Chapitre VIII

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Ilona Lazykwartz

  Je sors en trombe de la chambre, le cœur battant au rythme de mon stress qui grimpe crescendo. Lorsque je le vois sortir tranquillement de sa chambre, je me demande comment il fait pour être aussi zen. Il est là, t-shirt et short, sans une once de stress dans le regard. Je prends pas plus de temps avec lui,  j'enfile mes baskets et sors aussitôt de l'appartement. Seulement, je ne pose même pas ma chaussure entière dehors, que ma cheville devient glacée par la pluie.
— T'as oublié un truc ?
  Le voir manger ses céréales tranquillement me désespère un peu. Je n'ai même pas eu le temps de manger. Il ne se rend pas compte du temps qu'il perd. J'ai l'impression qu'il s'en fiche de ses études, que ce n'est pas important pour lui autant que ça l'est pour moi.
  Je ne cherche pas à lui répondre. Je récupère mon parapluie et sors en vitesse. Tant pis si je me fais passer pour une malpolie. De toute manière, une colocation ce n'est pas forcément faire ami-ami avec l'autre. Selon moi, en tout cas.

  Lorsque j'arrive, c'est la peau glacé. Le vent est glacial ce matin, plusieurs fois j'ai tenté de reprendre mon souffle à travers cet air tranchant.
  Tandis que je range mon parapluie, j'entends un raclement de gorge venant de mon dos. Je sursaute et mon rythme cardiaque se fige.
— Tu nous ignores déjà ? S'exclame-t-elle.
  Hésitante, je me tourne face à elles.
— Non, bégayé-je.
  Ces filles ont été mon fardeau durant ma scolarité au lycée. La première, Lizzy Locker. Les cheveux châtains toujours rabattus en un chignon tiré vers le haut, des vêtements sobres comme les uniformes scolaires aux États-Unis. L'autre, son amie, est Line Lee. Les cheveux bruns, tressés avec un ruban tartan au couleur de sa tenue du jour. Ces deux filles font partie de mon passé, celui que j'aurais préféré ne jamais revoir.
— Bah alors, tu ne dis pas bonjour ? Ricane Line.
— Laisse tomber, elle n’en vaut pas la peine, lui dit-elle avant de se tourner vers moi. Toi, tu n'as rien à faire ici. Souviens-toi de ce que tu m'as fait alors soit gentille, va-t-en.
  Elles passent toutes les deux près de moi pour tracer leur chemin et en passant, je ressens les yeux froids de Lizzy et le sourire tranchant de Line qui me procure une vague de frisson angoissante.
  C'était une erreur la dernière fois. Je ne l'ai pas fait exprès, ou peut-être que si. Je me perds dans mes propres pensées. Elles ont peut-être raison, je n'ai peut-être rien à faire ici. J'aurai dû aller dans une autre ville avec la même faculté que celle-ci mais non j'ai choisi celle-là. Je n'aurai pas dû.
Des brindilles de souvenirs se révèlent. J'ignore si c'est le fruit de mon imagination ou bien la vérité. Peut-être que j'ai fait une erreur, que je l'ai fait volontairement et que je ne m'en souviens plus. Non. Je ne peux pas penser ça. Je sais très bien ce que j'ai vécu. Je dois me remuer, ne pas me laisser faire. Je suis comme ces filles dans le décor des manhwa. Une fille sans importance, seulement un élément du décor. Je ne suis pas l'héroïne badass qui remonte la pente et montre son regard audacieux…mais je peux le devenir.
— Seulement...
  Je remonte la tête en me tournant face à elles. Ces dernières se tournent aussi vers moi. Line me regarde amusé, elle me sous-estime. Tandis que Lizzie, reste impassible.
— Je n'ai pas tellement envie de partir, avoué-je. Alors vous allez devoir me supporter encore un bon moment.
Sourié-je avant de les contourner.

