CHAPITRE 34

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ELLIE

Je vois les jours défilés et pourtant j'ai l'impression d'être restée coincer dans ce restaurant, tous les regards braqués sur moi. En règle générale, je me serais jeter sous la table, honteuse d'avoir déranger autant de personne mais je ne voyais que lui, je ne voyais que sa silhouette qui s'est évaporé derrière la porte, je ne ressentais que son regard noir, rempli de colère, je n'entendais que sa voix pleine de haine qui me criait que je n'étais qu'une idiote naïve. Je sais que ce n'est pas ce qu'il a dit, mais cela n'enlève en rien le message que j'ai perçu suite à cette réaction.

Je me suis contentée de payer l'addition et de demander à ce que nos plats soient emballés. Le lendemain, avant d'aller en cours, je suis passée à l'hôpital pour déposer le plat de Lowell. Faith m'a promis de lui remettre en main propre. Depuis, je n'ai plus aucune nouvelle de lui.

Je ne vois pas comment je pourrais en avoir de toute façon, j'évite l'hôpital depuis ce jour. J'ai honte parce que je pensais sincèrement que mon plan allait marcher. Je nous voyais déjà main dans la main, en train de nous promettre des tas de choses mais non, le pousser en dehors de sa zone de confort était la pire chose à faire. Je l'ai vu sous un nouveau jour, je l'ai vu perdre ses moyens et il semblait à la fois libéré mais aussi terrifié. L'idée de s'être laissé emporter l'a tout simplement fait paniquer.

Il s'est enfui.

Je repasse en boucle dans ma tête ce moment où j'ai tout fait basculer, ce moment où j'ai forcé et qu'il a craqué. Je le connais assez pour savoir qu'il m'en veut de l'avoir poussé ainsi et cela me torture l'esprit.

J'ai tenté tant bien que mal de suivre les cours et d'être une bonne amie quand Gaspard m'a raconté l'organisation de son mariage, enfin plutôt le début.

Je me suis contentée de hocher la tête tel un robot mais au fond de moi, la voix froide de Lowell résonne et me fait trembler.

Je n'arrive pas à ignorer ce sentiment de remord qui grandit en moi plus les minutes passent. Tout est de ma faute, Lowell m'avait prévenu qu'il ne pouvait pas me donner plus, qu'il faisait des efforts mais j'en voulais toujours plus. J'avais cet espoir grandissant que moi, Ellie, la fille ridiculement naïve, pouvait changer une réalité bien trop triste. L'espoir fait vivre comme on dit, mais l'espoir est aussi naïf que moi finalement.

Je me suis laissée emporter dans une vague d'espoir qui s'est retourné contre moi pour m'ensevelir complètement.

« —Mademoiselle ? » M'interpelle une personne d'une voix polie mais un brin agacé.

Je relève la tête et constate alors que trois clients me dévisagent, tous énervés.

J'écarquille les yeux et m'empresse de scanner les articles de la femme en face de moi. Je marmonne une excuse auquel elle répond par un simple soupir. Je sens mes joues chauffés et l'envie de m'enfermer dans la réserve me chatouille.

Comment puis-je être si préoccupée par l'incident avec Lowell au point d'être déconnectée de la réalité ?

Je déglutis et remercie la cliente d'avoir fait ses achats dans la superette. J'enchaine avec le client suivant et trouve un certain réconfort dans le travail.

J'enchaine les encaissements, rigole même lorsque Gretchen me lance un pique et me retrouve à sympathiser avec le chien du pharmacien d'en face.

Je sais au fond de moi que je fais uniquement cela pour me changer les idées mais cela semble fonctionner.

Lorsque mon service est fini, je me retrouve à nouveau face à la triste réalité. J'enfile ma veste rouge, enfonce mes mains dans mes poches et quitte la boutique.

Maladivement SéduisantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant