses pour respirer. Souvent. Pour essayer juste pendant deux secondes d'effacer leurs deux visages de mon esprit. Juste deux secondes. Ils me quittent jamais. Je peux aller nulle part sans penser à eux, je peux rien faire sans penser à eux, je peux rien dire sans penser à eux. Tout me ramène à eux. Lya, Thanos. Inspirer, expirer.
Je crois bien que je suis devenu fou entre-temps. C'est ce que je lis dans le regard des gens quand je parle d'un énième endroit où ils pourraient être, d'une énième personne qui pourrait avoir des informations à me donner. Tout le monde pense que je suis devenu taré. Après deux mois, le pauvre Ken a toujours pas compris que ça servait à rien de les chercher. Soi-disant qu'une personne qui n'a pas envie qu'on la retrouve, on la retrouve jamais.
Ce que toutes ces personnes n'ont pas compris, c'est que je vis pas sans eux. Je vis pas sans Lya, je vis pas sans Thanos, je survis juste. Et à peine. Je dors presque plus, le médecin a doublé mes doses, j'arrive plus à aligner deux mots sur une page blanche, j'ai presque jamais faim et la liste pourrait encore s'allonger.
Je survis juste. Alors ouais, je passe mon temps à chercher. Et j'arrêterai pas tant que j'aurais pas serré mon fils dans mes bras. Mon fils. Suffit d'une pensée pour que ses petites boucles viennent hanter mon esprit, pour que je voie ses grands yeux marron me fixer, pour sentir sa joue contre mon torse. Mon fils. Personne ne m'a jamais autant manqué. Personne. C'est atroce. J'ai l'impression que quelqu'un me vide de mon sang, veine par veine, depuis des jours et des jours. Sans arrêt.
Mon fils bordel, mon fils. Ses yeux c'est les miens, son sourire c'est le mien, son rire c'est le mien. Thanos, c'est le mien. Mon fils. Pas celui de Baptiste, le mien. On se ressemble juste pas par hasard comme je l'ai toujours cru nan, on se ressemble parce que je suis son daron.
Je crois que c'est un des pires trucs. Savoir que pendant tout ce temps, j'aurais pu être au courant, profiter de chaque seconde avec lui, lui répéter des milliards de fois qu'en plus d'être son papa de cœur, je suis son papa tout court. Je suis son papa en entier, du début jusqu'à la fin. Et bordel Thanos, si tu m'entends de là où t'es, je te lâcherai plus jamais. À partir du moment où je pourrais à nouveau te tenir dans mes bras jusqu'au jour de ma mort, je te lâcherai plus.
Je donnerai tout pour le tenir juste une fois de plus, même à peine dix secondes, juste le temps de lui chuchoter à l'oreille tous les trucs que je rêve de lui dire depuis deux mois. Et la liste est longue, beaucoup trop longue.
Et y a pas que lui. Y a sa mère aussi. Ma Lya, ses jolies boucles, sa douceur et son sourire. J'aurais dû le comprendre dès le départ. Que c'était elle, que ça avait toujours été elle et que ce serait toujours elle. Dès le moment où elle a défait son chignon devant la chapelle et que ses boucles sont tombées en cascade dans son dos, j'aurais dû comprendre.
Y a pas une seconde qui passe sans que je me demande ce qui lui passe par la tête, sans que je me demande à quel point je lui ai fait mal mais surtout si elle acceptera un jour de revenir près de moi. Parce que retrouver Thanos seul, c'est déjà bien mieux mais c'est pas ce que je veux. Ce que je veux c'est qu'elle voit que tous les trois, on peut redevenir la petite famille qu'on était avant, qu'elle voit que je peux réellement être le père de ses enfants. Je le suis déjà mais j'insiste sur le pluriel. J'ai raté sa première grossesse, je raterai pas les suivantes.
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Nouveau souffle · Nekfeu
FanficDeux mois. Deux mois d'absence, deux mois de manque, deux mois de questions. Deux mois. C'est long deux mois, surtout quand on perd sa raison de respirer. Alya a des questions, Ken des réponses. La seule chose dont les deux ont besoin, c'est d'un n...