J'ai l'impression de retrouver cette assurance que j'avais lorsque j'ai répondu droit dans les yeux à Axel. C'était mon moment de gloire. Seulement, celui-ci a plus de valeur contrairement à l'autre.
J'ai le cœur qui bat à cent à l'heure. Seulement, cette fois-ci, ce sentiment est bien plus satisfaisant dans ce contexte.
  Lorsque je me tourne pour reprendre mon sac, je croise le regard de mon chère colocataire. Dans ma tête, je lui aurais fait un petit sourire mais je ne le concrétise pas. Je l'ignore comme il se doit. Après tout, c'est lui qui ne veut pas qu'on sache que l'on vit ensemble alors autant agir comme des inconnus.
 
  Quand j'arrive à l'amphithéâtre, j'ai une sensation désagréable d'être suivi. Une main se pose soudainement sur mon épaule, je sursaute d'un seul coup.
— Calme. Ce n'est que moi. Avance, tu fais des bouchons, se plaint Axel.
  Je lâche un soupir en levant les yeux au ciel.
  Plus j'avance dans la salle, plus j'ai la sensation d'être minuscule face à la grandeur imposante de l'amphithéâtre. Mes yeux virevoltent un peu partout à la recherche d'une salle. Plus j'avance et plus je me dis, qu'il y a trop d'étudiants ici. Sans m'en rendre compte, je bloque ma respiration pour m'asseoir. Ma jambe tape le sol j'enfonce presque mes doigts dans le clavier pour y noter quelques mots. Aussitôt que le professeur rentre dans la salle, j'appuie sur le premier bouton sans même le regarder. Merde.

~✧~

  La brise caresse mon village, balance mes mèches de droite à gauche tandis que mes doigts tapent à toute vitesse en même temps que mon sourire s'élargit. Aussitôt, je reçois une réponse qui fait battre mon coeur. Il me manque tellement. C'est la seule personne pour qui je pourrais tout donner autant qu'il me donne. Il me rend tellement heureuse que je le mérite peut-être pas autant que je le pense. Ses cœurs et ses “bébé” égaient ma journée.
  Alors que je pense être au calme, une ombre agaçante assombri mon téléphone.
— C'est qui ?
  Je recule d'un bond.
— T'étais pas le premier à me dire qu'on devait pas se parler ?
— Parler de la coloc, ouais. Mais j'ai rien dit pour ça. Je n'ai pas le droit de t'emmerder l’hamster ?
— Dégage, insisté-je en retournant sur mon téléphone.
  Soudain il s'empare de mon Xiaomi.
— Tu fous quoi là ? Rend le moi !
  Putain. Il est plus grand que moi.
— Alors t'as un mec ? Un vrai cette fois ?
— De quoi tu parles ? M’agacé-je.
J'ai beau sautiller, il lève toujours le bras plus haut alors à bout de force, je le pousse énervé.
— Tu n'es pas au courant ? Conclut-il.
— De quoi ?
— Il y a une rumeur sur toi.
  Je compte rétorqué mais je m'arrête dans ma lancée lorsque je repense à ma première rencontre avec lui. J'avais oublié. Des papiers étaient dans mon casier, je les ai broyé aussitôt à cause de la colère. Je n'ai même pas pensé à les lire puis, je ne voyais pas l'intérêt si c'était pour me pourrir le mental. Je repense à Lizzie et Line. Je pense savoir de quoi est faite la rumeur et de qui elle peut sortir. Je ne vois qu'elles. Il n'y a qu'elles que j'ai vu et qui appartiennent à mon passé, qui le connaissent presque aussi bien que moi.
— C'est le quotidien de tout le monde, t'inquiète. C'est toujours comme ça ici.
  Je lâche un rire nerveux.
  J'ai dû mal à croire ses mots. Le quotidien de tout le monde ? Ça veut dire qu'à chaque nouveau, une rumeur sur eux. Je suis avec des gens majeurs ou des gosses ?
  Je fronce les sourcils, serre les poings et ça à l'air de lui faire ni chaud ni froid.
— C'est vraiment gamin de faire ça, laché-je amèrement avant de partir.

GARCE Où les histoires vivent. Découvrez maintenant