21 juillet 2017 (M)

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Mathieu – 4

« Ne compte pas sur moi pour te toucher après une agression. Nous rentrons chez moi, et demain matin, nous irons déposer plainte. Il est minuit passé, l'heure est au sommeil désormais ».

Je vois dans les yeux de Dorian une pointe de déception. Il devra se contenir pour ce soir. Ce qu'il ignore sans doute, c'est que je viens de lui rappeler le premier principe de la domination : seul le maître décide où, quand et comment des séances, sexuelles ou sadomasochistes, ont lieu. Outre cette domination cachée qui me satisfait totalement, je dois avouer que je n'ai pas le cœur, ni au sexe ni à une quelconque séance.

Je suis juste dégoûté. Dégoûté par ces gens. Tous ces gens. Celles et ceux qui pavanaient à l'intérieur ne valent pas plus que les trois agresseurs. Ils sont simplement avides, aveuglés. Ce sont des salauds, définitivement, simplement. Je me demande encore pourquoi je réponds à ce genre d'invitations. Mais je reconnais que je prends un certain plaisir à venir leur faire la morale. Ils ne comprennent rien, ils croient savoir.

La limousine se gare devant l'entrée de l'immeuble. Contrairement à l'imagination des guignols qui me servaient d'assistance ce soir, je ne vis pas dans une espèce de manoir étrange, reclus dans la forêt. Non, j'habite en plein centre-ville, au-dessus de mes bureaux ; dans des appartements qui courent sur plusieurs étages. Je saisis la main de Dorian, doucement, et l'invite à descendre. Nous gravissons les quelques marches puis prenons l'ascenseur.

Dès que nous arrivons dans les étages qui m'appartiennent, Les Planètes de Holst se lancent. Plus précisément Jupiter. Dorian me regarde, affolé par la force de la musique, et se colle à moi. Je souris, et nous marchons tranquillement jusqu'à mon salon. Vient le moment préféré de mon écoute, quand la mélodie se calme et, doucement, nous emmène.

Je me remémore mes vieux cours de danse classique, notamment de valse. J'ai presque envie de danser. Et pourquoi pas après tout ? Je saisis Dorian par la taille, puis sa main, et commence à tournoyer. Je le vois perdu puis, peu à peu, prenant ses marques. Il est plus petit que moi, alors de temps à autres je le fais virevolter au-dessus du sol. Je me fais plaisir et j'essaie de lui faire oublier la violence qu'il a connue. C'est aussi ma faute si ce soir il est dans cet état. Non pas que je m'en veuille, je n'y suis pour rien. Mais je suis responsable.

Quand il vient poser sa tête contre moi, je profite de l'instant pour le détailler. Dorian n'est pas du tout le minet blond, frêle, soumis, que l'on pourrait imaginer. Au contraire. C'est un jeune homme sportif, finement musclé. Je pense qu'il nage. Je lui demanderai tout à l'heure. Pour l'instant, nous profitons. Et ses yeux verts se posent souvent sur moi. C'est plutôt agréable.

La musique poursuit son rythme tandis que je ralentis. Je laisse Dorian reprendre ses esprits avant de lui proposer de rejoindre sa chambre :

« Tu pourras dormir dans la chambre Oméga, qui est à la droite de la mienne.

— Il y a un lien avec... euh...

— La hiérarchie des mâles ? Tu le découvriras bien assez tôt. Mais oui, ma chambre est l'Alpha ».

Comme l'Alpha et l'Oméga.  

***

En couverture, le morceau évoqué. Le passage dansé est à écouter à partir de 2:58.

Suprême Mathieu - S.M. (B&B)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant