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Mardi 11 juillet 2023 - Tampa - Floride

Marco est arrivé peu de temps après le départ de June, m'empêchant de sombrer dans ma tristesse. Je soupçonne ma meilleure amie d'avoir briefé le boxeur, car il n'a pas prononcé une seule fois le prénom en A.

Malgré ses efforts pour me faire rire, je me retrouve souvent à dériver vers les profondeurs de mon cœur brisé. Je suis perdue entre l'incompréhension et le refus d'accepter la réalité. Comment peut-il envoyer des signaux si contradictoires ? Est-il possible d'être jaloux à ce point sans éprouver au moins un soupçon d'amour ?

Je sais que le passé d'Alec a laissé des cicatrices profondes. Élevé dans un environnement chaotique, avec une mère toxicomane et des, oui des, beaux-pères violents, il n'a jamais été facile pour lui de faire confiance ou d'aimer. Son frère a quitté la maison tôt, le laissant seul face à ses démons, bien qu'il prenait soin de lui à distance. À seulement huit ans, il a trouvé refuge chez nous, où il a découvert le réconfort d'une nouvelle famille. Devenant un membre à part entière de notre fratrie.

Je suis bien consciente que toutes ces suppositions ne sont que des conjectures. En réalité, je n'ai aucune idée de ce qui se passe dans sa tête. Peut-être que mes frères ont raison et qu'il est juste trop attaché à sa vie de célibataire. Trop insouciant pour s'engager dans une relation amoureuse sérieuse. Ou peut-être qu'il ne ressent tout simplement rien pour moi.

Les questions sans réponse se bousculent dans mon esprit, créant un chaos mental qui déclenche une migraine lancinante. Ajoutez à tout cela les messages incessants d'Ezra et la culpabilité profonde d'avoir brisé une amitié de vingt ans.

Tout ce que je désire, c'est de m'endormir et me réveiller dans un monde où tout est beau et paisible.

— Swan ? T'es avec moi ma belle ? m'interpelle Marco les traits soucieux.

—Oh... euh... oui, pardon j'étais perdue dans mes pensées. Tu disais ? je tente un sourire avenant.

Il me le rend, mais le sien est rempli de tristesse. Ses yeux expriment clairement de l'inquiétude et ce sentiment que j'exècre : la pitié.

— Arrête de me regarder comme ça, coco, je vais bien, je le rassure.

— Tu m'excuseras ma belle, mais tu n'as pas l'air d'aller bien, il dit en grimaçant.

Je soupire, consciente que mon visage renvoie tout sauf l'image d'une fille pleine de vie. Le grand canyon se creuse sous mes yeux rouges, mes cheveux, bien que propres, sont rassemblés dans un amas désordonné sur ma tête, et ne parlons même pas de ma tenue.

— D'accord, je ne suis pas en grande forme, mais ça va aller. Ça va forcément passer, hein ? je le supplie presque de me répondre par la positive.

— Oh, ma belle, viens par là, il m'enlace.

Enveloppé dans ses bras, je laisse mes larmes couler librement. À ce moment-là, alors qu'un drame semble en appeler un autre, ma mère tente de me joindre. Je l'ai renvoyée vers ma messagerie à maintes reprises ces derniers temps. Je n'ai aucune envie de lui parler. Face à son insistance inhabituelle, je cède et décroche, même si ma voix est enrouée. Après tout, mon état ne peut pas empirer davantage.

— Enfin tu daignes me répondre, elle me reproche d'entrer.

— Cathy, je souffle.

— Je suis ta mère ! Cesse de m'appeler par mon prénom !

— Et moi qui pensais que t'avais oublié, j'ironise en reniflant.

— Tu nous en veux encore de ne pas être venus à ta remise de diplôme c'est ça ?

— Non, maman, je vous en veux de ne pas avoir été des vrais parents, c'est différent, je rectifie.

Je l'entends clairement soupirer. À croire que mes états d'âme vis-à-vis d'eux ne sont pas justifiés.

