Chapitre LIII

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Axel Grenat

  Plus les heures passent et plus ça m'agace. Mes doigts me démangent, elles veulent à tout prix manipuler les boutons de la manette de jeu. Seulement, je suis bloqué ici. Tandis qu'elles se prélassent sur le canapé, je m'ennuie à mourir. Je ne peux même pas gratter la guitare au risque de me faire entendre. La pile rouge affichée sur le coin de mon téléphone me déprime comme la cerise sur le gâteau. Il a fallu que j'oublie mon chargeur dans le salon. Mes paupières commencent à tomber de sommeil mais la porte qui s'ouvre doucement m'en empêche. Un soupir s'échappe d'entre mes lèvres lorsque mon corps se redresse malgré la fatigue qui m'obsède. Ma chère coloc fait son entrée, elle ne me remarque pas encore, elle est trop occupée à jouer les personnes discrètes comme les espions. Lorsqu'elle se tourne face à moi, ses joues virent au rose et sa mâchoire se crispe.
— Tu as réussi à te cacher où, tout à l'heure ?
  L'air blasé, je pointe du doigt le placard. Elle déglutit avant de passer sa main sur sa nuque.
— Qu'est-ce que tu viens faire dans ma chambre ?
— Elle dort dans…la mienne, bégaie-t-elle. Ça aurait été louche si je dormais sur le canapé…
  Malgré ma rancune, ça se tient. Seulement, ce n'est pas ça qui va m'empêcher de m'énerver. Elle l'a invité sans même m'en parler ! Enfin, si mais à la dernière minute. Si j'avais su qu'elles allaient devenir proches, je lui aurais dit que Lexi n'aime pas prévoir. Si on l'invite, ça doit être maintenant.
— Je vais dormir sur le canapé, sourit-elle nerveusement en commençant à partir, suite à mon silence.
  Alors que sa main touche la poignée, je soupire avant de sauter hors de mon lit pour saisir son autre bras.
— Non, reste, soupiré-je.
  Elle se gratte la nuque.
— Tu es sur ?
  Une once d'hésitation surgit dans mon esprit à cause de cette rancune que je porte en moi. Une sensation désagréable vit dans mon ventre comme un vaste vide qui picore lentement mon estomac jusqu'à ma poitrine. Néanmoins, je finis par acquiescer en passant la main dans mes cheveux. Aussitôt, je m'allonge dans mon lit. Heureusement qu'elle est déjà en pyjama,  ça aurait été gênant qu'elle se change dans ma chambre, mon espace personnel. Surtout que, je suis un gars alors plein d'images sorties de mon imagination m'auraient envahit la tête. Par contre, elle porte encore quelque chose sur son dos sous cette chaleur. Si ce n'est pas un pull, c'est un gilet.
  Elle est toujours à ma porte, comme figé sur place mais lorsque je regarde ses doigts se triturer entre eux je commence à penser qu'elle est aussi mal à l'aise que moi. Soudain, je regarde mes fringues.
— Merde…murmuré-je.
  Elle lève son regard sur moi à l'instant où je passe ma main dans mes cheveux.
— Je suis encore habillé…
  Un gouffre naît sous nos jambes, inondant la chambre d'un silence insoutenable à cause de cette gêne qui paralyse chacun de nos gestes. Je lâche un profond soupir avant de me poser dans un coin de la pièce pour aussitôt enlever mon t-shirt. Une vague de frisson traverse mon torse en cet instant. Je récupère ma tenue de nuit qui est un vieux t-shirt et un short. Lorsque j'enfile mon bas, une douce chaleur se dépose sur mes joues. Mes dents commencent à affirmer ma lèvre inférieure. À nouveau, ma main traverse ma tignasse. .
— Prends mon lit, je dormirai par terre.
— Non, tu ne peux pas, proteste-t-elle malgré les rougeurs sur sa joue.
— Alors on échange ? rétorqué-je avec un sourire en coin.
  Alors que je ricane doucement dans mon coin, je sens son corps bouger derrière moi alors je me retourne avec surprise lorsque je la vois étaler sur le sol.
— Tu fais quoi ?
— Je dors par terre, déclare-t-elle.
  Chacune de mes pensées se bousculent jusqu'à que j'en vienne à la conclusion qu'elle est très premier degré. Un soupir s'échappe tout de même de mes lèvres en même temps d'avancer vers elle. Mon corps s'abaisse à son niveau et je lui affirme que :
— Ilona, c'était une blague.
  Je n'ai même pas le temps de voir son visage ahuri que je place ma main sous ses genoux puis l'autre dans son dos avant de la soulever. Je la place correctement dans mes bras avant d'avancer sur mon lit où je la dépose.
— Tu dors, ici.
  Aucun son ne sort de ses lèvres malgré qu'elles soient entrouvertes, seul son souffle s'en échappe. Je devrais me relever mais je n'y arrive pas. À la place, mon regard se plonge dans ses yeux verts. Ils sont foncés et plus je regarde, plus je distingue que ça s'écarte sur du bleu qui se fond à merveille avec son vert. Ses yeux ont l'éclat d'un diamant qui scintille, ceux qu'on observe jusqu'à perdre haleine lorsque la beauté est trop belle pour s'en détacher. Ça explose dans mon estomac, mes bras n'auront bientôt plus de force. Je pince mes lèvres, en même temps son regard quitte mes yeux pour baisser plus bas. Mon rythme cardiaque s'accélère alors que mon souffle fait tout le contraire. Je fais l'erreur de fermer les paupières pour les ouvrir à nouveau, pour tomber sur ses lèvres rosées qui sont légèrement abîmées. Mes pupilles quittent son visage pour aller à la naissance de son cou. Aussitôt, je déglutis. Je serre les poings avant de m'étaler à côté d'elle pour recommencer à respirer. Nos bras se frôlent discrètement mais même si c'est toujours un peu tendu, ça l'est moins qu'il y a quelques secondes. Mon cœur tambourine encore dans ma poitrine et des vibrations continuent de traverser mon corps.

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