Chapitre LXVI

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Axel Grenat

  C'est comme une main qui encercle vivement mon crâne jusqu'à l'étouffement. La lumière du jour grille mes rétines lorsque mes paupières s'entrouvrent. Je ne me souviens plus de ce qu'il s'est passé hier. Je crois que j'ai trop bu sauf que je ne m'en suis pas rendu compte. J'ai bu combien de verre déjà ? 

  La lumière du soleil me pique moins les yeux que tout à l'heure. Ma vue est légèrement troublée lorsque je découvre ces cheveux étalés devant moi, une couverture qui enroule le corps, ne laissant que ses jambes nu et le haut du corps qui me laisse voir sa poitrine écrasée contre le matelas. Mes bras m'aident à me relever seulement, je sens comme un courant d'air frais qui fait frissonner ma peau. Ma tête descend vers le bas et mon cœur s'excite aussitôt.

— Oh bordel, crié-je. 

  Qu'est-ce que je fous nu ? Je scrute les alentours. Ce n'est sûrement pas ma chambre. Je ne mettrai jamais de posters de Taylor Swift dans ma chambre. Lorsque mes yeux s'attardent sur la femme allongée sur le lit. Ma respiration s'étouffe dans mes poumons tandis que mon cœur s'accélère à tel point que j'ai la sensation qu'il va briser ma cage thoracique. Je suis nu collé un ver… et je suppose que elle aussi. À la seconde où mon corps tombe lourdement sur le sol, elle se réveille de la même manière que moi avant de hurler jusqu'à assommer mes tympans. 

— Bordel ! On a fait quoi hier ? panique-t-elle en se cachant sous la couette.

  Lorsque ses yeux se posent sur moi, son visage prend une tout autre teinte. Celle d'une fraise. Ses mains se posent sur ses yeux. Et je l'entends marmonner dans l'oreiller.

— C'est pas comme ça que je voulais voir un homme à poil…

  Mes dents pincent ma lèvre inférieure tandis que ma main récupère mes fringues seulement, son corps enveloppé dans la couverture tombe sur le sol avant de se précipiter pour s'enfermer dans la salle de bain de la chaleur. Quelques parcelles de souvenirs me reviennent en mémoire jusqu'à étreindre ma poitrine à l'explosion comme une fleur qui éclôt. La chaleur monte jusqu'en haut de mon crâne. J'ai besoin de prendre l'air. Aussitôt habillé, je dévale les escaliers sans même regarder autour de moi. Je ne prends même pas le temps de parler à Lexi. Lorsque l'air frais s'infiltre dans mes poumons, c'est un mélange de froid et de chaud qui s'accouplent dans mon corps. Un mélange tiède qui fait palpiter mon coeur tandis que ces souvenirs défilent. On aurait dit un rêve érotique seulement, ma peau nu allongé sur ce lit me donne la certitude que ça s'est réellement passé. J'ignore si je regrette ou non. La vision de mon père étroit mes pensées jusqu'à m'étouffer et brouiller ma vue. Les cris de ma mère, le regard furieux de mon père qui lui hurle de se taire. Si seulement il aurait pu le dire avant. Jamais je n'aurais été témoin de ça. Désormais, j'ai l'impression d'être comme lui. Comment étions-nous hier ? Si mes souvenirs sont encore là c'est qu'on devait être bien pompette. Le verre de Dionysos a failli dépasser la jauge. On était à seulement deux gouttes d'être bourré. Néanmoins, mes pensées sont sur Ilona. À quoi pense-t-elle ? Le regrette-elle ? Ça se trouve, je deviens comme lui. Cette ordure qui joue avec les cœurs. Je deviens comme mon géniteur et mon frère. Depuis petit je me suis juré de ne jamais reproduire leurs erreurs qui ont tant brisé celle que j'aime mais inconsciemment, les traces de l'enfance influencent celui qu'on devient. Une larme s'échappe de mes yeux pour dévaler sur ma joue avant de s'échouer en silence sur le bitume… Cette fois-ci, c'est garanti. Elle me déteste. Mon cœur est devenu complètement fou qu'il a débordé sur elle pour saisir sa virginité qui est une fleur si délicate pour certaines personnes. Ne me dites pas que je suis devenu cette ordure ? Ma main passe dans mes cheveux tandis que j'ai la mâchoire serré avec les images de ce connard de père qui passe dans ma tête et lentement, les larmes de ma mère qui obscurcit son teint si pâle malgré son sourire qu'elle me donne.  Cette vision m'a brisé le cœur une fois jusqu'à laisser une cicatrice sur mon organe. 

  Chaque paroi de mon corps se met à trembler, aveuglé par cette vision obscure. C'est avec le cœur lourd que je jette un dernier coup d'œil à la maison de Lexi où se trouve encore Ilona. Je ne mérite même pas de penser à elle ni de prononcer son nom. Je suis un être abominable qui a probablement gâché sa vie. Mon corps pivote à l'opposé pour s'en détourner. Mes lèvres coincées entre mes dents bloquant ce sentiment qui étreint froidement ma poitrine. Je regarde ma moto pour rouler à toute vitesse jusqu'à l'appartement qui me fait déjà penser à cette fille qui vivait autrefois avec moi. Celle qui fait hurler mon cœur autant qu'elle le fissure. Celle qui se cache dans ses pulls, qui cherchent à se faire discrète mais qui sait rire jusqu'à ce que les étoiles du ciel se fondent dans ses yeux vert émeraude. Celle qui me regardait avec tant d'étincelles dans le regard lorsque j'étais sur scène. Celle qui m'a changé sans le savoir pour révéler celui que je suis. Celle qui a réveillé la personne qui sommeillait en moi depuis l'enfance. Et moi, en retour, je l'ai probablement brisé. Deux haines se mélangent en moi désormais entre père et moi. L'alcool est dangereux, je n'aurai pas dû en consommer. Cette nuit reste gravée dans ma tête. J'ai touché, caressé et embrassé son corps jusqu'à l'extase. C'était une erreur.

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