— Tu exagères toujours tout, à croire qu'on t'a abandonnée sous un pont avec ton père.

Dit-elle alors qu'elle ignore les trémolos que contient ma voix...

— Non, pas sous un pont, je souffle, mais abandonnée, oui, c'est le mot juste.

—Swan, elle me réprimande. Dis-moi plutôt comment tu vas ?

C'est une blague ? Je renifle toutes les deux secondes, mes sanglots sont clairement audibles et ma voix est tellement cassée qu'on se demande si je n'ai pas fumé six paquets de clopes.

— Mal.

— Ah... Bon ça va passer ne t'en fait pas, élude-t-elle. Je t'appelais pour te demander un service. J'ai laissé quelques robes à la maison, notamment une robe bustier rouge de cocktail. Je pensais ne plus pouvoir rentrer dedans, mais figure toi que j'ai beaucoup perdu avec ce nouveau programme de remise en forme qu'on suit avec ton père. Ce n'est pas génial ?

— Incroyable, je réponds sans enthousiasme.

— Bref, tu pourrais la trouver et me l'envoyer à l'adresse que je t'ai envoyée ? Merci beaucoup ! Je te laisse, ton père m'attend pour notre séance de massothérapie !

Cathy met fin à l'appel sans plus de formalités. Après tout ce temps, je devrais être habituée à son comportement et ne plus être affectée par son manque de maternalisme. Pourtant, même après toutes ces années, constater à quel point elle se désintéresse de moi me déchire toujours autant. Mes larmes coulent à flots pendant que Marco, ayant tout entendu, se contente de me caresser le dos.

Si ma propre mère ne parvient pas à m'aimer sincèrement, comment puis-je espérer qu'Alec en soit capable ?

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Jeudi 13 juillet 2023 - Tampa - Floride

Nous sommes jeudi soir, et depuis trois jours, je demeure cloîtrée chez June. Les jumeaux ont cessé de me harceler, probablement sous l'influence de ma meilleure amie. Je ne leur en tiens pas rigueur. Bien sûr, ils auraient dû s'abstenir d'intervenir. Ils n'ont aucun droit de juger mes décisions, même s'ils sont mes frères. Je comprends qu'ils cherchent simplement à me protéger, même si ce n'est pas de la manière la plus appropriée, je l'admets. La seule raison pour laquelle je refuse de les voir ? Je ne suis pas prête à affronter cette réalité.

Quant à Alec, il pourrait être mort que je ne le saurais même pas.

Le côté positif dans tout ça, c'est que j'ai eu l'occasion de me recentrer sérieusement sur mon avenir. Si j'avais des doutes auparavant, il est désormais évident que je ne pourrais jamais accepter la proposition des jumeaux pour travailler avec eux.

J'ai donc pris l'initiative de recontacter L'Oréal pour leur réaffirmer mon intérêt pour le poste, et nous avons convenu d'un entretien physique dans quelques jours. Paris n'étant pas à côté, j'ai décidé de m'y rendre pour une période de deux semaines. Cela me permettra de prendre des vacances et de disposer du temps et de l'espace nécessaires pour tenter de me remettre. De plus, ces deux semaines me donneront probablement une idée de ce que pourrait être ma vie dans la capitale française.

Je souhaitais que June puisse m'accompagner, mais elle est malheureusement retenue par ses obligations professionnelles. Ainsi, ce sera un voyage en solitaire, une aventure avec moi-même, avant que nous nous envolions toutes les deux pour le Mexique.

Il me reste à informer mes frères de mon départ, prévu pour samedi. Ils ne sont pas au courant de l'offre de poste, et je doute qu'ils apprécient que j'envisage de partir sur un autre continent pour une durée indéterminée. Peu importe, je dois déjà faire face à leur désapprobation à propos de mon histoire avec Alec, alors je peux bien ajouter un éventuel déménagement à Paris à mes torts. 

Liens interdits : entre cœurs et amitiéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant