Chapitre LI

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Ilona Lazykwart

  C'est drôle. C'est comme s'il y avait Axel devant moi, mais flou donc en moins beau. Au bout de quelques secondes, ma vue reprend de plus belle. Cependant, ça ne me ravi pas. Je ne sais pas quoi faire ni comment réagir face à nos deux corps figés. On se regarde seulement dans le blanc des yeux. D'ailleurs, je ne sais plus ce que je faisais avant de dormir. Mon regard se pose sur la table basse. Je me souviens maintenant. Je travaillais pour mon partiel qui se tient dans quelques jours. Avoir vu l'état d’Enzo ne m'a pas aidé, c'est même plutôt l'inverse. J'ai tellement peur d'échouer que j'essaie de réviser seulement ma tête est une véritable bouillie. Je n'arrive pas à retenir la moindre chose.
  Lorsque je m'assoie, sa voix parvient à mes oreilles :
— Désolé pour hier. Je ne sais pas ce qui m'a pris. Je dois être fatigué.
  J'acquiesce pour seule réponse avant de soupirer au bout de plusieurs secondes interminables.
— Moi aussi je suis désolée. Je suis comme toi, plutôt fatiguée…
  Il acquiesce à son tour.
— Alors, on oublie ?
  Il tend sa main avec un petit sourire au bout des lèvres, un petit rictus s'échappe des miennes avant d'accepter de serrer sa main.
— Bon, je vais travailler dans la chambre, annoncé-je en récupérant mes affaires.
— Tu ne préfères pas que je t'aide ?
— Non ne t'inquiètes pas.
  Aussitôt, lorsque la porte se ferme, je m'écroule sur le sol avec le sang qui bouillonne dans mes veines même si une goutte d'eau salée s'échappe de mon œil tandis que mes membres tremblent.

~✧~

  Assise à la bibliothèque universitaire, je me ronge les ongles en lisant tous mes cours. Les gens trop silencieux, les bruits extérieurs, les gens qui marchent, ils me perturbent tous alors que cette ambiance est censée m'aider. La chaise devant moi est tiré vers l'arrière et une personne noir s'assoit face à moi. Je soupire avant de relever ma tête. Notre dernière discussion me reste encore dans la tête. Malgré ce que je lui ai dit, elle est là et me sourit.
— Besoin d'aide ?
  Son sourire, pourtant resplendissant, me froisse l'abdomen.
— Je suis désolé pour la dernière fois, me lamenté-je.
  Elle tapote la table, toujours avec ce même sourire dessiné sur ses lèvres.
— Ce n'est rien. J'ai compris, je t'emballe pas.
  Ses mains saisissent mon ordinateur avec délicatesse, son regard analyse chaque mot et chaque paragraphe. Elle commence alors à m'expliquer. C'est lorsqu'elle prend le temps de m'aider que je retiens mes larmes de joie pour sa gentillesse si attachante. Je n'ai pas eu besoin de prononcer un seul mot pour exprimer ma réaction abusive de la dernière fois. Elle n'a fait qu'un hochement de tête comme si elle savait déjà tout. Elle a lu mes pensées comme Jadina lors de son voyage astral où elle a pu entrevoir les pensées de son ennemie. Cette comparaison me plaît bien.
  Alors qu'elle continue ses explications, Enzo se pose subitement à notre table. Exténué et essoufflé, sa tête s'installe près de mes affaires.
— Alors, ton partiel ?
  Il lève un pouce en l'air avant de croiser le regard de Lexi. Il hoche la tête pour la saluer et elle fait de même. Après deux minutes, il se redresse de manière nonchalante.
— C'est quand pour vous ?
— Dans trois jours, répond Lexi aussitôt.
  Elle sourit faiblement. Son caractère n'est pas le même que d'habitude. Elle m'a l'air nerveuse et n'arrête pas de faire virevolter son regard entre deux points. Enzo et lorsque je tourne mon regard, j'aperçois le deuxième point. Son meilleur ami et une autre fille. Et comme prévu, elle se lève. Ce qui étonne Enzo, qui la regarde sans comprendre. Elle s'en va alors je me précipite pour ranger et dire à Enzo:
— Je te laisse ! N'oublie pas de te reposer !
  Je cours en direction de la sortie, dévalant les marches d'escalier jusqu'à quitter l'intérieur pour l'air rafraîchissant du dehors. L'odeur de la cigarette pénètre mes narines alors sans plus attendre je suis l'odeur pour trouver la brune appuyé contre le mur. Sans un mot, je me pose à ses côtés comme la dernière fois.
— Tu devrais l'oublier.
  Je la sens se crisper à ma remarque. Mes pensées me murmurent ce que je dois faire alors je prends une longue inspiration car le doute envahit mon estomac. Je pense à Axel mais ce qu'on m'a dit plutôt supprime cette once d'empathie pour lui. Je me tourne alors vers la brune.
— J'imagine que ça te dérange d'en parler alors ça te va si on révise ensemble chez moi avant le partiel ?
  Un large sourire égaie soudainement son visage puis son dos se décolle du mur.
— Et pourquoi pas maintenant ? Commence-t-elle à me dire avant de partir. Je reviens, je vais prendre mes affaires !
  Une boule née dans le creux de mon estomac. Je ne perds pas de temps et cours jusqu'à l'appartement. Alors que je claque la porte, je croise le regard d’Axel qui mange un morceau de baguette.
— Lexi arrive !
  Son morceau de pain qu'il venait d'enfourner dans sa bouche est aussitôt recraché lorsqu'il s'étouffe d'incompréhension, de surprise et de colère.

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