Suprême Mathieu - S.M. (B&B)

4 août 2017 (S)

Suprême – xxxviii

Dans un sens, parler à Andy me permet de me libérer d'un secret que je n'ai jamais réussi à formuler à quelqu'un d'autre. Il faut dire que le contexte est un peu particulier. D'ailleurs, depuis mon malaise, il n'a pas osé reprendre la conversation pourtant cruciale que nous avions. Sans me dire directement qu'il pensait pouvoir m'aimer un jour, il l'a abordé. Et moi je n'ai su répondre que par un évanouissement.

Pour le moment, il est au studio pour continuer les scènes. Il a une faculté tout de même incroyable, dans la mesure où pour lui il s'agit de son métier, ce qui ne le conduit pas à remettre en cause ce que nous vivons. A l'inverse, être escort le perturbe, parce qu'il est payé par son partenaire. Il me fascine.

Je prends donc mon courage à deux mains et compose le numéro d'Arthur, qui décroche :

« Bonsoir Mathieu, je ne pensais pas avoir de tes nouvelles aussi tôt ! Comment se passe ton séjour à San Diego ?

— Mis à part un malaise parce que j'ai replongé dans mon passé, tout va bien, ironisai-je. C'est sans doute pour cela que j'ai besoin de toi.

— Tu as l'air en forme, donc je ne m'inquiète pas. Je t'écoute.

— Tu m'as demandé pourquoi j'avais dit à Nathan que je l'aimais. Je peux te répondre, aujourd'hui. J'ai été marié. A Stéphane Médrano. Pendant cinq ans. De 2008 à 2013. On s'est mariés jeunes, parce qu'on s'aimait. Et j'ai dit à Nathan que je l'aimais le jour de notre anniversaire de mariage.

— Que s'est-il passé en 2013, Mathieu ?

— Stéphane a eu un accident.

— Je suis désolé...

— Depuis 2011, il prenait de nombreux médicaments, et notamment des antidépresseurs. Il était lui aussi dans la finance, mais du côté d'une entreprise. Les choses se passaient mal. Très mal. Je le soutenais, aussi fort que je le pouvais. Mais c'était dur pour lui.

— Il s'est suicidé ?

— Non, ce jour-là, il a pris trop de médicaments, mélangeant les différents psychotropes. Il est descendu dans la rue sans prendre gare à ce qu'il se passait autour de lui. Il n'a pas survécu lorsqu'il s'est fait renverser. Si j'avais été là, il ne serait pas sorti tout seul à 22 heures. Il est mort à cause de moi.

— Tu travaillais ?

— Exactement. Quand il est mort, j'ai tout arrêté. Vraiment tout. J'ai fait quelques opérations bien senties en mon nom, puis j'ai tout vendu avant de poser ma démission.

— Et avec cet argent tu as commencé à racheter des entreprises ?

— A investir plutôt. D'abord dans des entreprises classiques, puis dans des clubs SM et dans le mannequinat, et ce après avoir rencontré Nathan.

— Vous étiez adeptes avec Stéphane ?

— Oui, tout à fait. De manière classique, avec la violence physique et sans exhibition.

— Tu as arrêté depuis ?

— Exactement, j'ai commencé la protection à ce moment-là.

— Tu te faisais déjà appeler Suprême ?

— Non. Suprême Mathieu... Stéphane Médrano. Ce sont ses initiales ».