Chapitre 28

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Ken

La tête encore dans le cul, je remplis ma tasse de café à ras-bord. Je crois que j'en ai besoin, salement. Je sais pas depuis combien de temps j'ai pas vécu seul dans mon appartement, un peu plus d'un an sûrement. Ça sonne faux, ça sonne faux alors que théoriquement, je suis chez moi. J'ai tout plaqué à l'époque pour me l'acheter, mon propre appart d'une taille acceptable dans le quinzième.

C'était peut-être mon rêve à l'époque, mais maintenant, c'est comme s'il était incomplet, qu'il me manquait des passages. Et j'ai pas besoin de me poser trop de questions, je peux citer précisément ce qu'il manque, même faire une liste exhaustive : le tabouret de Thanos devant le lavabo, le petit tas de chouchous sur mon chevet, la petite enceinte d'Alya sur le montant de la douche, des figurines Naruto au sol, les Tupperwares pleins de salades variées dans le frigo. Et j'en passe. Beaucoup.

On est rentrés hier. J'ai plus l'impression que ça fait six mois. J'ai mal dormi, j'ai pensé à elle toute la nuit. Les derniers jours au Japon, c'était un genre de petit nuage. Je me suis presque tous les soirs endormi sur le siège à côté de son lit pour me réveiller avec elle le matin, on a passé nos soirées à parler, nos après-midis à découvrir des trucs de tarés avec Thanos.

Sauf qu'il fallait que ça se finisse, Thanos va à l'école, Alya au travail. Et moi, je suis dans mon appart à attendre qu'il soit enfin l'heure de les rejoindre pour que j'emmène Tan à l'école, pour que je puisse la voir elle même juste cinq minutes. Ça fait trois heures que je suis comme un junkie à tourner dans la salle de bain pour essayer quinze t-shirts différents, quinze façons différentes d'attacher mes cheveux.

Je veux qu'elle me trouve beau. Je veux débarquer sur le seuil et que ses joues rougissent. Je veux qu'elle ait envie de m'embrasser comme elle l'a fait ces derniers jours.

Mais le retour sur Paris c'est bien plus que ça. C'était cool que tout aille bien au Japon mais c'était que des vacances. Ce qu'Alya veut voir, c'est où on va réellement au quotidien, tous les deux. Ça commence aujourd'hui. Je vais lui montrer que je peux gérer Thanos, que je peux lui donner toute l'attention, tout l'amour dont elle a besoin et que je peux le faire sur le long terme.

C'est pour lui prouver tout ça que je me suis levé ce matin, que je me suis douché, rasé, coiffé, habillé. C'est plus qu'une question de temps avant que je puisse l'avoir dans mes bras pour de bon. Alors que je réarrange mes cheveux pour ce qu'il me semble être la millième fois, l'alarme que j'ai foutu sur le bordel de Google là, sonne dans tout l'appart.

- Ferme ta gueule wesh ! Je crie.

Sauf qu'elle continue. Fort, très fort.

- Putain, je soupire. C'était quel genre d'idée d'acheter ce bordel ?

La mâchoire tendue, je m'approche du machin.

- Tais-toi, je tapote le dessus, j'croyais que tu captais le français ? C'est pas assez clair tais-toi ?

Apparemment nan vu qu'elle continue sa petite musique bien chiante.

- Ok Google, stop, la voix de ma sœur résonne dans le salon.

Et le machin se tait. Enfin. Derrière moi, Nessy me détaille de haut en bas, un sourire narquois sur le visage.

- Et après tout le monde dit que t'es le plus intelligent de nous deux, elle soupire. J'aurais dû filmer, c'était extraordinaire. On aurait dit que tu parlais à un chiot.

- C'est ça, je bougonne en observant la machine du démon du coin de l'œil. C'était stop qu'il fallait dire alors ?

- Ok Google surtout, ma sœur chuchote en rigolant. Sinon, elle peut pas savoir que tu lui parles à elle.

Nouveau souffle · NekfeuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant