CHAPITRE 84

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LOWELL

Je presse le pas et évite un enfant qui trébuche à mes pieds. Je jure entre mes dents et l'enjambe puis relève la tête pour croiser le regard désapprobateur d'une femme qui semble être sa mère.

Je lève les yeux au ciel et trace ma route. Ce gamin n'avait qu'à savoir marcher. Je suis déjà remonté à l'idée d'aller avec mon père au cimetière, ce n'est pas le moment de me reprocher quoique ce soit.

Je serre les dents et plisse les yeux en apercevant que je m'approche enfin de l'immeuble en question. Je suis en retard, et en règle général je ne me serais pas pressé, j'aurais probablement pris mon temps et j'aurais fini par lui poser un lapin mais j'ai comme l'impression que je ne devrais pas le faire. Lorsqu'il s'agit de ma mère, je ne peux pas rajouter une connerie de plus sur la liste. Je ne pensais pas être si heureux mais surtout si stressé à l'idée d'aller la voir.

Je me rappelle à peine de son enterrement. Je sais simplement que j'avais passé le plus clair de mon temps à me faire frotter les cheveux par les amis de la famille qui tentaient de consoler le pauvre gamin qui venait de perdre sa mère. Je grimace rien qu'à cette pensée. J'ai toujours cette culpabilité en moi, et c'est sûrement la raison pour laquelle je me mets à courir en constatant que mes 5 minutes de retard se transforment en 20. C'est cette culpabilité qui me pousse à mettre de côté ma colère contre lui. C'est comme si le fait qu'il m'ait enfermé dans cet hôpital soit exactement le châtiment que je devais m'infliger pour ne plus ressentir cette brûlure au creux de ma poitrine à chaque fois que je repensais au sourire de ma mère et à sa voix me criant de rester ici et de l'attendre.

Je finis par me reconnecter à la réalité lorsque j'atteins la porte métallique de l'immeuble. Une certaine angoisse s'empare de moi à l'idée d'aller chez mon père. Je sais qu'il a vendu la maison dans laquelle nous habitions pour se payer un appartement en plein centre de Philadelphie mais la possibilité de visiter ce nouveau lieu de vie ne m'a jamais traversé l'esprit.

Je tape, enfonçant littéralement mon doigt sur les touches, le code que mon père m'a fourni puis tire la porte pour m'engouffrer à l'intérieur.

Je frissonne en croisant du regard mon nom sur la boîte aux lettres, enfin je veux dire le nom de famille de mon père.

Je me répète sans cesse "Troisième étage, appartement 6b" alors que l'ascenseur entame sa montée.

Je commence à regretter d'être venu, j'aurais dû suivre Ellie à la faculté...

Les portes s'ouvrent et avant que je ne puisse protester, mes pieds se mettent à marcher en direction de l'appartement. J'ai envie de rire, je n'arrive pas à croire que je suis dans un état pareil. ll y a quelques mois j'aurais foncé tête baissé pour lui rentrer dedans, mais je sais que je n'ai plus le droit.

Nous nous sommes expliqués, certes nous étions fortement alcoolisés et je doute que ces raisons soient assez importantes pour être validées mais je me reconnais en lui et je sais qu'il est aussi nul que moi pour exprimer ce qu'il ressent.

La porte s'ouvre en grand et il se décale pour me laisser passer. J'essaye de ne pas trop détailler la pièce du regard mais je suis de suite attiré par un cadre accroché au mur. Il s'agit d'une photo de nous trois, je reconnais cette photo, c'était pour mon 10 ème anniversaire.

Je détourne le regard lorsque le sourire éclatant de ma mère me donne envie de Gerber.

Je l'entends se racler la gorge ce qui me fait tourner le regard vers lui.

"—Tu veux boire un truc, jus d'orange, café, bière ?" Me propose-t-il d'une voix faiblarde.

Je réprime un sourire d'amusement et il attrape son long manteau noir et ses clés de voiture avant de me faire signe de le suivre.

Maladivement SéduisantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant