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Samedi 17 juin 2024 – Tampa - Floride

Il s'avance d'un pas déterminé, son regard intense fixé sur le mien. Je sens une légère tension dans l'air, une électricité palpable entre nous, comme souvent ces derniers temps. Alec s'arrête à quelques pas, me scrutant comme s'il cherchait quelque chose dans mes yeux.

— Salut, dit-il d'une voix calme, mais son regard trahit une certaine hésitation.

— Salut, réponds-je, ma voix un peu plus froide que je ne l'aurais voulu.

Le silence s'installe entre nous, lourd de non-dits. Nous sommes là, au milieu de la salle, entourés par l'effervescence des autres athlètes qui s'échauffent. Je peux sentir le poids de son regard sur moi, mais je résiste à l'envie de détourner les yeux.

Finalement, il brise le silence.

— Écoute, je sais que ça a été difficile dernièrement, mais je voulais m'excuser. Je n'aurais pas dû agir de cette façon.

Je reste silencieuse un instant, pesant ses paroles. Un soupir s'échappe de mes lèvres avant que je ne réponde.

— Les excuses ne changent pas le passé, Alec.

Il acquiesce légèrement, semblant accepter ma réponse. Pourtant, quelque chose dans ses yeux trahit une détermination nouvelle. Il est clair qu'il ne compte pas abandonner facilement.

— Je ne savais pas que tu venais aujourd'hui.

— Tu l'aurais su si tu n'avais pas déserté la maison pendant une semaine dans le seul but de m'éviter. Eden va finir en dépression s'il ne te voit pas bientôt.

Je glisse une pointe d'humour pour adoucir ma remarque, mais le message est là. Il a disparu pendant une semaine.

— Je... Je ne t'évitais pas. J'avais un dossier urgent à traiter et...

— Oui bien sûr, j'imagine que coucher avec ta secrétaire peut être qualifiée de « dossier urgent ».

Ma voix est piquante. Je ricane pour adoucir mon ton, mais au fond de moi, l'amertume persiste. J'ai entendu, pas plus tard qu'hier soir, Eden et Ezra parler de l'aventure du brun avec cette dernière, la qualifiant de « canon ». Alec semble légèrement gêné.

— Je...

— Non Alec, c'est bon pas besoin de te justifier. Tu as dit que tu ne m'évitais pas, je te crois, ce que tu fais de ton temps libre ou au boulot ne me regarde pas.

Bien entendue que je ne le crois pas, mais ça serait hypocrite de ma part de faire une scène quant à sa grande implication professionnelle alors que je lui reproche de trop s'immiscer dans ma vie. Et puis, soyons honnêtes, je n'ai aucun droit d'être jalouse. Ce n'est pas comme si nous partagions quelque chose. Il hoche la tête et s'apprête à parler, mais je le coupe, souhaitant mettre fin à cette discussion inutile.

— Pas que je ne t'aime pas, mais on m'attend.

Je ne lui laisse pas l'occasion de protester malgré son visage qui s'obscurcit et file au fond de la salle où j'ai enfin repéré Marco. Ce dernier me prend dans ses bras pour me saluer.

— Te voilà ! Et ton pseudo frère pas jaloux aussi à ce que je vois.

Il rigole face à mon air excédé vis à vis de ses sous-entendus. Je jette un regard à Alec. S'il est énervé, son visage ne trahit aucune émotion. Seuls ses poings serrés laissent percevoir sa tension. Je souris à Marco qui me désigne le ring. Je hoche la tête avant de suivre le boxeur.

— N'y va pas trop fort, je ne me suis pas échauffée.

Il acquiesce respectueusement, comprenant l'importance de l'échauffement.

Mes doigts s'enfoncent dans les gants, formant un cocon protecteur autour de mes mains. Le combat débute, une danse d'échanges contrôlés au départ, mais l'intensité monte rapidement. Cependant, je me retrouve inévitablement pressée contre le torse puissant de Marco, ses mains expertes trouvant leur place dans mon dos. Après tout, il est un boxeur professionnel, et la proximité physique est inévitable dans cet art.

— Je crois que cette manche est pour moi, ma belle, murmure-t-il, un sourire taquin aux lèvres.

Ses doigts chatouillent ma peau, provoquant un rire spontané de ma part. Mes yeux rencontrent le regard sombre d'Alec, notre récente dispute encore perceptible dans son expression figée. Cependant, Marco, insouciant, n'y prête pas attention.

— Et après tu me dis qu'il n'est pas jaloux ? Ouvre tes yeux Swan, ce regard n'est clairement pas celui d'un frère protecteur envers sa petite sœur.

Je m'éloigne légèrement de Marco, secouant la tête pour signifier que je ne veux pas envenimer les choses, ni même en parler. Cependant, Alec reste immobile, fixant notre duo avec un mécontentement évident. Marco m'abandonne quand un des boxeurs présents dans la salle l'appelle. Je descends à mon tour du ring pour me diriger vers le banc, cherchant une échappatoire à cette atmosphère tendue.

J'attrape une bouteille d'eau et me perds dans mes pensées, ignorant le regard sévère d'Alec. Mes pensées comptent rapidement, et avant même de terminer, la voix d'Hadès retentit, sarcastique et teintée de ressentiment.

— La prochaine fois, baisez sur le ring aussi.

— 23 secondes, je suis presque déçue.

Il semble perdu face à ma remarque.

— Que... quoi 23 secondes ?

— 23 secondes, c'est le temps que tu as mis avant de redevenir un gros con. Ce n'est pas comme si tu venais de t'excuser.

Un homme à proximité de nous pouffe de rire. Je range la bouteille et me dirige vers le sac de frappe, laissant Alec planté devant le banc. Les premiers impacts résonnent, ponctuant le silence tendu entre nous.

— Amis, hein ? il crache.

— Amis, oui.

— Tu crois vraiment que je vais gober qu'il veut juste être ton ami ? C'est un mec, Swan. Tu sais très bien ce que ça implique, il tonne d'une voix rauque.

— Tu veux un scoop Alec ? Tous les mecs ne sont pas des connards comme toi, à s'intéresser à une fille uniquement pour la sauter.

Le silence qui suit est chargé de ressentiment et de colère. Le conflit est ouvert.

— Tu crois vraiment ça ? Tu vois c'est ça ton problème, tu es trop naïve. Les gens ne sont pas tous animés par de nobles intentions et certainement pas ce type !

Je choisis le mutisme, préférant me concentrer sur les coups assénés au sac. Et si par mégarde le sac pouvait lui rebondir dans la gueule, ça serait un bonus fort appréciable. Le brun ne se décourage pas pour autant.

— Ils te tripotent tous comme ça, tes amis ? Tu lui as déjà piqué un tee-shirt à lui aussi ?

La patience, doucement, fait place à l'exaspération, mais je retiens mes mots. Laissons-le s'emporter seul dans ce dédale de conneries. Marco nous observe de loin, ignorant probablement le contenu de notre échange, bien que son regard trahisse son intérêt.

— Non, vraiment, si c'est ainsi que tu définis l'amitié...

— Ôte-moi d'un doute, nous avons déjà dormi ensemble, n'est-ce pas ?

— Euh, oui...

— Et nous sommes amis ?

Je le vois tiquer à l'entente de ma question, mais il finit par hocher la tête, curieux de la suite.

— Tu m'as vu en sous-vêtement il n'y pas plus tard que samedi dernier. Tu m'as déjà embrassé sur la joue et tu m'as déjà serré dans tes bras. Donc si je suis ton raisonnement, toi aussi tu veux me baiser ?

Je crois qu'il vient de subir un choc. Moi aussi, d'ailleurs, je suis sur le point de faire une crise cardiaque. Je ne sais pas pourquoi j'ai dit ça, mon cerveau semble avoir fait une pause soudaine. Profitant de son absence de réaction, je m'échappe rapidement. Attrapant mes affaires, mes pieds me guident instinctivement hors de la salle, tandis que l'écho de mes propres paroles résonne dans ma tête.

Liens interdits : entre cœurs et amitiéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant