Samedi 22 juillet 2023 - Paris
Mon téléphone éteint sur la table basse du salon, je suis assise sur le canapé, la tête entre mes mains. Je suis totalement nue, mais cela m'importe peu. En cet instant, la seule chose que je ressens est le poids écrasant de la culpabilité.
Je n'ai pas pu retourner me coucher aux côtés de Noah. Le voir dans son lit, paisible, un sourire flottant sur ses lèvres dans son sommeil, m'a fait prendre conscience à quel point je suis devenue une personne horrible.
Quand tout a-t-il basculé ? Depuis quand suis-je devenue cette fille mesquine ? Non seulement j'utilise Noah pour tenter d'oublier celui qui occupe réellement mon cœur, mais en plus, je m'en sers pour rendre jaloux un homme qui ne me donne pas la même importance que celle que je lui accorde dans ma vie.
Je me trouve dans cet appartement, celui d'un homme en or, mais mes pensées sont hantées par Alec. Impossible, je suis totalement incapable de l'effacer de mon esprit et de mon cœur. Il est ancré en moi comme un tatouage indélébile, il a marqué mon cœur au fer rouge, et je suis désormais certaine que rien ni personne ne pourra jamais le remplacer, peu importe ce que je peux faire.
On dit souvent que le temps apaise toutes les blessures, mais sera-t-il capable d'effacer le poison qui coule dans mes veines à cause de cet amour si destructeur ?
Je ne sais pas exactement combien de temps je reste sur ce canapé, les joues baignées de larmes silencieuses. Il est temps pour moi de partir d'ici, je ne peux pas rester là et attendre le réveil de Noah. Affronter son regard serait impossible après ce que j'ai fait.
Je ramasse mes affaires éparpillées au sol depuis la veille et me rhabille sans faire de bruit. Sur le comptoir de la cuisine, je laisse un mot à Noah pour lui annoncer mon départ, incapable de trouver d'excuse valable, je n'ajoute rien de plus.
Mon esprit est obsédé par Alec pendant tout le trajet en métro jusque chez moi.
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Je n'ai rien fait du week-end, absorbée par mes pensées concernant Alec. Bien entendu, j'ai rallumé mon téléphone, et quelle ne fut pas ma surprise en découvrant que je n'avais reçu aucune réponse, aucun message d'insulte de la part d'Hadès suite à ma provocation puérile. Ce constat m'a encore plus plongée dans la déprime. Ironique, n'est-ce pas ? Je ne supporte pas ses accès de colère et de jalousie, mais son silence m'est encore plus insupportable. Peut-être parce que ces réactions disproportionnées sont les seules choses qui donnent à mon cœur une lueur d'espoir...
Noah m'a bien sûr appelée dès qu'il a réalisé mon absence au réveil. J'avoue avoir été lâche en lui donnant une excuse totalement bidon et embarrassante : « Mes règles sont arrivées en avance, je devais rentrer de peur de repeindre ton parquet en rouge. ».
Il a beaucoup ri tandis que de mon côté j'avais plutôt envie de disparaitre sous terre à cause de mon mensonge éhonté. Malgré sa gentille proposition de me rendre visite dimanche pour me fournir, selon ses propres termes, « Le kit de survie de la période menstruelle féminine », j'ai décliné.
En réalité, je l'évite purement et simplement. Moi qui qualifiais Alec de lâche, je me rends compte que je ne suis pas meilleure que lui.
Lundi 24 juillet 2023 - Paris
Je n'ai pas le luxe de me laisser aller à mes remords, car aujourd'hui c'est lundi, il est dix-sept heures et j'ai mon entretien chez L'Oréal.
Drapée dans une élégante robe portefeuille noire, accompagnée de bottines assorties, je resserre ma haute queue de cheval et franchis les portes du bâtiment.
Si l'extérieur était déjà impressionnant, je suis totalement émerveillée par l'intérieur. Tout est habillé de blanc, à l'exception du parquet gris. Un petit arbre trône au milieu du hall. Des canapés, des poufs colorés ainsi que des tables hautes sont disposés stratégiquement. Un large escalier en bois mène à l'étage. Un imposant bureau circulaire occupe le centre de l'espace. Plusieurs secrétaires, tout droit sorties d'un magazine de mode, sont assises derrière, affichant des sourires chaleureux et joviaux.
Je me rends au bureau et me présente. Après avoir tapoté quelques instants sur son ordinateur, elle me fait signe de patienter. Je déteste cette période d'attente où tous les scénarios catastrophiques me traversent l'esprit. Et si je trébuche en me levant ? Et si j'éternue et me retrouve avec de la morve partout ? Ou pire, si je perds complètement mes mots ? Je ne sais même pas si l'entretien se déroulera en français ou en anglais.
Après une attente interminable, une femme brune d'une quarantaine d'années, au maquillage parfait, se présente devant moi. Je me lève rapidement et lui offre un sourire chaleureux alors qu'elle me tend la main.
— Bonjour, Mademoiselle Nelson, je suis Elise Ducret, Directrice marketing de L'Oréal France, se présente-t-elle en français. Vous avez eu des échanges avec Blandine, notre DRH, qui m'a vivement recommandé votre profil.
Bien, cela confirme que l'entretien se déroulera dans sa langue maternelle.
— Ravie de vous rencontrer, réponds-je simplement.
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Après une heure et demie d'entretien, je sors du bâtiment, épuisée. Avant même que je puisse reprendre mes esprits, des bras forts m'entourent par-derrière et un baiser est déposé sur mon cou.
— Salut joli cœur, murmure Noah dans mon oreille.
Je ris doucement en entendant ce surnom et me retourne pour lui faire face. Ses dents blanches brillent alors que la culpabilité me submerge intensément. Je tente de la dissimuler derrière un sourire. Malgré mon inconfort évident, je suis heureuse de le voir. Je n'ai pas pu refuser sa demande quand il a suggéré qu'il m'attendrait à la sortie de cet entretien.
— Alors, tu es le nouveau visage du marketing digital chez L'Oréal ? me demande-t-il en prenant ma main.
— Ne soyons pas trop ambitieux, mais... oui, ils m'ont officiellement offert le poste ! déclaré-je fièrement, le sourire aux lèvres.
Elise a été très sympathique, bien qu'elle m'ait clairement fait comprendre que cette offre n'était pas éternelle et qu'elle attendait beaucoup de ma part. Étant fraîchement diplômée et dépourvue d'une réelle expérience professionnelle dans ce domaine, je dois maintenant prouver ma valeur.
Je dois lui donner ma réponse d'ici la fin de la semaine prochaine, sans réponse de ma part, elle offrira le poste à un autre candidat. Je suis toujours autant perdue, mais, je dois reconnaître qu'une occasion comme celle-ci n'est pas censée se refuser.
— C'est génial ! Je suis fière de toi America ! il me félicite en me faisant tournoyer dans les airs.
Je rigole à gorge déployée alors que les passants nous observent étrangement.
— Je t'embarque avec moi, on va fêter ça ! il s'exclame joyeux.
— Mais on est lundi ! je riposte.
— Et ? Tu es en vacances et je ne bosse qu'à onze heures demain ! il contre argumente.
Sur ce coup-là, il n'a pas tort, rien ne m'empêche de sortir ce soir et je n'ai pas d'excuse pour décliner l'invitation. Je finis par capituler et il me traine dans le métro le plus proche.
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Liens interdits : entre cœurs et amitié
RomanceDepuis son enfance, Swan baigne dans l'étreinte chaleureuse de ses deux frères, un duo qui, telle une forteresse, l'a longtemps préservée des blessures que peuvent infliger les relations amoureuses et charnelles. Cependant, ils n'avaient pas prévu q...