7 août 2017 (M)

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Mathieu – 41

« C'est la première fois que je vais visiter Paris, tu ne peux imaginer combien je suis excité ! » me lance Andy à peine assis dans le jet que Bastien a fait affréter. Je le conçois aisément, au regard de son effervescence depuis hier. C'est touchant.

« Paris a l'air plus important que moi, visiblement, me moquai-je.

— Dans mon esprit, Paris, c'est toi, me rétorque-t-il en quelques secondes.

— Un point, bravo.

— Tu deviens jaloux, c'est intéressant, souligne-t-il.

— J'ai toujours été jaloux, mais jamais personne ne l'a réellement remarqué disons.

— Par rapport à moi ?

— Tout le monde. Je n'aime pas compter moins que les autres, et ce dès que l'on me connaît.

— Comme tout alpha qui se respecte, sans doute.

— Oui, clairement. C'est important de savoir que l'on est présent dans l'esprit d'une majorité.

— Et dans leur cœur ?

— Pour certains. Mais c'est complexe. Dans une certaine mesure, tu connais ce sentiment du fait de tes activités...

— A quoi penses-tu précisément, Mathieu ? Parce qu'être un acteur porno, ça a des conséquences sur tous les domaines de la vie...

— N'être vu que comme le beau dominant. Jamais personne n'a réellement cherché à dépasser cette image. Enfin...

— Sauf Stéphane, c'est ça ?

— Et toi, Andy. Et toi ».

A ces mots, je vois ses yeux s'humidifier sans pour autant que des larmes ne s'en écoulent. Sa main se saisissant de la mienne, je le sens me serrer et me rapprocher contre son torse et son cœur. Ce n'était pas de la flatterie. C'est vrai.

« C'est aussi dans ce sens que je t'avais écrit mon message Mathieu.

— Je le sais. Tes écrits m'ont fait réfléchir à tout cela, crois-moi. Je me suis rendu compte que tous, y compris mes plus proches amis ou amants, ne s'arrêtaient qu'à la domination, voire seulement au vernis. Il n'y a que Bastien, parce qu'informé, qui a parfois pu dépasser l'image. Mais pour lui, si je montrais que j'allais bien, c'était assurément le cas. En l'occurrence...

— Plus que tu t'enfonçais dans une image positive, plus tu allais mal.

— En quelques sortes, oui.

— Dans un sens, je ressens la même chose en étant acteur. Il faut montrer son sourire, sa bonne humeur, son désir. Tout le reste est mécanique. Or, justement, nous ne voulons plus seulement la mécanique...

— Tu pourrais presque faire culpabiliser le propriétaire du studio, dis-je en rigolant pour tenter de dégonfler cette atmosphère pesante dans laquelle nous nous enfermons.

— Evidemment que non, Mathieu, ce n'est pas à toi de changer tout cela.

— Et pourquoi pas ? Tout le monde pense au bien-être des salariés, à l'empreinte écologique des entreprises... Le monde de la pornographie ne doit pas y échapper !

— Inarrêtable. Tu es inarrêtable » dit-il en m'embrassant.

Suprême Mathieu - S.M. (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant