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Mercredi 5 juillet 2023 – Tampa – Floride

Je sors à peine du building que deux bras forts me poussent contre le mur, m'entourant d'un torse au parfum salin. Il ne se lasse jamais de barrer mon chemin, celui-là ? À bout de nerfs, je le frappe sur le torse avec frustration.

— Mais lâche-moi ! J'en ai assez de toi, de tes accès de colère et de cette maudite gueule de dieu grec à la con ! Tu es satisfait, tu as obtenu ce que tu voulais, non ? Alors maintenant, dégage ! je hurle.

— Une gueule de dieu grec hein ?

Son sourire en coin, qui d'ordinaire me fait chavirer, me donne envie de lui éclater la tête contre le mur.

— Je rêve ! Tu retiens que ça de ce que j'ai dit ?

— T'as fini ? il demande en souriant.

— Non ! J'ai juste envie de te... Ah, je te déteste, Alec. Tu penses que tout t'est permis, mais bon sang, je ne suis pas ta propriété. Je fais ce que je veux. Est-ce que je t'embête, moi ? Non, alors pourquoi tu compliques ma vie, hein ? je crie à nouveau, incapable de me calmer.

— Je n'ai pas couché avec elle, il lâche.

— Tu oses me faire la morale alors... quoi ?

Je m'immobilise en entendant ses paroles. Bien que je sois consciente que cela ne devrait rien changer, mon agacement diminue nettement alors qu'il répète qu'il n'a pas couché avec elle. Cependant, je ne suis pas folle, c'est bien ce qu'il a affirmé à mes frères. Mes sourcils se froncent d'incompréhension, probablement l'encourageant à poursuivre.

— Tes frères savent pertinemment que je n'ai pas couché avec elle, mais va savoir pourquoi aujourd'hui Eden a décidé de dire de la merde. Si t'avais écouté toute ma réponse, t'aurais compris que je n'avais rien fait . Écoute, Swan, je ne devrais pas être jaloux. Je le sais. Je pensais qu'une fois que nous aurions... je pensais que ça passerait. Mais c'est encore pire maintenant. Sachant ce qui se cache sous cette maudite robe, j'ai constamment envie de toi. Rien que d'imaginer que tu pourrais penser à quelqu'un d'autre me rend fou. Si je n'étais pas venu, j'aurais probablement retourné le salon.

Je prends en pleine figure ses paroles. Mon cœur bat la chamade, et les papillons dans mon estomac évoluent en une sorte d'oiseaux mutants, pire que des Pokémon. Normalement, je devrais être furieuse contre lui, agacée par le fait qu'il entrave ma vie, qu'il me fasse subir ses crises. Pourtant, je me retrouve à réagir comme une enfant à qui l'on annonce une visite chez le père Noël. J'essaie de dissimuler mon sourire, mais en moi, c'est un feu d'artifice du 4 juillet.

Je sais que cela peut sembler idiot, il n'a rien déclaré d'extraordinaire, rien sur le fait qu'il veut plus, mais pour moi, c'est déjà une victoire. Il ne parvient pas à m'effacer de sa vie aussi facilement qu'il le fait avec les autres. Bien sûr, je suis consciente que notre proximité y joue un rôle, il est toujours plus difficile de ne pas replonger avec quelqu'un que l'on voit quotidiennement. Cependant, même en tenant compte de cela, je ne peux m'empêcher de ressentir un certain triomphe. Évidemment, je ne peux pas simplement me jeter dans ses bras et oublier tout. Ce serait trop simple. D'accord, il a envie de moi, d'accord, il est jaloux, mais où tout cela nous mène-t-il ?

— D'accord. Mais si tu avais un tant soit peu confiance en moi, tu ne serais pas venue ! Je n'étais pas là pour coucher avec lui, mais pour passer une soirée avec un ami après avoir encaissé le fait que tu venais de t'enfiler ta greluche ! je m'exclame.

— Je te fais confiance ! C'est juste que je ne supporte pas l'idée que tu traines avec un mec !

— Et alors ? Je suis censée faire quoi ? Arrêter de vivre jusqu'à ce que tu te lasses de nos parties de jambe en l'air ? Qu'attends-tu de moi ? Qu'est-ce qu'on est nous deux ? je questionne avec sarcasme.

