Ilona Lazykwartz
L'écriture a été ma raison d'être à partir de la troisième, quand tout allait mal, que la solitude pourrissait mon âme. Alors depuis, sortir de mon cocon est devenu un obstacle. J’ai à peine franchi les portes de l'université que l'angoisse monte en moi. J'ai beau me répéter de respirer, ça ne fonctionne pas lorsque je remarque tous ces gens et ces nouveaux couloirs. Ce n'est que le premier jour. Quitter le lycée était un soulagement, seulement j'appréhende ces années à venir, car les regards que j'imagine sont à nouveau sur moi. Les brouhaha des étudiants surplombent l'espace, c'est pesant. Je me sens à l'étroite malgré moi. Et toute petite.
À travers une vitrine où sont déposés les prix et photos de l'université, je découvre mon reflet. Ma tignasse rebelle, probablement avec des nœuds, est cachée sous ma capuche alors, ça met en évidence mes cernes creusés, mon teint blanc car je ne sais pas bronzé. La seule chose dans laquelle j'excelle, c'est attraper des coups de soleil. J'ai une dégaine pas possible pour un début d'année. J'ai pourtant essayé, mais Motivation n'était pas là ce matin. Je hausse les épaules. Tant pis, je ne suis pas là pour faire un défilé de toute manière.
Avant de me remettre à marcher, je change de musique pour mettre Sick de AleXa. L'atmosphère change d'un seul coup, c'est plus lumineux et apaisant avec une chanson qu'on aime. Intérieurement je souris, prête à faire face à cette nouvelle phase de ma vie. Seulement, aussitôt, du coin de l'œil, je ne peux m'empêcher de reconnaître certains visages qui assombrissent mon visage. J'aurai préféré ne jamais les revoir. Mon ventre se creuse aussitôt et un goût amer traverse ma gorge en même temps que ces souvenirs que j'aurais préféré oublier mais qui persiste à rester coincé dans ma gorge.
Ma tête bascule de droite à gauche jusqu'à m'en donner le tournis. Je m'installe à la première place libre que je vois à l'amphithéâtre et aussitôt, je ne peux m'empêcher de scruter chaque étudiant dans la salle. Ils ont l'air si sérieux, si mature. Et souvent, ça s'approprie par le style. Lorsque j'étais au lycée, et que je me baladais en ville, je pouvais voir des étudiants sortir et marcher dans les rues. Je dois avouer que je les admire encore de loin. Je n'ai pas tellement changé. Seulement un petit peu.
Je croise le regard d'une personne. Un mec qui rigolait et qui a subitement tourné la tête. Je ne l'avais pas vu venir et je ne sais toujours pas pourquoi je continue de le regarder mais son rire laisse place à un sourire et me décroche un soupir avant de détourner la tête avec l'arrivée du professeur.
En sortant de la salle, je me faufile aussitôt vers la porte. Au passage, je croise le regard de quelqu'un. Des yeux bleus. C'est tout ce dont je me souviens, avec ses mèches brunes qui tombaient sur son regard. Et, alors que je descends les escaliers à toute vitesse, pressé de partir. J'ai surtout hâte de retourner à l'hôtel pour y passer ma dernière nuit. Sauf qu'à ce moment-là, je m'arrête. Mes pas se sont calmés contrairement aux battements de mon cœur qui s'affolent quand je fais face à cette silhouette que je reconnaîtrais même au-delà de cette vie.
Il me voit tout comme moi. Son regard est impassible tandis que mon corps tremble. Je bloque mes ongles dans la peau de ma paume de main. Étrangement, ça me calme. Ça m'empêche de dériver. Je pince mes lèvres et décide de franchir le pas. Ce n'est pas car le passé refait surface que ça risque de recommencer. Rien que d'y penser, j'angoisse.~✧~
Ce n'est que le deuxième jour. J'ai réussi à passer une journée. J'ai réussi à respirer, à trouver mon souffle dans ce nouveau lieu alors mon cœur s'apaise lorsque je franchis de nouveau ces portes. Je croise à nouveau mon regard dans cette vitrine. Le même visage qu’hier, la
même apparence.
Je soupire profondément avant de marcher à nouveau. C'est une routine qui s'installe, je n'ai besoin que de ça pour être à l'aise. Seulement, les brouhahas agacent mes oreilles, et les regards vont aussi m'affecter même si ce n'est que le fruit de mon imagination.
Alors que je suis à mon casier, des bruits parasites se font de plus en plus fort. Les gens n'ont pas grandi apparemment, ça me désespère un peu mais je n'y peux rien et je ne peux rien faire pour eux.
Mon cœur cesse de battre lorsque je découvre des petits papiers moqueurs dans mon casier. Garce. Ce surnom ne me quitte pas dans cette nouvelle vie. Inconsciemment, un rictus s'échappe d'entre mes lèvres. C'est tellement gamin. Les gens n'ont peut-être pas tant changé que ça. Après tout, on passe seulement d'une année de lycée à l'université. Changeons-nous réellement entre temps ? Pas pour certains visiblement.
Je récupère ces satanés papiers pour les broyer dans ma main. Les gens aux alentours sursautent lorsqu'ils entendent la porte du casier se fermer violemment. J'entends leur messes basses qui disent que je suis folle, cinglé. Ils n'ont peut-être pas tort dans le fond.
— Hey ! Toi !
Je soupire puis me retourne et visiblement, c'est à moi qu'on adresse la parole. Un groupe de personnes bien habillées, dont une au teint bronzé, des boucles d'oreilles en or et un style streetwear, me fait signe. Je ne bouge pas et pourtant je meurs d'envie de me planquer. Ils me veulent quoi ?
J'ai horreur de ce genre de situation. C'est ce dont je craignais, ces papiers me ramènent dans le passé.
Ils s'approchent de moi, je vois leur présence comme imposante. Je me sens à la ramasse, j'ai envie de partir mais je n'en fais rien.
Les yeux sombres de cette fille percent mes rétines et heureusement qu'elle ne sourit pas. Elle me regarde plutôt d'un air curieux, au lieu d'être méprisante. Mais ça ne me met pas à l'aise pour autant.
— C'est vrai ce qui se raconte ?
— De quoi ?
Je suis légèrement abasourdie. À peine je débarque ici qu'il se passe déjà quelque chose. Je crois que c'est impossible de passer une année calme et ça commence dès le début sans que je le veuille.
— Tu es une vraie chaudasse apparemment, c'est vrai ?
Des frissons me parcourent l'échine, ses bruits de mastication me déstabilisent. J'ai envie de partir, ces choses ne se dit pas mais cette fille n'est pas au courant.
Avant même qu'elle ne dise quoique ce soit pour me faire parler, deux mecs s'approchent en courant vers moi. L'un trébuche à cause de son pote, blond, à la barbe naissante, celui qui l'a embarqué. Tous deux rigolent tandis que la brune soupire d'exaspération. Un sentiment de déjà vu parcourt ma nuque lorsque mes yeux se posent sur le brun, les cheveux décoiffés et sa main qui se faufile dans ses cheveux tandis qu'il se remet sur pied alors que le blond lui donne une tape dans le dos.
Ma poitrine se serre lorsqu'ils commencent à m'entourer. Ils me regardent tous. J'aurai préféré ne pas me faire remarquer. Mon rythme cardiaque s'accélère à mesure que le brun s'approche, puis j'arrête de respirer lorsqu'il se retrouve à quelques pas de moi. Ma peau frissonne lorsque je remarque son sourire en coin. J'enchaîne des va-et-vient, de droite à gauche, entre ses potes qui nous regardent fixement et les étudiants qui discutent sans trop nous remarquer. Comme si tout ceci était normal. Il passe son doigt sur ses lèvres et me dit avec une voix agaçante en approchant son visage :
— Et moi ? Tu ne veux pas m'embrasser aussi ?
Il est si stupide que j'en suis désolée pour lui. Il est en train de s'humilier à cause de son attitude. Je verrouille mon casier et part mais j'arrête de respirer lorsqu'il attrape mon bras pour me ramener à lui.
— Pourquoi tu nous ignores ? Dit-il.
Je rigole intérieurement mais ma mâchoire se serre aussitôt puis je me tourne face à lui et lâche :
— Désolée, si c'est pour parler avec moi, arrête d'être con et prends rendez-vous à l'avance car moi, je ne traîne pas avec des imbéciles. Je préfère vous faire mijoter, tu comprends ? Répliqué-je en le regardant de haut en bas.Leurs visages changent radicalement. Je les ai perturbé, je suis libéré de leur griffe alors j'en profite pour partir. C'est peut-être un imbécile, mais moi, je souris comme si j'en étais une tandis qu'il réfléchit encore à ce que je viens de dire.
Mon ventre bourdonne et une puissance cosmique enveloppe mon corps, c'est grisant. Ce genre de phrases sont parfaites pour éloigner ce genre d'individus et jamais je n'aurais cru pouvoir le dire à voix haute dans une situation inattendue et au bon moment.
J'active ma musique et me noie dedans pour rejoindre mon utopie.
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GARCE
RomanceLorsqu'une nouvelle débarque à la fac, elle ne perd pas de temps pour faire sensation. Mais est-ce réellement ce qu'elle voulait ? Des rumeurs défilent avant même qu'on ne lui adresse la parole. Aussitôt, Axel Grenat vient à elle, la taquinant sur c...