Mercredi 5 juillet 2023 – Tampa – Floride
Épuisée par ma déclaration impromptue, je réalise que j'ai laissé échapper des mots que je ne voulais pas exprimer de cette façon, du moins pas aussi brutalement. L'idée de révéler mes sentiments longtemps dissimulés envers lui ne faisait pas partie de mes plans.
Face à son silence, je tente de reprendre contenance et regagne ma voiture. Les regards curieux des spectateurs depuis leurs fenêtres m'informent que nous avons offert un spectacle.
L'idée de me rendre chez June me traverse l'esprit. J'ai un besoin urgent de me confier, sachant qu'elle sera là pour moi, sans jugement. Jetant un dernier regard à Alec, toujours immobile, je prends la décision de partir.
June ouvre la porte, et je m'effondre littéralement sur son canapé. Depuis le début de ses études, elle vit seule, et son petit appartement est parfait. L'atmosphère y est incroyablement accueillante, grâce à sa décoration exceptionnelle. Mes yeux parcourent les photos qui ornent les murs, révélant son talent inné pour la photographie.
— Bon, tu vas m'expliquer pourquoi tu as l'air d'avoir envie d'enterrer un corps ? demande-t-elle.
— Laisse-moi juste 5 minutes pour me calmer, réponds-je en inclinant la tête.
Elle sort deux pots de glace du congélateur, puis s'installe à mes côtés, patiente. Malgré mes efforts pour retrouver mon calme, mes nerfs sont à vif, et des larmes de colère coulent, insaisissables. June me fixe en silence, comprenant qu'il est nécessaire que je retrouve mon calme avant de partager convenablement la situation.
— Tu te rends compte qu'il ose prétendre que c'est moi qui perturbe sa vie ? Sérieusement ? Ce type me complique l'existence à l'extrême, et c'est moi le problème ? Putain de dieu grec bipolaire de merde.
— D'accord, recommence depuis le début.
Je pousse un soupir et entame effectivement le récit depuis le début. Elle m'écoute en silence, savourant sa glace, tandis que je n'ai même pas touché à la mienne.
— Alors, ma belle, comptes-tu lui avouer franchement ?
— Quoi ?
— Que tu es éperdument amoureuse de lui, elle souffle en souriant tristement.
Un soupir s'échappe de mes lèvres. À quoi bon nier l'évidence ? Il occupe mes pensées depuis mes quinze ans. Malgré ma relation passée avec Hayden, dès que je suis revenue, je suis retombée sous le charme d'Alec comme une mouche prise dans sa toile.
June me conseille finalement de laisser les choses suivre leur cours. En d'autres termes, ne pas précipiter les choses, lui donner le temps de réfléchir. Plus facile à dire qu'à faire, mais c'est l'idée.
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Dimanche 9 juillet 2023 – Tampa – Floride
Trois jours se sont écoulés sans signe de vie d'Alec. Selon Ezra, il est parti quelques jours chez un ami. Il me manque. Après avoir passé une semaine quasi constante avec lui, le sevrage est brutal. C'est comme si le bonheur m'avait été arraché subitement.
En rentrant après mon jogging, même l'effort physique ne parvient pas à l'effacer de mes pensées. Mes frères, plongés dans leurs jeux, me saluent, mais la nouvelle d'Alec envoyant une vidéo d'une fille à Eden fait exploser mes émotions.
La bouteille que je tenais se brise au sol sans que je m'en rende compte. Je m'éclipse rapidement vers ma chambre, mes larmes coulant sur mes joues. Je sais que la vidéo ne prouve rien, mais juste l'idée qu'il pourrait flirter avec une autre me déchire de l'intérieur.
Avant même de pouvoir m'apitoyer sur mon sort, Marco m'appelle.
— Salut, ma belle, ça va ? il demande joyeux
— Bien et toi ?
— Top ! J'ai un combat ce soir, ça te dit de venir ? il propose enjoué.
— Pourquoi pas ? je réponds sans grand enthousiasme.
— C'est à 18 h, dans le grand gymnase.
Je n'avais pas vraiment prévu de sortir, envisageant plutôt de passer ma journée à ressasser ma relation compliquée avec Alec en regardant une série romantique. Récemment, ma vie semble tourner exclusivement autour d'Alec, que ce soit nos moments de bonheur ou nos disputes.
Pourtant, j'ai d'autres choses à gérer, des aspects plus importants pour mon avenir, comme ce poste à Paris que je dois sérieusement considérer. Malgré mes promesses, je n'ai même pas pris le temps de relire l'offre.
Ou encore ma mère qui m'a appelée à plusieurs reprises depuis lundi. J'ai délibérément évité de répondre. Une confrontation avec elle me semble insupportable, surtout en ce moment où ma vie est déjà un chaos. Après tout, si elle tenait vraiment à me parler, elle pourrait bien faire l'effort de venir me voir, non ? Cela fait deux ans que je ne les ai pas vus, et ils n'ont même pas assisté à ma remise de diplôme, préférant leurs voyages.
Le fait d'avoir des parents absents n'est pas nouveau pour moi. J'ai grandi entourée de nourrices et de mes frères, manquant probablement plus d'amour parental que de commodités matérielles. Leurs cadeaux, comme une nouvelle voiture dont je n'ai pas besoin, sont pour eux, une façon de prouver leur affection. Mais pour moi, un simple câlin de ma mère ou un « je suis fière de toi » de mon père auraient suffi.
J'ai tenté maintes fois de leur expliquer mes sentiments, mais c'est comme parler à un mur. Ma mère aime trop sa propre voix pour écouter les autres, et mon père est trop aveuglé par son amour pour elle pour reconnaître ses torts. Leur détachement envers leurs enfants, en particulier envers moi, me fait toujours aussi mal, même après toutes ces années.
Quand j'ai appris qu'ils ne viendraient pas à ma remise de diplôme, j'ai fondu en larmes. Appeler Alec avait été inutile, ses propres engagements prenant le dessus sur mes soucis.
En même temps, je l'ai dit moi-même, je ne suis ni sa sœur ni sa copine, juste une personne avec qui il couche. Pourquoi aurait-il changé ses plans pour moi ?
Perdue dans ces pensées sombres, je n'entends même pas mon téléphone sonner. Ce n'est qu'au deuxième appel que je réalise que June tente de me joindre.
— Salut ma poulette ! Marco a un combat ce soir, tu viens ?
— Hey, oui je sais, mais je ne suis pas en forme, je mens.
— Oh, je connais cette voix. Qu'est-ce qui s'est passé ? Tu veux que je vienne ?
— Non, t'inquiète, c'est juste un petit coup de mou, je minimise la situation.
— J'arrive !
— Ne t'en fais pas, June ! C'est juste que ma mère a essayé de m'appeler, je n'ai pas répondu, et ça m'a ramené à plein de choses. Tu connais la situation autant que moi.
— Tu sais ce qu'elle voulait ? elle demande curieuse.
— Non, comment je pourrais le savoir ? La dernière fois qu'elle m'a contactée, c'était pour m'envoyer une photo d'elle et de mon père en Italie avec en légende : on ne pourra pas être là à ta remise de diplôme, mais on boit à ta santé. On t'envoie un chèque et une surprise !
Même si elle ne parle pas, je peux facilement imaginer la grimace de ma meilleure amie à travers le combiné.
— Tu viens ce soir. Pas de discussions, tu ne vas pas rester chez toi à broyer du noir. Hors de question. Je passe te prendre à 17 h. Soit prête. Je t'aime ma biche.
Elle ne me laisse pas le temps de riposter et raccroche. Bon, eh bien, qui sait ? Ce combat pourrait bien se révéler être une bonne distraction.
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Liens interdits : entre cœurs et amitié
RomanceDepuis son enfance, Swan baigne dans l'étreinte chaleureuse de ses deux frères, un duo qui, telle une forteresse, l'a longtemps préservée des blessures que peuvent infliger les relations amoureuses et charnelles. Cependant, ils n'avaient pas prévu q...