Il est évident que je ne lui facilite pas la tâche, et je perçois qu'il fait des efforts pour se contenir. Cependant, au fond, je me demande bien ce qu'il attend de moi, de nous. Je suis disposée à faire des compromis, mais il doit également être prêt à en faire, à avoir une vision claire de ce qu'il souhaite. Je détourne le regard, sachant pertinemment que ses yeux pourraient facilement me faire flancher.

— Je ne sais pas, d'accord ? Je n'en ai aucune idée. Tu crois que c'est facile pour moi ? Je menais une vie tranquille, puis tu réapparais et tout part en vrille avec ton visage d'ange, tes fossettes irrésistibles, ton rire envoûtant, tes blagues nulles, ton corps de déesse, et tes sourires agaçants. Tu me rends dingue, alors que j'avais réussi à te chasser de ma tête pendant 5 ans !

Lorsqu'il mentionne que cela fait aussi longtemps que moi qu'il ressent une attirance pour moi, cela me prend de court, je l'admets. Je n'aurais jamais imaginé que c'était le cas. Son comportement n'a jamais laissé transparaître un quelconque intérêt amoureux. Même si je peux maintenant comprendre, dans une certaine mesure, ses réactions passées lorsque j'étais adolescente, cela ne signifie pas que je vais lui permettre de rejeter cette histoire sur moi.

— Mais, sérieusement, tu t'entends ? Tu m'accuses de quoi, là ? À t'écouter, on dirait que c'est moi qui suis venue vers toi. Mais bon sang, c'est toi qui es venu me chercher, c'est toi qui ne supportes pas de me voir avec un autre. Alors oui, j'ai le droit de te demander ce que tu veux, Alec.

— Tu aurais pu me repousser, bon sang ! il s'exclame.

Il tire sur ses cheveux en faisant les cent pas. On marche sur la tête.

— Et cela aurait changé quoi ? Tu veux me faire croire que si je t'avais envoyé balader ce soir-là, tu aurais arrêté d'être jaloux comme ça ? Tu aurais laissé tomber ?

— Je... non, mais ça aurait été plus simple pour me faire une raison.

— Donc, tu vas me reprocher d'avoir cédé ? Incroyable... Tu veux peut-être que je m'excuse aussi ?

Il se fout de moi ?

— Swan...

— Non Alec. Juste ça suffit. Tu veux que je te dise ? Je ne vais certainement pas m'excuser d'avoir cédé à tes avances ni d'avoir « foutu en l'air ta petite vie tranquille ». Je n'ai rien à me reprocher dans cette histoire. Je n'ai rien fait, absolument rien, si ce n'est te dire oui. Je ne t'ai jamais dragué, je ne t'ai jamais aguiché, je ne t'ai même jamais rien dit qui aurait pu laisser deviner que j'étais folle de toi pendant tout ce temps.

Sa bouche s'ouvre pour parler, mais je ne lui en laisse pas le temps.

— J'ai fait taire mes sentiments pour toi. J'ai gardé le silence alors que je te voyais avec une fille différente chaque semaine. Je ne disais rien alors que je t'entendais parler de tes conquêtes alors que, merde, ça me détruisait un peu plus à chaque fois. Alors, non, je ne vais pas m'excuser.

Il ne parle plus, figé par mes paroles.

— Si on est dans cette situation aujourd'hui, c'est entièrement ta faute Alec. C'est toi qui m'as dragué, qui es jaloux, qui m'as dit avoir envie de moi. Et c'est encore toi qui es revenu sous ma foutue douche le lendemain. Encore aujourd'hui, c'est toi qui es venu me chercher. Ma seule erreur a été de céder. Alors, essaie de te remettre en question, ou plutôt, de te poser les bonnes questions. Qu'est-ce que tu veux, finalement ? Un coup d'un soir ? Un plan cul ? Une amie avec bénéfices ? Une petite amie ? Tant que tu ne sauras pas ce que tu veux, reste loin de moi, arrête d'interférer dans ma vie, et moi, je m'éloigne de la tienne. Peut-être que tu pourras ainsi retrouver ta petite vie tranquille.

Vu son visage crispé et ses yeux noirs, je peux affirmer que mon petit monologue ne lui plaît pas du tout.

Liens interdits : entre cœurs et amitiéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant